La vie autrement

Lucidité et aveuglement face au crime d’écocide

Deux regards. D’un côté celui d’un chef indien qui voit son peuple et son pays détruits à grands feux. De l’autre celui du représentant d’un pays riche, la Suisse, qui vante les mérites de l’accord conclu avec les pays sud-américains du Mercosur.

“Il faut qu’on le fasse partir le plus vite possible.” Le chef indien Raoni ne mâche pas ses mots contre le président brésilien, alors que l’Amazonie, la plus grande forêt tropicale de la planète, est en proie à de graves incendies, provoqués essentiellement par la déforestation qui s’accélère. “Je pense que le président français et d’autres forces internationales peuvent faire pression pour que le peuple brésilien fasse partir [Jair] Bolsonaro et que le Congrès vote sa destitution”, avance, dans une interview à l’AFP, vendredi 23 août, le chef du peuple kayapo, qui se bat inlassablement pour le respect des droits des communautés indigènes.

« Il veut en finir avec la forêt »

“C’est une catastrophe, ce qu’il est en train de faire avec nous”, poursuit Raoni Metuktire au sujet du président d’extrême droite brésilien, qui encourage le développement de l’agriculture et de l’exploitation minière sur les terres indigènes. “Il veut en finir avec la forêt, avec nous, c’est vraiment terrible ce qu’il fait”, renchérit le cacique de 89 ans, figure internationale de la défense de l’Amazonie. “Dans le temps, les présidents du Brésil ne menaient pas des actions mauvaises, n’incitaient pas à la destruction comme ça. Et maintenant ce nouveau président fait tout de travers.”

“C’est [lui] qui excite ces gens, comme les fermiers. Ils l’écoutent. Ils pensent qu’ils ont tous les droits et se mettent à brûler les forêts” pour les remplacer par des cultures, ajoute le chef indien. “Il en va ainsi pour les coupeurs de bois, les chercheurs d’or. Ils se lâchent tous car sa parole les pousse à détruire la forêt beaucoup plus vite”, accuse Raoni.

Crime d’écocide

Voilà donc le regard lucide du chef indien sur les agissements criminels de Jair Bolsonaro. Car il s’agit bien d’un crime d’écocide qui va bien finir par s’imposer dans le droit international. Le constat de Raoni Metuktire est autrement plus pertinent que les déclarations du conseiller fédéral Guy Parmelin qui se félicite de l’accord conclu avec les pays sud-américains du Mercosur. Lequel, selon lui, n’a “rien à faire directement” avec la situation catastrophique en Amazonie.

Vraiment?

Jair Bolsonaro qui encourage la déforestation pour une agriculture intensive destinée à l’exportation notamment de viande et de sucre sud-américains, qui prive de soutien ou démantèle toutes les ONG brésiliennes favorables à l’écologie, qui méprise les peuples autochtones, les seuls à avoir encore une relation authentique avec le vivant, c’est donc ce président que la Suisse soutient et encourage par cet accord qui ne fait que renforcer l’œuvre destructrice du président brésilien? La Suisse ne devrait-elle pas plutôt soutenir Emmanuel Macron qui, fort tardivement il est vrai, s’oppose enfin à l’accord UE-Mercosur car il considère à juste titre que Jair Bolsonaro a menti sur ses engagements climatiques?

Deux regards, donc.

Celui, clairvoyant, du chef indien Raoni. Celui, aveugle, du conseiller fédéral Guy Parmelin.

 

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