Les non-dits de l'économie

Comptes bancaires et chômage involontaire: quelle relation?

La Commission européenne vient de proposer des mesures pour faire en sorte que tous les individus qui souhaitent avoir un compte bancaire dans l’Union européenne puissent en détenir un correspondant à leurs besoins. Ces mesures, intégrées dans une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil, sont censées augmenter l’inclusion financière ainsi que le degré de concurrence entre les banques au sein de l’Union européenne.

Or, à bien y regarder, ces mesures pourraient avoir deux objectifs non déclarés:

1) réduire les pratiques de soustraction fiscale, notamment lors des transactions de petit montant (ne dépassant pas 100 000 francs), étant donné l’anonymat des paiements effectués par la cession de billets de banque entre l’acheteur et le vendeur;

2) permettre aux banques d’augmenter leurs chiffres d’affaires, grâce à l’augmentation du nombre de comptes bancaires et, dès lors, du volume de liquidité à gérer, induisant vraisemblablement aussi plus de ventes de produits financiers de tout genre.

Si le premier objectif ignore les transactions de montant élevé (au-delà de 100 000 francs) et néglige donc la lutte contre la soustraction fiscale des contribuables les plus fortunés, le second objectif fait confiance – à nouveau – au mécanisme autorégulateur des marchés, en l’occurrence le marché bancaire, méprisant l’«évidence empirique» disponible après l’éclatement en 2008 de la crise financière globale.

Qui plus est, la Commission européenne feint d’ignorer que la majorité évidente des personnes n’ayant pas un compte bancaire dans l’Union européenne ont choisi librement de ne pas en avoir, soit parce qu’elles n’en ont pas besoin soit parce qu’elles utilisent le compte de quelqu’un d’autre, comme l’a révélé en 2012 une enquête de l’Eurobaromètre à la demande de la Commission européenne elle-même.

Si la Commission européenne s’intéressait à ces deux cas de figure, elle pourrait découvrir deux raisons fondamentales de lutter contre le chômage involontaire – un phénomène de société que les partisans des «réformes structurelles» sur le marché du travail ignorent encore de nos jours, au grand dam de toutes les personnes qui ne travaillent pas malgré elles.

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