Une chronique politique sans parti pris

Neuf milliards d’impôts en trop

Tout en gardant imperturbablement son sérieux, le conseiller fédéral Parmelin a annoncé coup sur coup un milliard d’impôts pour les jeux olympiques et huit pour l’aviation militaire. En traitant comme bagatelle une telle facture, il procède à une pédagogie de la dépense somptuaire. En demandant trop, il espère obtenir un peu.

Bien entendu, il clôt cette annonce épouvantable par une note de bas de page, affirmant que ni la formation, ni la prévoyance sociale, ni l’agriculture n’en souffriront. Et dimanche soit, le président de son parti répétait que le but de celui-ci est de réduire les impôts et la dépense publique. On peut aussi admirer son sérieux lorsqu’il profère d’aussi énormes mensonges.

Pour la formation, c’est vite vu : le budget 2018 comporte déjà une réduction de 86.4 millions rien que dans le domaine des EPF. Or ce budget couvre surtout des salaires puisque les autres frais sont incompressibles. Donc il faudra licencier quelques dizaines de chercheurs ou ne pas en engager autant. Ce n’est que l’impact local d’une coupe généralisée de 3% dans le budget global de 2018 qui économise un milliard au total. Comment ajouterait-on neuf milliards aux budgets des années suivantes sans brider la recherche ? On la restreindra donc parce que cela ne se voit pas tout de suite. C’est un investissement humain à très long terme qui ne rapporte visiblement qu’à l’échelle de la génération.

Pour la prévoyance sociale, c’est pire, parce qu’elle est en déficit prévisible dès maintenant. L’AVS et la LPP distribuent encore des pensions qu’elles ne pourront pas maintenir sur le long terme. Qu’importe : les Conseillers fédéraux d’aujourd’hui auront démissionné depuis longtemps. On se souviendra de Guy Parmelin parce qu’il aura une rue à son nom dans le village de Bursins. Il n’a pas fait mystère de son attitude : “Les faits montrent que si l’on continue à développer les prestations sociales, sans priorité, on va dans le mur”. Avec neuf milliards d’impôts en plus, on y va encore plus vite et la démonstration est encore plus flagrante.

Reste l’assurance maladie qui pèse déjà trop lourd sur les finances des ménages modestes et qui pèsera de plus en plus lourd avec le progrès de la médecine et la longévité des patients. Le Conseiller d’Etat Maillard l’a estimé lucidement : « Jadis une famille ouvrière pouvait se tirer d’affaire tout juste, maintenant elle ne le peut plus. » Prélever des impôts sur le tiers le moins favorisé de la population devient impraticable et odieux, une fois qu’elle a payé péniblement son loyer, ses frais de santé, ses déplacements et incidemment de quoi garnir la table et la garde-robe. Si néanmoins on persiste, il faut en compensation subventionner loyer et assurance maladie avec de l’argent des contribuables, mais lesquels ?.

Dès lors se posent des questions inévitables : a-t-on vraiment besoin de Jeux Olympiques ? Que signifie exactement la police du ciel en Suisse, réduite aux heures de bureau, faute de pilotes et non d’avions ? Combien coûterait réellement la sécurité nationale si on la focalisait sur l’évidence urgente du terrorisme et des attaques informatiques ? Peut-on considérer comme une priorité l’éventualité très incertaine d’une guerre terrestre par rapport à la certitude de ne pas pouvoir assurer les pensions?

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