Zero déchet, en route vers un nouveau mode de vie!

Grâce à Covid-19, on va jouer sérieusement au grand Jeu des alternatives!

Comme toute crise, cette pandémie peut aussi être vue comme une opportunité. En l’occurrence, le mode de vie Zéro Déchet apporte une certaine sérénité d’esprit, grâce à un jeu que les “Zero Wasteurs-euses” pratiquent couramment : le Jeu des Alternatives. Vous avez le temps désormais: alors jouons…

Ces images de rayons de denrées vides dans les magasins vous interpellent ? Rationnellement, on peut aisément expliquer ces réflexes d’accumulation en raison de la situation exceptionnelle que nous vivons, corona virus oblige. L’idée de cet article m’est venue ce matin, en écoutant la rubrique “Le trio” dans l’émission du matin de la RTS, avec Anne Laure Gannac. Et après avoir vu, comme elle, ces images de rayons vidés de leurs denrées, comme en temps de guerre, de pénurie (réelle) ou d’économie planifiée. Comme elle, et comme vous je l’espère, je me suis gratée la tête. Mes compatriotes sont-ils devenus fous? Mais non… la psychologie sociale explique très bien cela.

Supermarché dévalisé sans raison!

Nous savons tous que ce comportement de stockage se développe à chaque situation exceptionnelle. La situation est anxiogène car pleine d’inconnus, comme celle que nous vivons depuis quelques jours. Elle pousse nombreuses et nombreux d’entre nous à se ruer dans les supermarchés pour accumuler chez soi des produits jugés indispensables. Il s’agit d’un biais cognitif bien connu, qui pousse à surestimer de très faibles probabilités, contre tout bon sens et toute logique.

Ne soyons pas victimes de la contagion… comportementale!

Là où la rubrique radio était très intéressante, c’est que ces images de rayons vides a rappelé à la journaliste un livre, que j’aime aussi beaucoup citer quand je donne une conférence sur le mode de vie Zéro Déchet. C’est le livre “The Tipping Point” de Malcolm Gladwell. L’auteur compare la diffusion des idées ou de comportements nouveaux à la diffusion de virus, sa théorie étant corroborée avec de nombreux exemples concrets. En résumé, très peu de personnes sont capables de répandre une idée, un comportement, une habitude nouvelle à l’ensemble de la population. Très peu, cela veut dire 10 à 15% seulement. Il en faut vraiment peu… Mon voisin fait le plein de riz? Ma voisine accumule les rouleaux de papier WC? Et moi, et moi…? La contagion comportementale a frappé.

A la Laiterie d’Yvonnand, aucune pénurie!

Contre cette contagion comportementale d’achats irraisonnés, mus par la peur (mais de quoi exactement, on peut se le demander!) et l’irrationalité, certains magasins indépendants ont réagis, parfois avec un humour fort à propos, comme la Laiterie d’Yvonnand, qui en profite pour photographier ses réserves de fromage!

La contagion comportementale peut aussi être très positive, à l’image de nos voisins italiens qui, confinés chez eux, interdits de bars et de restaurants, se mettent à chanter entre eux, à leurs balcons, avec leurs voisins. Le journal La Repubblica a compilé plusieurs vidéos amateurs à Napoli, Siena, Torino, Cagliari, Roma, Benevento, Lecce et Salerno, qui témoignent de cette envie de partage entre voisins, une vidéo émouvante et qui rassure sur la nature profonde des êtres humains… Relisons “L’entraide, l’autre loi de la jungle” de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Le troisième R comme réponse à l’angoisse

Celui ou celle qui a décidé de réduire ses déchets a intégré quelques principes de base, les fameux 5 R, popularisés par Bea Johnson, à l’origine du mouvement “Zero Waste” ou “Zéro Déchet”, qui se décline avec plus ou moins de bonheur dans le monde entier en associations plus ou moins efficaces. Les 5 R, c’est Refuse, Reduce, Reuse, Recycle, Rot : en français, refuser, réduire, réutiliser, recycler et composter. Le 3ème R est, dans le propos du jour, particulièrement intéressant.

Réutiliser, c’est utiliser un objet à d’autres fins que celles prévues à l’origine, quand on n’a pas forcément le gadget idoine. Cela est valable pour le pot de confiture qui va conserver des épices, pour la couverture en laine qui servira à emballer les yaourts durant leur fermentation quand on n’a pas de yaourtière, pour la salière qui servira de distributeur à poudre de dentifrice… j’en passe et des meilleures. Réutiliser, c’est re-inventer!

