Les non-dits de l'économie

Le conflit social entre le capital et le travail s’intensifie

La crise financière globale éclatée en 2008, la crise sanitaire liée à la pandémie qui s’est avérée en 2020 et la crise géopolitique déclenchée par l’invasion russe de l’Ukraine en février dernier ont toutes contribué à exacerber le conflit social entre le capital et le travail dans les économies occidentales.

En Suisse (et plus encore dans l’Union européenne), un certain nombre de problèmes deviennent de plus en plus évidents. Ces problèmes touchent en premier lieu le marché du travail, mais tôt ou tard, d’une manière ou d’une autre, ils ont des répercussions négatives sur le marché des produits et, de là, affectent également les finances publiques.

Les crises mondiales qui se sont succédé et, d’une certaine manière, se sont chevauchées depuis 2008 ont poussé de plus en plus d’entreprises à adopter des stratégies de réduction des coûts du travail afin d’être «compétitives» dans l’économie globale ainsi que dans leur propre pays. Étant donné que seule une petite partie des entreprises est capable d’innover – que ce soit au niveau des produits ou des processus de production – la majorité des chefs d’entreprise font baisser le niveau des salaires d’une grande partie de leur personnel, essayant ainsi de réduire les prix de vente de leurs propres produits sans affecter la marge bénéficiaire de l’entreprise.

Cette dynamique du système économique est allée de pair avec la financiarisation de l’économie, à savoir, l’importance croissante des acteurs, des institutions et des marchés financiers qui ont profité de la libéralisation des activités financières pour accroître leur impact sur les décisions des entreprises en Occident. Les choix de politique économique des gouvernements et des autorités monétaires n’ont certainement pas entravé cette trajectoire, mais ils l’ont souvent soutenue pour des raisons idéologiques ou électorales. Il ne faut donc pas s’étonner de l’augmentation du nombre de travailleurs pauvres qui, malgré un contrat de travail à temps plein, doivent recourir à l’aide sociale pour joindre les deux bouts dans leur propre pays. Il ne faut pas non plus s’étonner de l’augmentation du nombre de personnes travaillant dans des conditions précaires, parce qu’elles n’ont pas de contrat de travail à durée indéterminée mais travaillent sur appel ou comme «pseudo» indépendants.

Cette trajectoire entraîne l’ensemble de l’économie vers le bas depuis plusieurs décennies, même si une petite minorité d’acteurs économiques parvient encore à surfer sur la vague de la globalisation et de la financiarisation parce qu’ils possèdent un énorme capital financier – grâce auquel ils peuvent percevoir des revenus qui leur permettent de mener une vie confortable, même si celle-ci n’a souvent aucun lien avec la méritocratie.

Si l’ensemble des parties prenantes dans le système économique ne change pas de cap, le conflit social entre le capital et le travail ne prendra pas fin, même lorsque la pandémie et la guerre en Ukraine ne seront plus qu’un mauvais souvenir dans les livres d’histoire.

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