Les non-dits de l'économie

Les conflits d’intérêt de la «haute finance»

La réforme de la finance globale piétine alors que de potentiels conflits d’intérêt sont de plus en plus évidents dans les milieux de la «haute finance».

Un nombre croissant d’anciens banquiers centraux sont engagés, peu après leur départ, au sommet d’institutions financières de premier plan au niveau mondial (comme Axel A. Weber, qui est passé de la Deutsche Bundesbank à UBS, et Philipp M. Hildebrand, engagé par BlackRock quelques mois après sa démission de la Banque nationale suisse). Dans le sens inverse, de très hauts dirigeants de sociétés financières d’envergure mondiale sont embauchés à la direction des banques centrales (notamment Mario Draghi, un ancien dirigeant de Goldman Sachs qui préside la Banque centrale européenne, et Stanley Fischer, qui avant de devenir le gouverneur de la banque centrale en Israël fut vice-président de Citigroup). L’annonce que le gouverneur actuel de la Banque du Canada succédera l’année prochaine à Mervyn King à la tête de la Banque d’Angleterre augmente les soucis liés à de possibles conflits d’intérêt dans la sphère financière de l’économie «globalisée».

Si l’indépendance de la banque centrale par rapport au gouvernement de son propre pays est invoquée par les tenants de la financiarisation de la dette publique, la cohérence avec les principes sous-jacents à cette séparation des pouvoirs exige que les autorités monétaires doivent être indépendantes des sociétés financières de l’économie privée. De là, il en découle que la «libre circulation» des hauts dirigeants entre les banques centrales et les institutions financières privées, ou vice versa, devrait être interdite au plan global, ne serait-ce que pour des raisons de crédibilité et réputation des personnes et institutions concernées.

Cette discrépance évidente entre l’éthique des milieux financiers et les contraintes que le secteur public doit respecter se retrouve également – depuis l’éclatement de la crise financière globale en 2008 – entre les mesures d’austérité imposées par les créanciers aux États en difficulté financière et l’absence de toute «conditionnalité» dans l’aide financière que plusieurs gouvernements ont octroyée à une panoplie d’institutions financières menacées de faillite à cause de leurs propres errements.

Malgré la globalisation des activités financières, l’on continue d’utiliser «deux poids et deux mesures» selon les intérêts particuliers dont il est question au sein de la «haute finance». Cela ne laisse augurer rien de positif pour éviter la prochaine crise systémique une fois que la crise actuelle aura été oubliée par ses responsables principaux.

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