L’Europe avance, que fait la Suisse?

Guy Parmelin à Bruxelles, la (bonne) surprise?

Parmelin, seul à Bruxelles

Vendredi dernier, le porte-parole du Conseil fédéral a finalement confirmé dans un tweet que Guy Parmelin, président de la Confédération, se rendrait à Bruxelles vendredi 23 avril pour y rencontrer Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne. Les deux doivent aborder l’épineux dossier des relations entre la Suisse et l’Union européenne (UE), et en particulier la question de l’accord institutionnel.
Parmelin voyagera seul. Il ne sera pas accompagné d’Ignazio Cassis pourtant chargé des Affaires étrangères. Karin Keller-Sutter non plus ne fera pas le voyage en Belgique même si la libre circulation des personnes fait partie de ses dossiers et qu’elle compose, ensemble avec ses deux collègues précités, le trio en charge du dossier européen au sein du gouvernement. Signe avant-coureur d’un échec de l’accord institutionnel? Pas si vite.

“Et si…” et si Guy Parmelin contribuait à débloquer la situation?

Un peu trop fantaisiste peut-être. Mais voilà, les appels à la créativité ont été nombreux ces derniers temps, alors ayons-en!
  1. Guy Parmelin est collégial et défendra, à Bruxelles, la position du Conseil fédéral. Les risques de le voir “se la jouer solo” en torpillant l’accord de façon unilatérale ou en faisant preuve de mauvaise foi peuvent donc êtres considérés comme faibles.
  2. Romand, il connaît les parcours de prédécesseurs comme Jean-Pascal Delamuraz (PLR), René Felber (PS) et Adolf Ogi (UDC) qui ont su agir avec vision, courage et ambition notamment en ce qui concerne le dossier européen.
  3. Par le passé (cf. la campagne de l’UDC en faveur de son “initiative de résiliation” en 2020), il a su démontrer ne pas être à la merci de l’aile blochérienne de l’UDC. Par ailleurs, un engagement de sa part en faveur de l’accord institutionnel et de bonnes relations entre la Suisse et l’UE ne représenterait un risque que pour sa propre carrière politique – il ne provoquerait pas de fracture au sein de son parti, comme cela aurait été le cas avec un membre du Parti socialiste, du Parti libéral-radical ou du Centre/PDC. Le pire qu’il puisse lui arriver: devenir un “demi-conseiller fédéral” aux yeux de l’UDC.
  4. Pragmatique, il est conscient de l’importance de l’Europe pour la Suisse. De bonnes relations avec l’UE ont fait son succès.
  5. Il est en charge de l’économie, de la formation et de la recherche, en tant que chef du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche – trois domaines qui seront touchés les premiers en cas d’échec de l’accord. En effet, les problèmes qui se profilent seront les suivants: difficultés d’accès au marché européen, absence de reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité, possible participation en tant qu’Etat-tiers (et donc restreinte) au programme européen Horizon Europe (recherche), blocage au niveau d’une participation suisse au programme Erasmus+ (formation, échanges académiques).
  6. Enfin, il connaît déjà personnellement Ursula von der Leyen de son temps à la tête du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (2016-2018). Avant d’être nommée cheffe de la Commission européenne en 2019, Ursula von der Leyen a été en charge de la Défense dans le gouvernement allemand entre 2013 et 2019. Les rencontres en format “DACH”, réunissant les ministres allemand, autrichien et suisse, de la Défense dans le cas de Parmelin et von der Leyen – comme ici en 2017 – ont été des occasions permettant aux deux de faire connaissance.

Mais restons prudents

La marge de manoeuvre de Parmelin sera toutefois bien faible – le président de la Confédération n’est qu’un primus inter pares.
Par ailleurs, au vu de ses gaffes de communication, il n’est pas à exclure des maladresses dans son compte-rendu au sortir de la rencontre avec la présidente de la Commission européenne, ce qui ne ferait qu’agraver la situation.
Enfin, certains le disent “sous influence” en raison de la présence d’anciens secrétaires généraux de l’UDC Suisse dans son entourage proche et de son manque d’indépendance face à l’influent Secrétariat d’Etat à l’économie.

Un sauvetage de l’accord en 5 points

Mais qui sait… A Guy Parmelin de saisir alors cette opportunité et d’agir en homme d’Etat en:
  1. Clarifiant au niveau politique les trois points demandés (des pistes de compromis sont apparement sur la table) et obtenant le soutien de la majorité du Conseil fédéral;
  2. Signant l’accord et transmettant le texte au Parlement – aux parlementaires de faire leur travail!;
  3. Informant activement la population des enjeux réels du dossier européen (en vue d’un vote populaire sur la question);
  4. Ouvrant rapidement des discussions pour permettre la participation suisse à plusieurs programmes de coopération dont Horizon Europe et Erasmus+;
  5. Soutenant la rédaction d’un nouveau “Rapport Europe” afin d’élaborer la stratégie européenne à venir de la Confédération… parce que même avec un accord institutionnel, on n’est pas encore sorti de l’auberge!

L’espoir fait vivre!

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