Celui ou celle qui a décidé de réduire ses déchets se met aussi à jouer, jour après jour, à trouver des alternatives à tout ce qui se jette. Chaque article que l’on ne sert qu’une seule fois avant de le jeter trouve son pendant réutilisable à l’infini. Et si on y jouait, là maintenant ?

Je m’arrête là. On l’aura compris, quand on est habitué à jouer à ce jeu-là, toute pénurie (pour autant qu’elle soit réelle) semble gérable sur une longue période. On a acquit un état d’esprit différent, moins consumériste, donc moins angoissé par la peur du manque. Et en plus, on évite de produire des déchets. Si on pousse  un peu la raisonnement, on peut aussi se laver les cheveux avec de la farine de pois chiches (en faire une pâte assez fluide, laisser poser 5-10 minutes, rincer), fabriquer son gel antiseptique (du gel d’aloe vera avec de l’alcool, et quelques gouttes d’huile essentielle de Tea Tree) ou mieux, se laver correctement les mains plusieurs fois par jour. Grande angoisse de mes contemporains: manquer de papier WC. On peut faire face à une pénurie utopique grâce à une douchette installée au lavabo et 2-3 linges spécifiques pour se sécher les fesses (beaucoup de pays utilisent cette façon de faire).

C’est sans fin, il suffit d’être curieux et de faire quelques recherches. Comme on est beaucoup à devoir travailler à distance et à ne plus faire les déplacements, on a désormais ce temps… Quelle aubaine! Comme je le disais, chaque crise est aussi une opportunité!

Et la pénurie alimentaire, me direz-vous? Nous en sommes très très loin, première réponse. Ma seconde réponse est de vous renvoyer au réflexe numéro 1 des zerowasteurs : commençons par faire l’inventaire de tout ce qui se mange dans les placards de notre cuisine et de nos réserves. Je suis prête à parier que l’immense majorité des habitants de ce pays ont déjà en réserve pléthore d’aliments de garde. Chacun et chacune de nous pourrait facilement tenir un siège de plusieurs semaines sans devoir aller acheter quoi que ce soit au magasin. On mangera sûrement moins de viande, ce qui est plutôt bon pour la santé et l’environnement…

Un nouveau hobby: les pots de lactofermentation

Et pour les produits frais? Un conseil: lancez-vous dans la lactofermentation ! C’est une très ancienne méthode de conservation des légumes (du lait, de la viande, du poisson…), probablement aussi ancienne que l’humanité, hyper simple et rapide à faire, la seule méthode de conservation qui enrichit les aliments de vitamines et de probiotiques. Non seulement c’est facile à faire (des légumes frais, du sel ou de la saumure, un bocal), mais c’est très joli à regarder! En plus, cela ne demande aucune énergie pour le stockage, pas comme le congélateur.

Il faut juste un certain stock de pots pour assurer un tournus, par énormément non plus car on peut en faire été comme hiver.

Ces quelques photos sont tirées du groupe “Lactofermentation et conserves naturelles” que j’ai créé sur Facebook et qui compte plus de 12’500 membres de par le monde entier! On le voit bien: quand on commence, on se prend vite au jeu !

La lactofermentation a été popularisée par la journaliste culinaire Marie-Claire Frédérique, auteure d’un ouvrage de référence et passionnant sur la fermentation “Ni cru ni cuit” et d’un blog du même nom. Elle a ouvert il y peu un restaurant à Paris – le Suri – consacré aux aliments fermentés de toutes sortes, que j’ai hâte de visiter un jour…

Et en cas de pénuries de denrées fraîches, les bocaux de lactofermentation viennent aisément “faire le joint”, comme les barils de choucroute ont sauvé du scorbut les marins des expéditions du capitaine Cook. Et c’est une activité qu’on peut réaliser avec des enfants, maintenant que l’école est fermée dans plusieurs cantons.

En conclusion, loin de moi l’idée ou l’intention de minimiser l’importance de la pandémie de Covid-19. Mon propos n’est pas ironique, encore moins moqueur. Je constate seulement que la sphère du Zéro Déchet est plutôt tranquille en ces temps troublés. Oui, on déplore l’annulation de projections de films, d’événements liés, de cours (dont par exemple ceux que je donne dans le cadre de l’Université populaire de la Broye) mais dans l’ensemble, il me semble que les adeptes sont sereines et sereins. A ce que je sache, les commerces indépendants sont ouverts et nous ne sommes pas en guerre avec des bombes qui nous tombent sur la tête.

Alors gardons le sourire, tout en observant la distance requise entre nous ! Comme nos voisins italiens, ne nous arrêtons pas de vivre et de chanter ! En mode Zéro Déchet, cela aide !

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