La Suisse et le monde

Elections françaises : la mort du PS, la mort d’une idée?

Le PS français est mort, dit-on. A vrai dire il est déjà ressuscité plusieurs fois. Après le résultat désastreux de la présidentielle 1969, où il avait atteint le même nombre de voix qu’en 2017. En 1993. En 2002. Mais là c’est clairement plus grave. Sous ses formes actuelles, ça a bien l’air d’être sa fin. La France rejoindrait ainsi les pays où la social-démocratie traditionnelle a disparu. C’est le cas depuis belle lurette en Italie, et survenu plus récemment en Grèce. Elle se trouve revigorée par contre en Grande-Bretagne et au Portugal. Que se passe-t-il au juste ?

Il y a clairement besoin dans toute société de forces qui se battent pour la convergence de la liberté et de la responsabilité, pour la cohésion sociale, l’égalité de chances, la promotion des milieux populaires, le respect des biens communs. Mais, trop précieuse pour être galvaudée, cette mission n’est pas donnée à bien plaire, à n’importe quelles conditions ni à n’importe quel prix. C’est bien la capacité des personnes de répondre au défi qui fait la différence.

Les erreurs de casting se paient cash

Par exemple, l’ineffable Craxi, en Italie, maître des combinazione, a clairement précipité la chute du PS italien. Ou la dynastie Papandréou en Grèce, héritière de droit divin, balayée par Tsipras. Ou encore François Hollande, héros tragico-comique qui, comme Macron aujourd’hui, avait toutes les cartes en mains, le PS tenant les régions, les grandes villes, l’Assemblée nationale, le Sénat. Mais il a continué à l’Elysée ce qu’il a fait rue de Solférino : jouer les uns contre les autres, avancer masqué, diviser pour régner, alors qu’il fallait au contraire rassembler au service d’un projet commun. Sûr qu’un Mitterrand aurait donné leur juste place tant à Macron qu’à Mélenchon autour de la table présidentielle, et les aurait forcés à travailler ensemble. Aujourd’hui ce sont eux qui se répartissent les restes du PS de naguère. Hollande, pourtant réputé maître de la synthèse, y a clairement échoué, et fut assez rapidement réduit à commenter sa propre impuissance.

Libéral social ou social-libéral, par vraiment la même chose

A Macron de nous surprendre par des synthèses d’une autre nature, en Obama français, humaniste, libéral au sens américain ; d’ailleurs c’est face à Trump qu’il a délimité son périmètre à travers sa cinglante réponse sur les enjeux climatiques.

A vrai dire, je préfère un libéral social qui a compris ce que le marché a de destructeur s’il est réduit à la loi du plus fort, et reste sans engagement écologique, éthique et social – volontaire, ou de par la loi. Par contre, le social-libéral est généralement un socialiste qui a jeté aux orties sa foi en l’Etat pour se rallier à la fable de l’autorégulation du marché et à un modèle de croissance aussi nocif que révolu.

Les partis sont mortels mais pas les valeurs

Les partis sont mortels mais la demande de cohérence, de justice, d’appropriation collective d’un dessein et d’un destin, d’une prise d’influence possible sur le cours des choses, du sens de l’intérêt général face aux groupes de pression et au court-termisme, constitue aujourd’hui autant de conditions de qualité de vie et même de survie sur cette Terre. Maîtriser le mal-développement mondial, imposer à un commerce mondial actuellement très peu régulé la priorité des conditions cadre environnementales telles que la préservation des océans, de la biodiversité, des équilibres climatiques. Et passer à une économie de l’utilité et non de l’obsolescence des biens et des personnes (le prêt-à-jeter concernant tant les objets que les humains, d’ailleurs on parle bien de recyclage pour les deux…) sont vraiment les priorités de l’heure.

Nous devons équilibrer les trois composantes-clé de toute réalité individuelle et collective que sont les dimensions écologiques, économiques et sociales, qui ne sauraient fonctionner isolément, et assurer par les plateformes internationales de négociations et de décisions collectives une capacité de prise en mains du destin commun de l’humanité. Cet humanisme s’oppose tant au néolibéralisme béat et réducteur qu’au nationalisme niveleur et agressif, les deux ne pouvant que déboucher sur la lutte de tous contre tous, individuellement dans le premier cas, tribalement (la nation) dans le second, et nécessite la transition vers un autre modèle de développement. A lui seul appartient l’avenir, quelle que soit la désignation politique de ceux qui le portent.

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