Politique européenne

Le sens politique de la responsabilité éthique

Tiens, on en entend plus parler ! De celles et ceux qui nous vantaient, il n’y a pas si longtemps que cela, les mérites de l’immunité collective pour combattre la Covid 19. Pas plus médecins que la très grande majorité d’entre nous, ces diafoirus, calfeutrés dans les salons cosys de la presse zurichoise, ont aujourd’hui intérêt à se la mettre en sourdine. Marchands de sable, ils auraient non seulement mis en danger la vie de plusieurs dizaines de milliers de nos concitoyens, mais aussi porté atteinte à notre économie qui n’aurait pas supporté l’explosion exorbitante des coûts du système de santé. Mais laissons à ces aficionados de Trump ou Bolsonaro le soin de faire leur mea culpa, à condition qu’ils soient un jour capables de le faire.

Rare aspect positif de la crise sanitaire, la question de l’humain semble reprendre la place qu’elle n’aurait jamais dû quitter au sein du débat politique. À l’opposé d’une dialectique qui confronterait l’homme et l’économie, la priorité revient aujourd’hui à l’humanisme. Alors que chacun se gargarise d’imaginer le « monde d’après », la question éthique a retrouvé ce brin de légitimité que des managers, des CEO ou autres financiers de tout poil lui avaient contesté depuis la domination de l’idéologie néolibérale.

Bien que restée en-deçà des espoirs nourris à son égard, la « responsabilité sociale des entreprises » (RSE) figure depuis une dizaine d’années sur l’agenda de l’Union européenne. À l’exemple de ses propres efforts pour instaurer un salaire minimum européen, celle-ci se heurte toutefois à l’hostilité de certains pays membres et d’une grande partie du patronat européen. Cela n’est pas sans rappeler l’opposition qui se manifeste aujourd’hui en Suisse à propos de l’initiative « Entreprises responsables – pour protéger l’être humain et l’environnement ». Que ce soit à l’intérieur de nos propres frontières ou de celles de l’espace communautaire, la morale et le civisme tentent de récupérer leurs lettres de noblesse qui leur furent si longtemps retirées par aveuglement ou par le goût immodéré d’un vil profit capitaliste.

Certes par pure coïncidence du calendrier, cette initiative populaire arrive au bon moment. À l’heure où le coronavirus a l’outrecuidance de ne pas respecter la sacrosainte neutralité helvétique sur notre territoire, cette votation a pour qualité première de nous rappeler qui nous sommes, à savoir des femmes et des hommes dignes de notre nom qui ne peuvent plus accepter l’exploitation inhumaine d’autres femmes, hommes – et enfants – également dignes du leur. N’ayant peut-être pas le monopole du cœur, les initiants ont le cœur à l’ouvrage non seulement pour le plus grand bien de milliers de personnes maltraitées à travers le monde, mais aussi pour la renommée internationale de notre pays. Car, au-delà des intérêts particuliers de telle ou telle entreprise, la grande gagnante de cette initiative, si elle devait être adoptée, ne serait autre que la Suisse.

 

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