Une chronique politique sans parti pris

A n’y rien comprendre

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J’ai sans doute consulté plus de textes traitant de l’économie, qui me fascine, que des sciences naturelles, qui sont mon métier. Il n’y a aucune comparaison entre la pénétration que j’en ai gagnée. La Nature présente certaines régularités, qui permettent souvent de prédire ce qui va se passer. L’économie ressemble à une roulette qui produit des résultats parfaitement aléatoires. On peut la décrire, mais on ne peut ni la prédire, ni la contrôler.

Exemple : l’abandon du taux-plancher par la BNS le 15 janvier. Comme un dirigeant avait vertueusement proclamé une semaine plus tôt la volonté de n’en rien faire, la décision était par nature imprévisible, tout avait été utilisé jusqu’au mensonge pour qu’elle le soit. Mais les conséquences ne le sont pas moins. Bien entendu les placements en euro ont automatiquement perdu au moins 15% de leur valeur exprimée en CHF. Cela se comprend. Mais simultanément les actions suisses en ont perdu autant. Les investisseurs individuels, comme les caisses de pension, comme la BNS, n’y ont rien gagné mais seulement perdu. Par ailleurs, la Migros premier distributeur en Suisse a déjà annoncé aux consommateurs qu’elle ne répercuterait guère – et en tous cas pas tout de suite- la diminution du coût des importations aux consommateurs. Et les entreprises annoncent des délocalisations et des suppressions d’emploi. A la roulette économique il n’y a que des perdants.

L’économie ressemble à un moteur qui serait commandé par une pédale dite d’accélérateur et une autre dite de frein, mais sans que l’on sache à quoi elles correspondent réellement. On peut freiner avec l’accélérateur et accélérer avec le frein, voire faire exploser le moteur avec l’une ou l’autre. A quoi sert-il de mettre un individu prétendument compétent au volant ? Autant avouer qu’il n’y a pas de pilote. Et qu’il n’y a pas de plan du moteur et qu’il n’y a pas de concepteur.

Comme ce serait plus simple de reconnaître la réalité selon laquelle notre économie est à ce point imbriquée dans l’Union européenne que nous ne pouvons plus prétendre à une autonomie en matière de changes. Comme cela aurait été plus naturel d’entrer dans la zone euro, c’est-à-dire de rejoindre l’Union européenne. En politique, le déni de réalité n’est jamais qu’une solution provisoire, menant à des révisions déchirantes. On peut mentir à tout le monde pendant un certain temps, on peut mentir à certains tout le temps, mais on ne peut pas mentir à tout le monde tout le temps. On devrait au moins ne jamais se mentir à soi-même.

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