Une chronique politique sans parti pris

Agiter le peuple avant de s’en servir

Selon le président de l’UDC Albert Rösti «Nous ne voulons pas d’une Suisse à 10 millions d’habitants. Nous ne voulons pas d’une Suisse qui manque d’emplois, notamment pour les plus de 50 ans, d’une Suisse aux loyers inabordables, aux trains et autoroutes surchargés, aux écoles bondées. » Telles sont les justifications de la nouvelle initiative « pour une immigration modérée ». Un chiffre a même été avancé : 10000 immigrants par an tout au plus.

Cette proposition ignore la réalité démographique de la Suisse, un point de vue toujours voilé dans les débats parlementaires et les controverses publiques. La réalité, c’est que le taux de fécondité de la population suisse représente les deux tiers de ce qu’il devrait être pour maintenir la population. Il n’y a que 80 000 naissances au lieu des 120 000 nécessaires. Il manque chaque année 40 000 naissances. C’est le minimum de l’immigration indispensable en moyenne.

Une population, qui ne se reproduit qu’à hauteur des deux tiers à chaque génération, finit par s’étioler et, en attendant, par ne plus assurer la pension des ainés. Une population, où la proportion de retraités augmente, voit son activité économique diminuer parce que certains secteurs comme la construction stagnent.

Les emplois ne se réduisent pas avec l’immigration, ils augmentent de ce fait puisque de nouveaux besoins apparaissent. La Suisse est pour l’instant dans une situation où il y a plus d’emplois ouverts que de chômeurs. Mais ceux-ci ne sont pas qualifiés pour les emplois proposés. Le quart des médecins pratiquant en Suisse ont été formés à l’étranger : s’ils n’avaient pas immigrés la situation sanitaire de la Suisse serait déficiente. Les immigrants ne sont pas des parasites mais un appoint indispensable à la marche de l’économie.

Jusqu’à présent aucune catastrophe ne s’est pas produite parce que l’immigration, avec un solde jusqu’à un maximum de 80 000 par an, a compensé et au-delà le déficit des naissances. Sinon les pensions auraient déjà été réduites. Ce lien entre deux problèmes majeurs, pension et immigration, n’est jamais évoqué dans le discours officiel. Dans l’esprit de beaucoup de décideurs, il n’est pas établi. La proposition de l’UDC ne vise nullement à être acceptée. Elle constitue un appel d’air en vue des prochaines élections fédérales. Cela s’appelle agiter le peuple avant de s’en servir.

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