Une chronique politique sans parti pris

La guerre des religions

De multiples guerres de religion ont déshonoré et ruiné jadis l’Europe jusqu’à celle qui vient à peine de se terminer en Irlande du Nord. Ce qui se passe constitue une radicalisation du phénomène.

L’origine se situe en Palestine. Deux peuples se disputent le même territoire dans un conflit, qui vise à l’élimination de l’un des deux. Il y a un peuple de trop ou un pays de trop peu. Les tentatives de pacification se heurtent à une fin de non-recevoir, tellement catégorique qu’elle ne peut prendre sa source que très profondément.

Au Moyen-Orient, il s’agit maintenant d’une guerre de religion triangulaire opposant les trois monothéismes, à travers leurs fidèles intégristes. Chaque partie combat les autres au nom de Dieu, alors que ces religions confessent le même Dieu unique. Cela signifie : plutôt que de « croire en » Dieu, chaque partie « croit que » Dieu est de son côté. Si rien n’est fait, un Etat islamiste va se créer depuis la Mauritanie jusqu’à l’Indonésie et l’Occident sera confronté à un retour de bâton des croisades.

Prévenir cette dérive à coup de frappes aériennes en Irak revient à envenimer le conflit. Condamner individuellement les citoyens occidentaux de retour du djihad en fera autant de martyrs. Proposer de retirer la citoyenneté suisse aux doubles nationaux renoue avec la pratique de Vichy, privant les juifs français de leur nationalité pour les livrer aux nazis. Si l’on continue dans cette voie, on finira par interdire la pratique de l’Islam en votation populaire. Pas de paix entre les peuples sans paix entre les religions.

La Suisse n’en prit pas le chemin avec l’interdiction constitutionnelle des minarets, agression arbitraire à l’égard de la communauté musulmane suisse, pacifique et intégrée. Le peuple a beau avoir eu le dernier mot, il a divagué en créant une source de conflit potentiellement dangereuse. Il ne faut pas continuer dans cette voie. La préservation de la sécurité repose sur l’application des lois existantes qui respectent l’Etat de droit. Mais au-delà de la répression, pourrait-on proposer aux jeunes autre chose que la religion de la croissance par la surconsommation ? Que certains s’en détournent et cherchent l’accès à un paradis par le djihad et le martyre n’est pas surprenant.

La Nature a horreur du vide. L’apostasie croissante des Suisses va de pair avec de rustiques régressions : croyance dans l’horoscope ou la voyance, fascination pour les apparitions, adhésion à des sectes intégristes, engouement pour les rebouteux, méfiance à l’égard de la science. La responsabilité des Eglises chrétiennes est donc engagée. Si elles ne soutiennent pas les esprits par la prédication d’une foi répondant aux exigences de notre siècle, si elles se cantonnent à l’action sociale et à la protection de l’environnement, elles ne remplissent plus leur fonction essentielle qui est de proposer un sens à la vie ordinaire.

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