Climat, Environnement et Santé

Comment la politique des petits pas ne répond pas à l’urgence écologique

Dans un livre qui sera disponible en librairie dès demain vendredi 21 mai 2021, jour de la Grève pour l’Avenir, j’exprime mes craintes et mes espoirs en tant que climatologue, écologue et conseillère nationale. Le fil rouge de ce récit est de rappeler que la vie et l’environnement qui l’accueille, c’est-à-dire notre planète, est un bien précieux et rare, qu’il est de la responsabilité de chaque être humain de respecter, en particulier de celle des acteurs puissants de notre monde dont les actions et les choix peuvent contribuer à protéger ou au contraire à détruire. Un des principaux objectifs est de démontrer les nécessités d’introduire au plus vite directement au centre du pouvoir une compréhension scientifique des enjeux écologiques grâce à l’assimilation du concept de limites planétaires et de réduire tant que faire se peut la distance qui sépare science indépendante et politique dans une approche systémique. En effet, il n’est jamais superflu de rappeler que, hélas, le réchauffement climatique ne représente qu’une de ces neuf limites. L’érosion de la biodiversité et la pollution chimique en sont deux autres. Un autre objectif de mon récit est de rappeler les processus démocratiques et les enjeux sociaux de la durabilité.

La première partie du livre permet de comprendre pourquoi et comment une scientifique, climatologue en particulier, a été envoyée au Conseil national par l’électorat vaudois. Il s’agit donc de faire état de l’urgence climatique et écologique, de l’évolution de cette conscience au sein de la population, des revendications qu’elle a engendrées entre 2018 et 2019 et de revenir sur mon parcours qui a abouti à mon engagement en politique durant la même période. Le rôle de l’éducation au développement durable y est rappelé avec insistance.

La deuxième partie raconte ma découverte du fonctionnement de nos institutions de l’intérieur et les réflexions qu’elle a suscitées au sujet du pouvoir ; de la politique, de l’argent et des médias. Mes déceptions face au constat de l’inadéquation de la politique des petits pas avec l’urgence écologique et une analyse de ses principales causes. J’insiste sur l’inégalité des représentations, revient sur les différences des systèmes de valeurs de la droite et de la gauche, et le rôle des conflits d’intérêts et de la désinformation qui minent les fondements de notre démocratie. Je relève l’obsolescence du fonctionnement et de la structure « par silo »  du travail parlementaire. La nécessité d’introduire au plus vite l’approche systémique au sein même du pouvoir politique, tant législatif qu’exécutif. Un chapitre entier est ensuite consacré à l’irruption de la COVID-19 qui a marqué pratiquement l’intégralité de la première année de cette législature et celle en cours, des causes et des principales conséquences de cette pandémie et là également de la nécessité d’un rapprochement entre science et politique.

La troisième partie présente justement les enjeux et les obstacles à un tel rapprochement avec l’exemple de la sous-estimation du risque pour l’environnement et la santé publique liée à la dissémination des pesticides de synthèse. Enfin, je reviens sur les principaux enjeux de cette législature en termes de politique climatique et de la formation, de la recherche et de l’innovation qui sont mes domaines de compétences scientifiques et professionnels. Il sera aussi question de la politique agricole, dont les enjeux de durabilité sont très importants. En prévision des votations populaires du 13 juin 2021, je présente mes arguments en faveur de la loi CO2, ainsi qu’en faveur des deux initiatives de sortie programmée de l’usage des pesticides de synthèse qui offrent l’opportunité inédite aux Suissesses et aux Suisses de se débarrasser d’une des principales sources de contamination de notre eau, notre air, nos sols et nos propres corps.

Enfin, à travers ce parcours, j’insiste sur la nécessité d’une révolution idéologique, partant d’une critique sévère de la pensée dominante néolibérale et du constat de son échec à rendre les peuples heureux et bien-portants. En effet comment prétendre apporter le bonheur de tous en excluant le plus grand nombre et en détruisant les fondements mêmes de notre survie et de celles de nos enfants ? Je rappelle que l’application politique de l’assimilation du concept scientifique des limites planétaires signifie une acception forte de la durabilité et que celle-ci implique forcément le remplacement du système de valeur dominant du néolibéralisme par autre chose. Cet autre chose reste encore à définir collectivement, mais il repose forcément sur l’écologie, en tant que science, mais également en tant qu’idéologie politique et croyance. Croyance et conviction en la possibilité de construire ensemble, à l’échelle planétaire, une société interconnectée capable de cohabiter en bonne intelligence avec les autres êtres vivants, garants de notre propre survie. Car l’humanité, qui prend conscience d’elle-même mise face à l’impératif de respecter la finitude du monde, a besoin d’un récit d’espoir. Les écosystèmes et les gens sont résilients, il est beaucoup trop tôt pour baisser les bras, mais également beaucoup trop tard pour continuer à ne rien faire ou si peu !

Une climatologue au Parlement

 

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