Lors de la prochaine votation populaire de février, l’UDC s’est maintenant tout à fait rangée dans une opposition ferme et résolue. Non seulement contre le remboursement de l’interruption de grossesse et contre l’immigration de masse, mais aussi contre l’aménagement de notre réseau ferré. Dans son projet de société, les trains sont bondés ou les routes encombrées, les entreprises n’ont pas le droit de recruter le personnel qualifié s’il est étranger et les femmes qui se résolvent à la douleur d’un avortement doivent le payer de leur poche.
C’est odieux, néfaste, minable mais au moins c’est cohérent. On pourrait extrapoler et se demander ce que deviendrait (ou deviendra) la Suisse si, d’aventure, l’UDC obtenait une majorité absolue qui lui permette de gouverner à sa guise. La réponse est assez évidente : on ne gouvernerait plus du tout, puisque l’on gouverne déjà maintenant aussi peu. Le rail et la route ne seraient plus entretenus car chacun resterait chez soi ; la population résidante diminuerait car les allocations familiales et les crèches seraient supprimées ; les avortements se multiplieraient car les contraceptifs seraient interdits ; les universités seraient vidées au bénéfice de l’apprentissage ; les femmes seraient consignées à domicile et interdites de vote ; l’homosexualité serait réprimée et les pédophiles castrés ; l’armée serait portée à un million de recrues obligées de garder armes et munitions à domicile ; la Suisse se retirerait de l’ONU et dénoncerait tous les accords internationaux. C’est un projet comme un autre : remonter le temps, revenir petit à petit vers l’époque médiévale, assurer l’unité d’un canton par la pratique obligée d’une religion unique.
D’une certaine façon l’UDC rejoint ainsi les Verts dans le fantasme d’une société durable car vit sur ses propres ressources matérielles et culturelles. C’est vouloir incarner l’éternité dans le temps comme jadis le Führer avec le Reich de mille ans et Staline avec la fin de l’Histoire par le règne du prolétariat. La peste brune et la peste rouge sont deux virus résistants comme celui de la grippe : ils mutent perpétuellement mais survivent et réapparaissent sous des formes tantôt atténuées, tantôt virulentes. On pourra poser un diagnostic plus précis dans six semaines.