Une chronique politique sans parti pris

Mentir pour une juste cause?

 

 

Dans la campagne pour l’initiative AVSplus, les arguments sont d’autant plus spécieux que l’objectif lui ne l’est pas : assurer à tous les travailleurs une retraite digne, qui ne les réduise plus à se tourner vers l’assistance sociale pour payer leur loyer ou leurs assurances ; être réduit à mendier après une vie de travail. Personne ne peut nier qu’augmenter de 10% des pensions insuffisantes constitue une juste cause.

Mais qui paiera ? Selon la logique d’une pension par répartition, 10% de plus sur les pensions signifie mécaniquement 10% de plus sur les cotisations. Réponse contraire de l’UNIA : pour un employé gagnant 5000 CHF par mois, 20 CHF de cotisation mensuelle supplémentaire garantiraient 200 CHF de rente en plus. Au pied de la lettre, cela signifierait qu’il y aurait dix fois plus de travailleurs actifs que de pensionnés, ce qui est complètement faux. Ce grossier mensonge est illustré par la photo d’un billet de 20 se transformant en deux billets de 100, avec le commentaire insidieux : « l’AVS est la prévoyance la meilleure marché ». Par quel miracle un franc versé à l’AVS rapporterait-il plus que le même franc versé à la LPP ? Il y aurait donc plusieurs espèces de francs : les uns gonflant comme des outres et les autres se raplatissant.

Bien évidemment, l’AVS dispose déjà de ressources supplémentaires et elle en requerra encore davantage si ses prestations augmentent. Au fur et à mesure de l’élévation de l’espérance de vie, le rapport entre cotisants actifs et pensionnés s’est dégradé. On est alors sorti de la logique d’un système de répartition, pour combler le déficit par le recours à la caisse publique financée par les impôts et les taxes, en particulier la TVA.

La question honnête, qui aurait dû être posée aux électeurs, est donc : acceptez-vous de payer plus d’impôts aujourd’hui pour toucher davantage de pension plus tard ? Il n’y a pas de miracle, l’argent doit bien sortir de quelque part, un billet de 20 CHF ne se transforme pas en deux billets de 100 CHF par un tour de magie politique.

Une fois élucidé honnêtement le mystère du financement, il est possible d’envisager avec lucidité la réponse à la question inévitable : vais-je économiser plus durant ma vie active pour augmenter ma pension par n’importe lequel des trois piliers? Ou bien toucher ma pension améliorée, mais moins longtemps parce que j'aurai travaillé plus longtemps ? <Vais-je réduire mon niveau de vie durant toute mon existence pour bénéficier de longues années d'oisiveté? Tant que l’on considèrera que vingt ans d’inactivité languissante est la juste récompense de  quarante années d’une activité frénétique, on ne sortira pas de ce dilemme. Tout le reste est de la poudre aux yeux.

 

 

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