La Suisse et le monde

Après la vague verte, quelles priorités ?

Le 20 octobre dernier, les partis verts ont doublé leur score. Le seul parti ouvertement climatosceptique, l’UDC perd une douzaine de sièges. Quelles sont les échéances qui attendent le nouveau parlement en matière environnementale? Ces derniers mois, tant le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) que l’IPBES (Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques) ont diffusé des résultats qui font froid dans le dos.

Côté biodiversité, l’IPBES signale qu’un million d’espèces sur les 8 millions existantes sont menacées… ¾ des milieux terrestres, 2/3 des milieux marins sévèrement altérés, un quart des espèces de vertébrés, d’invertébrés et de plantes menacées d’extinction.

La forêt tropicale part en fumée pour les cultures intensives de soja et d’huile de palme, et un élevage massif, tout cela pour satisfaire notre appétit démesuré de viande nocif pour la santé (et concurrencer notre propre paysannerie) – la santé de la Terre et notre santé vont de pair. Côté climat, l’augmentation de la température moyenne sur la surface terrestre est de + 1°C (et 2° en Suisse!), entraînant une montée des mers de 0,4 cm/an. Avec 660 millions de personnes vivant à une altitude de moins de 10 m au-dessus du niveau de la mer, bonjour les dégâts.

La dégradation des sols et de leur couvert végétal réduit les capacités d’absorption de CO2, la fonte des sols gelés libère des quantités importantes de méthane… Le changement climatique s’emballe et l’humanité file du bien mauvais coton.

Voici dix ans, l’équipe du chercheur suédois Johan Rockström identifiait neuf « frontières écologiques» déterminant la viabilité de nos sociétés et le vivre ensemble sur cette Terre: le changement climatique, les atteintes à la biodiversité, les bilans du phosphore et de l’azote, les atteintes aux sols, la dissémination de substances de synthèse, la pollution atmosphérique, l’altération du cycle de l’eau, l’acidification des océans et la dégradation de la couche d’ozone stratosphérique. Plusieurs sont déjà franchies, risquant fort de rendre la Planète peu agréable à l’espèce humaine.

Il nous faut des mesures à la hauteur de la situation

De deux choses l’une. Soit les synthèses des organismes scientifiques mondiaux sont crédibles et reflètent la réalité, et des mesures fortes doivent être prises. Soit elles sont entachées de biais, et peuvent être relativisées ou contestées. Malheureusement, la première hypothèse semble bien être la bonne et ce alors sont des mesures telle que celles-ci qui s’imposent globalement, mais aussi localement:

1) Rationner (c’est-à-dire fixer des priorités en fonction des besoins et de l’équité) mondialement l’aviation, la voiture, les poids lourds…
2) Fermer les centrales électriques au charbon et les mines de charbon.
3) Revérifier tous les produits chimiques en circulation et retirer tous ceux dont l’innocuité n’est pas positivement prouvée.
4) Remplacer l’agriculture industrielle par l’agro-écologie, seule capable de nourrir une humanité en nombre croissant sans détruire les sols.
5) Interdire les plastiques, à moins d’une garantie d’un recyclage à 100%.
6) Planter massivement des arbres.
7) Protéger les sols.
8) Empêcher la surpêche.
9) Interdire tout bien qui ne peut pas être recyclé, réparé ou réutilisé.
10) Orienter les emplois, les modèles d’affaire et les investissements dans ce sens.

On voit clairement qu’on ne pourra pas ni en Suisse ni ailleurs se contenter d’aménagements périphériques de notre mode de vie. Il s’agira de réduire nos prétentions en matière de facilités au profit du bien commun, et dans le respect d’une meilleure équité sociale. On peut faire des compromis entre forces politiques mais on ne fera pas de compromis avec la climat et les conditions d’existence sur Terre. Et sortir de l’agro-industrie, du chauffage excessif de nos logements (chaque °C supplémentaire signifie 7% d’énergie en plus), de notre addiction aux véhicules surmotorisés et de la frénésie des loisirs énergivores nous fera le plus grand bien.

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