Les non-dits de l'économie

L’euro a 20 ans mais devrait prendre sa retraite

Au début de cette année, beaucoup d’encre a coulé pour marquer le vingtième anniversaire de la naissance des billets de banque et des pièces métalliques en euros. À l’âge de 20 ans, la monnaie unique européenne devrait être mise à la retraite, étant donné qu’elle n’a jamais contribué au bien commun comme aurait dû le faire une vraie monnaie commune.

Tout d’abord, il est nécessaire de distinguer sur le plan conceptuel la monnaie unique d’une monnaie commune, même si la très grande majorité des économistes ne sait pas faire la distinction entre ces deux concepts. L’euro a été conçu comme étant une monnaie unique dans l’espace monétaire de la zone euro, qui en l’état est formée par 19 pays très différents les uns des autres sur le plan économique. Une monnaie unique est, par définition, la seule monnaie que l’on utilise dans un espace monétaire donné. Une monnaie commune, par contre, est utilisée dans un contexte au sein duquel d’autres monnaies existent, comme cela serait le cas si l’euro pouvait être utilisé à côté des monnaies nationales dans la zone euro. Plus précisément, l’euro devrait être utilisé seulement pour effectuer les paiements sur le plan international, entendez entre les nations (chacune desquelles étant représentée par sa propre banque centrale), tandis que les paiements au sein de chacun de ces pays devraient continuer à être effectués avec leur propre monnaie nationale.

Dans un tel cas de figure, chaque pays membre de cette zone monétaire conserverait sa souveraineté monétaire, ce qui revient à pouvoir décider ses propres taux d’intérêt, même si cela ne peut pas se faire sans tenir compte des choix de politique monétaire des pays dont la monnaie joue un rôle de premier plan au niveau mondial (notamment le dollar états-unien).

Avec une monnaie unique, par contre, les pays membres de la zone euro ont transféré leur souveraineté monétaire à la Banque centrale européenne dont les décisions de politique monétaire s’appliquent à l’ensemble des économies nationales de l’Euroland, même si les conséquences de ces décisions sont très souvent différentes d’un pays à l’autre. Dans l’histoire de la zone euro, ces décisions ont été bien plus favorables à l’Allemagne qu’aux autres pays membres de cette zone – une raison parmi d’autres qui montrent que la zone euro n’est pas une zone monétaire optimale. Déjà le fait que le taux de change de l’euro est visiblement plus faible que celui du Deutsche Mark permet de comprendre que les perdants de la zone euro se trouvent dans sa partie méditerranéenne.

Contrairement à ce qu’il serait légitime de s’attendre, toutefois, l’Allemagne (à ce jour) n’a jamais montré sa reconnaissance pour ce fait. Au contraire, durant la crise de la zone euro, éclatée vers la fin de 2009, elle a toujours stigmatisé les pays méditerranéens (surtout la Grèce), coupables, selon les Allemands, de «vivre au-dessus de leurs moyens».

En réalité, les Allemands devraient montrer leur reconnaissance en acceptant de contribuer à un système de péréquation financière par lequel des ressources fiscales sont transférées aux pays membres en difficulté, afin que la zone euro soit finalement une vraie union monétaire.

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