Politique européenne

Les précieuses ridicules de l’écriture inclusive

Celles et ceux qui liront ces lignes et ces mots comprendront que ces dernières et ces derniers n’ont pas été choisies et choisis au hasard, car utilisées et utilisés, dans ce cas, à bon escient. Parce que fortes ou forts en orthographe, les premières nommées et les premiers nommés appliqueront les règles grammaticales et les principes grammaticaux qu’elles et ils auront toujours apprises et appris à l’école. Amoureuses et amoureux du français, elles et ils, si émerveillées et émerveillés par la parole et le mot, rendront femmage et hommage à toutes ces autrices et auteurs qui, maîtresses d’art et maîtres d’art de l’écriture, n’ont négligé aucune précision ou n’ont omis aucun détail qu’elles et ils ont apportée et apporté à leur texte. Expertes et experts de la belle phrase, elles et ils se sentiront confortées et confortés par le plaisir qu’ils et elles éprouvent en lisant une page bien écrite ou un livre bien écrit.

Nulle rédactrice et nul rédacteur ne s’affoleront à rectifier ces incongrues répétitions que chaque institutrice ou instituteur a pourtant demandé à ses écolières et écoliers d’éviter à tout prix. Les lectrices et les lecteurs sauront que c’est la page qui est bien écrite et que c’est le livre qui est bien écrit. Par conséquent, la page qu’elles et ils ont lue leur- s’il vous plaît sans « e » – a plu et le livre qui leur a plu est celui qu’elles et ils ont lu. Fruit d’un intellect réfléchi et d’une pensée réfléchie, la littérature fait naître en chacune et chacun d’entre nous un goût immodéré et une joie immodérée qui resurgissent tous les jours, parfois aux heures les plus dures et aux moments les plus durs, souvent aux minutes les plus heureuses et aux instants les plus heureux.

Instruites et instruits, cultivées et cultivés, curieuses et curieux, passionnées et passionnés, les aimantes et aimants de la phrase bien construite et du discours bien construit ne supporteront pas plus longtemps cette façon, ce procédé de dénigrer au nom d’un pseudo- égalitarisme mal léché une langue qui a mis l’amour au masculin et la culture au féminin. Parce qu’il n’y a pas d’amour sans culture et pas de culture sans amour les deux genres s’imbriquent l’un dans l’autre, comme un homme dans une femme, comme un plaisir couplé à la jouissance. À l’exception de certaines allusions salaces, la féminisation des mots n’est pas répréhensible en soi. Elle le devient lorsqu’elle frise la bêtise ou, pour paraphraser Molière, se conjugue avec des « précieuses ridicules » qui sont à la cause des femmes ce que le snobisme est à l’art de vivre.

Message destiné aux âmes mal nées, qu’il soit maintenant permis, avec Edmond Rostand et sa « Tirade du nez », de terminer avec ces vers  si inimitables et si justes qui, plus que nuls autres, soulignent la beauté et l’exclusivité de la langue française: « Si vous aviez un peu de lettres et d’esprit,
Mais d’esprit, ô le plus lamentable des êtres, Vous n’en eûtes jamais un atome, et de lettres, Vous n’avez que les trois qui forment le mot: sot !, Eussiez-vous eu, d’ailleurs, I’ invention qu’il faut, Pour pouvoir là, devant ces nobles galeries, Me servir toutes ces folles plaisanteries, Que vous n’en eussiez pas articulé le quart, De la moitié du commencement d’une, car Je me les sers moi-même, avec assez de verve, Mais je ne permets pas qu’un autre me les serve ».

 

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