À partir du 1er janvier 2014, les importations et les exportations d’or de la Suisse doivent à nouveau être ventilées par pays dans la statistique du commerce extérieur national. Le Conseil fédéral l’a décidé dans sa séance du 13 décembre 2013, donnant suite à une interpellation de C. Wermuth au Conseil national afin que la Suisse respecte les standards statistiques internationaux dans le commerce des matières premières.
La statistique par pays du commerce d’or de la Suisse, en effet, avait été rendue publique en 1972 (contre paiement), mais en 1981 le Chef du Département fédéral des finances décida de ne plus publier que le total en valeur et en volume des importations et des exportations d’or de la Suisse, comme l’a rappelé en novembre 2013 le Rapport final du groupe de réflexion à l’intention du Directeur général des douanes suisses (page 3).
L’article 16, alinéa 2, de l’Ordonnance sur la statistique du commerce extérieur de la Suisse, en effet, indique que la Direction générale des douanes suisses «peut grouper certains chiffres d’une statistique si leur publication détaillée est susceptible de causer un préjudice grave à des intérêts suisses.»
Assimilant de manière implicite les «intérêts suisses» aux intérêts de la place financière nationale, le Conseil fédéral a donc décidé en 1981 de ne plus publier d’information détaillée par pays en ce qui concerne l’or importé ou exporté par des entreprises en Suisse. Il aurait en effet été problématique, en premier lieu pour les acteurs concernés, de publier les quantités d’or que la Suisse importa de l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid, comme cela a été dévoilé par des études menées dans le cadre du Programme national de recherche 42+ par des historiens ayant par la suite publié deux ouvrages (en 2005 et 2013) révélateurs.
L’intérêt de rendre transparente la statistique du commerce d’or de la Suisse n’est toutefois pas uniquement historique. Comme l’a révélé le dossier de presse publié par Stop Pillage le 4 novembre 2013, TRIAL (une association suisse de lutte contre l’impunité) a déposé auprès du Ministère public de la Confédération suisse une dénonciation pénale à l’encontre d’une importante société suisse d’affinage d’or, soupçonnée d’être impliquée dans le blanchiment de quelque 3 tonnes d’or pillées lors du conflit armé en République démocratique du Congo.
La ventilation par pays de l’or importé en Suisse est donc nécessaire si l’on veut redorer le blason helvétique. Il faut toutefois avouer que seule la traçabilité de l’origine de l’or importé en Suisse pourra éviter que des triangulations internationales fassent apparaître dans la statistique une nation qui sert pour y faire transiter l’or importé en Suisse par des pays problématiques. Dans le cas contraire, le maquillage statistique risque de ternir l’image de la Suisse au plan mondial.
