Une chronique politique sans parti pris

Détériorer le climat sans qu’il y paraisse

En décembre 2015 aura lieu à Paris une conférence de plus pour obtenir un accord international sur le climat. Toutes les conditions sont réunies pour qu’elle échoue. Des diplomates vont empoigner un problème technique, auquel ils ne comprennent pas grand-chose, pour l’escamoter derrière un rideau de paroles.

Dans toute sa crudité, le problème revient à arbitrer entre survie de l’espèce et développement économique. Ce dernier requiert de l’énergie, qui est la moins chère en acceptant de brûler des combustibles fossiles. Or ceux-ci sont de l’énergie solaire datant de 3,5 milliards d’années antérieures, stockée dans du plancton ou des plantes qui ont absorbé le CO2 de l’atmosphère en le transformant en oxygène. Enfouis sous terre, ces résidus d’êtres vivants sont devenus du pétrole et du charbon. En les brûlant, on rejette forcément du CO2 et on recrée le climat de la planète qui était en moyenne de 85° au précambrien. L’espèce humaine n’y survivra pas.

Cette évidence est régulièrement niée par les climato sceptiques qui tantôt prétendent que le climat ne change pas, tantôt que son changement est dû à des facteurs non humains. Cette thèse est évidemment subsidiée par tout le secteur économique des combustibles fossiles depuis l’extraction jusqu’à l’automobile. Le doute a été instillé au point que, pour certains esprits superficiels, le problème soit inexistant. Et pour la plupart des décideurs politiques, il s’agit du très long terme, celui auquel par définition ils ne s’intéressent pas.

Ces considérations expliquent la position de la Suisse concernant l’accord international. L’achat par la Fondation centime climatique (pour quelque 2,8 à 3 millions de tonnes de CO2 par an) de certificats d’émission a permis d'atteindre une baisse purement comptable, comprise entre 6,5 et 7,8% pour les comburants, dont la consommation réelle n’atteint pas les objectifs promis mais a augmenté au contraire. En d’autres mots, la Suisse, riche, achète le droit de polluer plutôt que d’imposer à ses citoyens-consommateurs-électeurs de pénibles mesures de restriction qui seraient vite annulées en votation populaire.

Le document résumant la position de la Suisse dans cette négociation de Paris est donc un chef d’œuvre d’ambiguïté farci de phrases comme : « La Suisse soutient un aménagement dynamique du nouvel accord sur le climat afin d’accroître l’ambition mondiale ». Cela n’engage strictement à rien de précis. Car ce document s’abstient de citer des chiffres et se cantonne à des périphrases. Entretemps, la planète a vu sa température augmenter de 0,85° depuis le début de l’ère industrielle. L’objectif de limiter le réchauffement à 2° parait déjà hors de portée. La conférence de Paris sera un échec technique et une réussite diplomatique.

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