Sauf erreur de ma part c’est bien la première fois que l’on a eu recours au droit d’urgence depuis son introduction dans la constitution fédérale, respectivement en 1949, 1977 et 1998, lors de la « mise à jour » de la constitution fédérale. Cela peut donc parfaitement expliquer pourquoi la procédure a pu paraître bizarre. On se trouvait devant deux difficultés principales dont la portée pratique n’avait pas du tout été envisagée.
- Le referendum concernant une loi urgente n’a pas un effet suspensif, à la différence du referendum « normal », ce qui signifie qu’une loi urgente en vigueur peut être modifiée par une nouvelle loi et la modification entrer en vigueur quand bien même la loi de base est soumise au référendum et la modification elle-même à une autre demande de référendum. C’est exactement ce qui s’est passé avec la loi covid de septembre 2020 et la modification de cette loi en mars 2021. La situation était extrêmement embrouillée mais on ne saurait jeter la pierre aux autorités fédérales, le système n’ayant encore jamais été éprouvé. Sans doute faudra-t-il élaborer une procédure particulière, par exemple en prévoyant que l’on ne peut pas modifier une loi urgente, mais qu’il faut élaborer une nouvelle loi, indépendante de la première, afin que chacune d’elles forme un tout autonome. Il est impératif d’élaborer une procédure spéciale pour le droit d’urgence afin d’éviter les malentendus et obscurités des cas actuels qui nuisent à la crédibilité des autorités sans que l’on puisse pourtant, à ce jour, leur en tenir rigueur.
- La seconde difficulté tient au contenu de ces lois urgentes. Une loi n’est pas soumise aux mêmes exigences d’unité de la matière que les articles constitutionnels, mais il est inconcevable de réunir – comme cela a été fait – dans une même loi, des objets aussi différents que des règles de pure politique sanitaire (vaccination, pass covid, test etc) et des règles de dédommagements économiques à cause d’interdictions étatiques d’exercer une activité. On peut fort bien mettre dans une loi de pure politique sanitaire des articles concernant la prise en charge financière ou le prix de tests, de vaccins, de traitements, mais il devrait être exclu de mélanger des indemnités et compensations professionnelles économiques à des mesures médicales. Ce mélange est typiquement celui qui a entaché et compliqué les choix démocratiques dans les deux votes “covidiens” de juin et septembre, mais à nouveau, il ne s’agit pas de lancer la pierre aux autorités, vu que le droit d’urgence était terra incognita.
Mais maintenant, de telles erreurs ne doivent pas pouvoir se reproduire et la vraie urgence c’est non seulement de sortir du droit d’urgence, mais au moins d’en corriger les défauts constatés.