Malgré les apparences, aucune solution en vue pour le stockage profond des déchets nucléaires

Ce papier explique pourquoi le stockage des déchets nucléaires en couche géologique profonde n’est pas résolu après plus de quarante ans d’efforts. Le lieu choisi pour l’entreposage définitif devant être annoncé courant 2022, le sujet devient chaud. Je présente ici quelques faits essentiels à la compréhension de ce dossier.

 

Les promesses de la Nagra

Les producteurs de déchets radioactifs ont confié à la Nagra le soin d’éliminer le risque posé par leurs déchets. L’arrêté fédéral du 6 octobre 1978 entérina pour la première fois le principe de leur stockage durable et sûr. La Nagra est une coopérative fondée par les sociétés propriétaires de centrales nucléaires qui assument les coûts de gestion des déchets selon le principe du pollueur-payeur (article 74, al. 2 de la Constitution). La Confédération fait partie des coopérateurs puisqu’elle a la responsabilité des déchets radioactifs de la médecine, de l’industrie et de la recherche pour lesquels elle prélève une redevance en vue de leur stockage définitif. Mais c’est la Nagra qui mène le projet. Et sur son site web, tout semble sous contrôle.

Le stockage serait fait à 500 mètres de profondeur, dans de l’argile fossilisée (dite « argile à opalinus »). Cette roche – formée de microplaquettes de minéraux argileux – a la propriété de gonfler au contact de l’eau et d’empêcher que l’eau n’aille plus loin. L’argile fossilisée serait suffisamment compacte et stable pour garantir un dépôt sûr et les résultats des évaluations en cours devraient garantir que les conteneurs de déchets hautement radioactifs – dont certains font plus de cent tonnes – ne soient pas placés dans un système perméable à l’eau qui ferait remonter la radioactivité en direction de la surface. Le cahier des charges précise que les équipes de surveillance devront pouvoir atteindre et retirer du site les conteneurs, au cas où ceux-ci poseraient un problème (voir l’image 1 en tête de l’article). Bref, le programme de gestion des déchets nucléaires et de leur stockage en couche profonde se veut rassurant et son budget total est chiffré à 19,5 milliards de francs (environ 1 centime par kilowattheure d’origine nucléaire).

 

Illustration 2 : Carte des trois sites pressentis; la Nagra compte annoncer cette année encore lequel des trois sites sera choisi; l’autorisation générale de construction du dépôt est prévue pour 2031.

 

 

Illustration 3 : Le schéma ci-dessus illustre l’ampleur du projet. On remarque un dépôt pilote et une ‘zone expérimentale’, ce qui laisserait entendre que la Nagra anticipe des problèmes imprévus.

 

S’interroger sur l’histoire d’une entreprise hors-norme apporte une lumière indispensable à sa compréhension

Pour mieux apprécier les termes principaux du stockage des déchets en couche profonde, il faut prendre en compte l’expérience des dépôts similaires. Les géologues Marcos Buser et Walter Wildi rappellent que si le concept du dépôt en couche profonde remonte aux années septante et s’est imposé dans les années quatre-vingt, le coût estimé pour la Suisse – à l’origine – avait été fixé à 2 milliards (10 fois moins que le budget actuel). L’essentiel de la hausse est dû aux mesures croissantes et nécessaires pour faire face aux problèmes qui apparaissent à mesure que le projet avance.

Il se trouve que creuser dans des couches géologiques étanches a le défaut de les fragiliser et d’attirer l’eau là où elle est malvenue. Ce phénomène a été constaté dans les mines de sel réaffectées en dépôt de matières dangereuses. Le raisonnement soutenant cette option de stockage semblait imparable puisque, comme chacun peut le deviner, s’il y avait eu de l’eau, le sel aurait fini par se dissoudre et disparaître ; donc s’il y a du sel, il n’y a pas d’eau et, conclusion logique, les mines de sel sont des lieux parfaits pour recevoir des matières radioactives ou chimiques. Ce brillant syllogisme s’est toutefois avéré faux.

