Le grain de sable

Le vrai courage

La légitimité de la désobéissance « civile » est un problème philosophique qui remonte haut dans le temps (voir, par exemple, Antigone, de Sophocle). Il y a des cas en effet où un particulier, voire plusieurs personnes, considèrent qu’une interdiction ou une injonction contenues dans une loi sont incompatibles avec leurs valeurs fondamentales, voire avec des valeurs supérieures. C’est alors l’occasion pour ces personnes de manifester leur attachement à ces valeurs en bravant la loi, sachant qu’elles encourront une peine de ce fait.

Il faut du courage pour accomplir un tel acte et son auteur mérite le respect même si on ne partage pas du tout son opinion.

Dans ce sens, les objecteurs de conscience qui, avant l’introduction du service civil, refusaient le service militaire et acceptaient de faire de la prison à cause de leurs convictions philosophiques ou religieuses méritaient le respect.

L’aide aux clandestins français

Des jeunes ont, en France, aidé des clandestins à passer la frontière, violant l’interdiction légale.

Ils l’ont fait au nom d’une solidarité qui leur tient à cœur, sachant qu’ils risquaient d’être punis. Leur vraie générosité ne réside pas dans l’aide apportée (la situation des clandestins en France n’en était pas améliorée) mais dans le risque qu’ils acceptaient de courir personnellement en accordant cette aide interdite. Si on balaie, sous prétexte de solidarité, la loi qu’ils ont enfreinte – même très légèrement – on supprime la générosité de leur acte. On nie leur courage. On sanctionne à leur place ceux qui ont démocratiquement pris des mesures pour tenter de résoudre un réel problème qui préoccupe des milliers de personnes.

Frontière entre liberté d’une minorité et légitimité démocratique

La solidarité invoquée par les jeunes pour violer l’interdiction légale d’aider des clandestins à passer la frontière française est un motif strictement personnel à cause duquel ces jeunes ont pris des risques. C’est précisément à ce principe de solidarité que la loi violée fixait une limite dans le but de protéger la population. En aidant des clandestins contre la loi, les jeunes concernés refusent cette limite et contestent le besoin de protection de la majorité ou le moyen choisi. C’est leur liberté, éventuellement leur grandeur, mais leur opinion personnelle ne l’emporte pas comme telle sur le but de la loi voulue par une majorité.  Leur opinion personnelle peut justifier une atténuation de la peine mais non pas une négation de l’infraction. C’est bien là que réside la frontière entre liberté d’une minorité et légitimité démocratique.

 

 

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