La vie autrement

Réconciliation?

Combien de temps faudra-t-il pour que les Russes ne subissent plus l’opprobre d’une grande partie de l’humanité après l’odieuse agression de leur pays contre l’Ukraine? Certes, comme l’affirme dans une récente interview écrite le politicien d’opposition Vladimir Kara-Mourza emprisonné dans son pays depuis avril, l’idée d’une responsabilité collective serait fausse, surtout du point de vue de celles et ceux qui sont aujourd’hui en prison pour avoir pris publiquement position contre la guerre. Dans les jours qui ont suivi le 24 février 2022, plus de 16.400 personnes ont été arrêtées lors de manifestations anti-guerre. Mais il n’empêche que lorsque je vois le regard d’effroi de mon voisin ukrainien réfugié quand je prononce le mot «russe», je me dis qu’une telle plaie béante aura bien de la peine à cicatriser et qu’il sera difficile de ne pas considérer le peuple russe comme complice d’un régime exécrable.

Pourtant, le temps de la réconciliation finira bien par sonner. Encore faut-il que certaines conditions soient remplies. La première, c’est l’effondrement du régime et de ses suppôts dont Vladimir Poutine. Sans l’anéantissement du régime nazi et la disparition d’Adolphe Hitler, se réconcilier avec l’Allemagne aurait été impensable. Reste à savoir comment la société russe réussira à instaurer un nouveau gouvernement respectueux des droits humains sans effusion de sang. Ce n’est pas impossible : contre toute attente, le mur de Berlin est bel et bien tombé sans violence.

Deuxième condition, c’est la mise en œuvre d’une justice internationale pour juger les personnes coupables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, comme le fit le procès de Nuremberg à l’égard des nazis.

Troisième condition, c’est de sceller avec les nouveaux gouvernants russes à venir une étroite coopération, à l’image de l’amitié franco-allemande initiée par Konrad Adenauer et Charles de Gaulle en 1962 et dynamisée par Robert Schuman, l’un des pères fondateurs de l’intégration européenne. Trois conditions sine qua non. (Chronique publiée dans l’Écho Magazine du 21 décembre 2022)

 

 

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