Un(e) parlementaire averti(e) en vaut deux
Le Parlement qui siège dès aujourd’hui 2 juin devra, parmi d’autres objets, se pencher sur la modification de la loi sur les épidémies afin de permettre l’introduction du traçage de proximité (TP). Ce système (mis au point par l’EPFL) doit permettre de « retracer de manière cohérente les chaînes de transmission [du virus], d’isoler les personnes infectées, et de placer leurs contacts étroits en quarantaine ». Selon le message du Conseil fédéral (Message du 20 mai 2020 concernant la modification urgente de la loi sur les épidémies en lien avec le coronavirus [Système de traçage de proximité], p. 8 ch. 3.1), « quiconque utilise en Suisse un téléphone portable doté du système d’exploitation iOS ou Androïd [pourra] télécharger gratuitement et utiliser l’application Swisscovid indépendamment de son opérateur téléphonique ».
Sait-on bien à quoi l’on s’engage quand on accepte un tel système ?
Dans un excellent article sur son blog du Temps (« SwissCovid, consentement éclairé et responsabilité politique »), Mme Ghernaouti, professeure à l’UNIL et spécialiste de la Cybersécurité, pose 20 questions aux parlementaires au sujet précisément des garanties de sécurité offertes par l’application TP. Ces 20 questions sont fondamentales ; elles concernent en particulier les liens avec Apple-Google, l’usage obligatoire de la technologie Bluetooth dont chacun sait les défauts, voire la stratégie avérée de domination de ses acteurs
La spécialiste en cybersécurité est très claire : « sans réponses aux questions [posées], comment le Parlement pourrait-il sérieusement élaborer une loi qu’il a lui-même jugée indispensable ? ».
Le traçage serait librement choisi par chacun, mais…
Le projet de loi prévoit clairement que nulle pression ne pourra être exercée pour amener les citoyens à accepter de charger l’application sur leur téléphone portable. Cependant, peut-être convient-il de signaler quelques éléments :
- Le message précise (p. 5 et 10) : « il est essentiel que l’application SwissCovid soit largement acceptée et utilisée pour que le système de traçage de proximité atteigne le but souhaité dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19. C’est pourquoi son introduction doit être accompagnée de bonnes mesures communicationnelles…L’application — doit être largement diffusée au sein de la population » D’ailleurs un budget de 1,95 million de francs est prévu à cette fin ! (Message, p. 15 ch. 5.1)…. (Matraquage médiatique et publicitaire garanti !)
- « Pour l’heure, aucune donnée scientifique n’indique le nombre minimum de participants requis pour une implémentation efficace du système, cependant, selon un modèle scientifique, l’épidémie peut être gardée sous contrôle lorsque deux tiers de la population respecte les mesures de quarantaine ordonnées ou recommandées” (Message, p. 4 in fine)… (Matraquage garanti pour convaincre ce nombre de citoyens!)
- Le projet de Traçage est un projet de l’EPFL. Or, comme l’écrivait Le Temps du 28 mai dernier (Page économique) « l’EPFL est sous pression.. ». « Un faible taux d’utilisation serait-il un échec pour l’EPFL ?». Réponse de l’un des chercheurs du groupe, M. Edouard Bugnion : « Dans le cadre de la lutte contre le virus, les seules mesures de succès et d’échec sont de nature de santé publique »… (Faut-il comprendre que ceux qui ne choisiraient pas le traçage seraient tenus pour responsables/coupables des « échecs » en matière de santé publique ? Petit effort de culpabilisation?)
- Selon Heidi.news du 29. 05, le professeur Dick Mohr, de l’EPFZ, professeur de modélisation des matériaux, publie, à titre provisoire, le résultat obtenu avec un nouveau modèle mathématique pour prévoir l’épidémie de Covid-19. Il écrit : « Il est peu probable qu’une 2e vague surcharge le système de santé suisse. C’est une bonne nouvelle, mais elle est aussi trompeuse… Les autorités doivent garder à l’esprit que si le public ne voit pas réellement la pression exercée sur la capacité des hôpitaux, les gens pourraient ne pas prendre la menace au sérieux et ne pas comprendre pourquoi des mesures restrictives sont nécessaires »… (« Guerre des morts » garantie ! D’ailleurs la première annonce du successeur de M. Koch n’est-elle pas la mort d’un bébé ?)
Le Parlement a eu la sagesse d’exiger une base légale pour l’utilisation du TP. Il est responsable maintenant d’opérer toutes les vérifications nécessaires à la sécurité du système envisagé, s’il ne veut pas livrer la population pieds et poings liés aux GAFAM et autres spécialistes de la surveillance, sous couvert de protection de la santé.