L’accent russe

La culture qui résiste ( ? ) au Covid-19

L’OSR, notre orchestre (c) Niels Ackermann

Nous sommes tous à bout. A bout de patience, de tolérance, de compréhension.

Les dernières décisions du Conseil fédéral prises après que l’espoir nous ait fait miroiter une réouverture, même partielle, des établissements culturels et des restaurants, ont provoqué la colère. Lénine avait écrit, en 1904, un texte devenu célèbre « Un pas en avant, deux pas en arrière », sur la crise au sein du tout jeune parti communiste russe. C’est à cette triste danse que ressemble le déroulement de la crise sanitaire en Suisse. L’opinion publique qui se profile spontanément sur les réseaux sociaux etc., pourrait se résumer d’une manière de plus en plus claire en un seul même mot  de cinq lettres  qu’on retrouve dans plusieurs langues : honte, odium, shame, позор. Eh oui c’est vraiment le cas !

Mais marre de la politique, c’est de culture que j’aimerais vous parler aujourd’hui, ce trésor immatériel déclaré « non vital » par nos dirigeants. Qu’ils parlent pour eux mais pas pour nous tous ! Les concerts au Victoria-hall me manquent beaucoup plus que les rayons des grands magasins – je n’y ai d’ailleurs pas mis le pied depuis leur réouverture. La conférence de presse de l’OSR (virtuelle, inutile de préciser) annonçant sa prochaine saison qui promet d’être magnifique m’a remplie de joie, tandis que j’ai failli pleurer en apprenant que l’agence Caecilia s’est trouvée forcée d’annuler le reste de la saison en cours, y compris le concert du grand Grigory Sokolov que j’attendais tant – il ne reviendra que dans un an, en avril 2022 ! Évidemment, même avec 50 personnes autorisées dans une salle, l’exercice aurait été inutile pour une agence privée, sans subventions publiques. Et puis, 50 personnes au Victoria-Hall – c’est juste absurde. En revanche, sa saison 2021-2022 sera en grande partie russe, et je m’en réjouis.

Aucun cluster dans un lieu culturel n’a été enregistré en Suisse. Rien n’est plus facile à distancier et à contrôler qu’un public au théâtre ou dans une salle de concert – beaucoup plus facile que dans un magasin ou dans un bus ! Et pourtant, l’interdiction est totale. Le sevrage est dur, et le manque de culture « live » se manifeste sous formes variées.

A mon avis, c’est l’OSR qui a été le plus inventif des institutions genevoises en cette période bizarre : il a joué sous la pluie sur la plage, se déplacait dans le canton en roulotte de cirque, il a organisé des concerts en tête à- tête pour des personnes confinées. Tout cela en parallèle avec ses activités principales : répétitions, enregistrements, collaboration avec le GTG. Et le public le lui a bien rendu : le nombre de visionnages sur sa chaîne YouTube a augmenté de 900% !

Pour ma part, j’ai passé de nombreuses soirées à regarder les spectacles extraordinaires du Metropolitan-opera. Toute la saison de la plus prestigieuse (avec La Scala, peut-être) scène d’opéra du monde a été annulée – pour la première fois en plus de 100 ans d’existence.

Mais chaque soir un chef-d’œuvre est offert au public, gratuitement, à commencer par les spectacles avec le feu légendaire Luciano Pavarotti, des années 1970, jusqu’aux dernières productions.  Un vrai bonheur !

L’attention de mes propres lecteurs change aussi le focus : depuis l’ouverture des musées, ils préfèrent nettement nos articles sur les expositions aux briefings sur la situation sanitaire !

Rien ne remplace les émotions ressenties dans une salle de concert ou au théâtre plutôt que sur son canapé, les émotions que nous partageons avec les musiciens et les acteurs sur scène et les spectateurs alentour. La vente des abonnements est ouverte. Abonnez-vous, soutenez la culture vivante et faites-vous plaisir.

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