Le grain de sable

Une lenteur parfaitement légitime

La rue, la grande majorité des partis politiques, la presse, et naturellement les Etats étrangers reprochent au Conseil fédéral la lenteur de sa prise de décision. C’est ignorer le rôle de deux particularités helvétiques : la neutralité et le gouvernement collégial.

La neutralité sur le plan international 

Ce n’est pas une notion de science dure, et même si le droit international en fixe les contours, son contenu n’est pas défini en détail. Un Etat neutre assume une responsabilité non seulement envers sa population – comme chaque Etat – mais encore, à cause de sa neutralité, envers les Etats attaquants autant qu’envers les Etats attaqués, en même temps qu’une responsabilité envers les « autres Etats » (je mets tout au pluriel pour garder un point de vue général). Toute décision de politique étrangère en matière de sanction, par exemple, impliquera donc une appréciation d’ensemble particulièrement délicate, plus affinée, éventuellement, que celle prise par les Etats non neutres. Ces derniers sont tenus avant tout à l’égard des Etats membres de leurs alliances éventuelles – conclues à l’origine dans l’intérêt de leur population. La seconde situation, celle des Etats non neutres, est moins complexe que celle des Etats neutres.

Le gouvernement collégial

Peu de guerres, à ma connaissance, sont déclenchées par des pays à gouvernement collégial. Sauf le pays attaqué dont le gouvernement, collégial ou non, doit prendre une décision très rapide – puissions nous n’avoir jamais à vivre cette situation ! – les autres Etats doivent peser le pour et le contre pour décider de la meilleure attitude à avoir par rapport aux pays en guerre. Cette pesée d’intérêts – où la question de la paix intérieure du pays est aussi importante que celle de la paix extérieure – exige une confrontation entre les cultures et sensibilités nationales lesquelles s’affrontent au sein des membres d’un collège gouvernemental : cet affrontement des intérêts intérieurs – qui exige un peu de temps – est  peu connu  des pays à gouvernement non collégial.

Il n’est pas certain que ce soit toujours la meilleure décision qui soit prise en fin de compte, car la solitude du pays neutre au gouvernement collégial, donc peu dirigé par les coups de cœur, est souvent blâmée et condamnée, car non comprise. Elle exige, comme nous l’avons déjà écrit, beaucoup de courage et d’intelligence. Malheureusement, elle ne garantit pas forcément plus que dans les autres Etats, le discernement final.

 

 

 

 

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