Les non-dits de l'économie

Monnaie et argent liquide

Les pièces de monnaie et les billets de banque vont être rangés dans des musées dans un avenir assez proche, à commencer par la Suisse et quelques autres pays avancés sur le plan économique.

Les pièces de monnaie, notamment celles de petit montant comme les fameux 5 centimes suisses, comportent en réalité des coûts de frappe plus élevés que leur valeur faciale. La tendance à réduire les dépenses publiques va donc l’emporter sur le souci d’éviter une augmentation du coût de la vie suite à la disparition des pièces de 5 centimes (voire des pièces de 10 et 20 centimes) en Suisse, étant donné que la frappe des monnaies métalliques pèse sur les caisses de la Confédération. Suite à la diffusion des modalités de paiement «mobile», notamment par les «smartphones», la crainte d’observer une pression à la hausse sur les prix des biens de consommation n’a pas lieu d’exister, parce que bien des magasins vont être équipés avec l’infrastructure informatique pour le règlement «cashless» des transactions de leur clientèle.

En ce qui concerne les billets de banque, au-delà de l’argument lié aux coûts d’impression de ces billets, qui en général sont supportés par les banques centrales (diminuant ainsi les bénéfices que celles-ci versent, en principe, dans les caisses publiques), il y a lieu de relever la fronde actuelle visant à réduire autant que possible les soustractions d’impôt et les transactions illégales réglées par de l’argent liquide. La Banque centrale européenne a annoncé le 4 mai 2016 sa décision d’arrêter la mise en circulation des billets de 500 euros, mettant sous pression les autorités monétaires de la Confédération suisse pour en faire de même avec la coupure de 1000 francs – ce que la Banque nationale suisse a refusé, au prétexte que cette coupure fait partie de l’histoire helvétique.

Or, s’il est indéniable que l’élimination de l’argent liquide ne pourra pas contribuer visiblement à lutter contre la soustraction d’impôts – car elle n’agirait aucunement sur les transactions de gros montants, qui ont lieu, de manière générale, à travers le trafic des paiements électroniques –, ni empêcher les activités illégales, qui peuvent désormais être réglées aussi par des «crypto-monnaies», il y a lieu de mettre en exergue qu’il s’agit plutôt d’une tentative (fort pathétique) pour faire en sorte que les mécanismes de transmission des taux d’intérêt négatifs décidés par la banque centrale (en Suisse comme dans l’Euroland) ne s’avèrent pas une vue de l’esprit (monétariste) suite à la possibilité d’y échapper par la «thésaurisation» de l’argent liquide.

Si les banquiers centraux étaient en mesure de comprendre la nature de la monnaie bancaire, ils arrêteraient de faire semblant de maîtriser la masse monétaire et pourraient contribuer à faire en sorte que, dans une économie financiarisée comme celle de la Suisse, les banques se préoccupent avant tout d’octroyer des crédits aux petites et moyennes entreprises tournées vers le marché domestique. Tant l’économie que les ménages et les finances publiques seraient ainsi en bien meilleure posture.

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