L’expérience a montré que le creusement des galeries avait modifié la statique de l’ensemble. En Allemagne, les sites de dépôts radioactifs dans les anciennes mines de sel de Asse (Basse Saxe) et Morsleben (Saxe-Anhalt) et les nombreuses mines abritant des déchets industriels ultimes ont permis de vérifier que le creusement des galeries et la chaleur dégagée par certains déchets attire l’eau là où on ne la voulait surtout pas. En France, le site de Stocamine en Alsace fait les gros titres de la presse pour des raisons similaires depuis des décennies.

Au vu de ces expériences concrètes, prévoir le comportement des roches traversées par un réseau dense de galeries demande une longue période d’observation pour comprendre de quoi il retourne. Cette approche permet d’éviter les coûts d’assainissement d’un dépôt étanche que la circulation des eaux souterraines aurait fini par crever.

 

L’argile fossilisée est-elle suffisamment stable pour accueillir un dépôt de déchets de haute activité ?  

Selon la Nagra, l’argile fossilisée est stable et suffisamment compacte pour accueillir un tel dépôt, du moins tant que personne ne vient la perturber en y creusant des galeries.

Dans le voisinage d’un des tunnels autoroutiers de la Transjurane – celui du Mont-Terri près de Saint-Ursanne – des expériences ont été menées dans de l’argile fossilisée identique à celle qui devrait accueillir le dépôt de la Nagra (l’argile à opalinus). Les expériences ont montré que les argiles fossilisées se fracturent fortement dans le voisinage immédiat de la galerie et forment un réseau interconnecté perméable lorsque l’on retire la roche au moment du creusement. Pour illustrer le propos d’une hypothèse simplifiée, pour un tunnel de 3 m de diamètre, la zone fissurée va jusqu’à 1,2 m à l’extérieur du tunnel, ce qui implique que les galeries ayant ce diamètre seraient bâties dans une zone de roche fragilisée se déployant sur toute leur longueur ; dans cette hypothèse, vingt galeries-«spaghettis» de 900 mètres de long seraient ainsi logées dans un espace fragilisé d’un volume de 600’000 m3 !

Vu l’impact de l’intervention humaine, faut-il craindre l’inondation des galeries et la création d’un système d’eau souterraine capable de remonter la radioactivité vers la surface ? Les promoteurs du dépôt caressent l’espoir que l’argile fossilisée sera capable de colmater les fissures dans un temps acceptable, en comptant sur la capacité d’expansion de cette roche au contact de l’eau. Mais Marcos Buser et Walter Wildi m’ont rapporté que différentes études scientifiques sur l’argile à opalinus estiment le temps de vérification de cette capacité d’autoréparation à un siècle.

Alors, pourquoi démarrer en 2031 la création d’un site pour l’entreposage des déchets radioactifs si l’expérience en cours ne pourra pas délivrer de réponse décisive avant longtemps ? Pourquoi creuser de nouveaux puits et galeries dans une couche géologique profonde si le concept n’est pas encore mûr et que des erreurs de conception contraignaient finalement la Nagra à tout recommencer ? L’histoire des dépôts de matières dangereuses ayant montré que les couches géologiques réputées étanches laissent passer de l’eau après l’intervention humaine, il serait sage de continuer à observer les sites existants avant de poursuivre l’aventure technologique dans un autre lieu des entrailles de la terre.

Les motifs ci-dessus devraient suffire à demander un report du calendrier du projet de la Nagra et à s’assurer que la stratégie poursuivie jusqu’ici soit analysée de façon objective et indépendante.  Car le risque d’échec d’un site de stockage à 500 m de profondeur est encore majoré par un autre problème de taille dont les termes ne sont toujours pas clarifiés.

 

L’autre problème dont la Nagra ne veut pas entendre parler

Le but d’un dépôt profond est d’éviter que l’activité humaine ne vienne le perturber et ne provoque des fuites de radioactivité. Or, pour qui regarde la carte géologique du nord-ouest de la Suisse, sous les sites des dépôts pressentis, on trouve, quelques centaines de mètres plus bas, une fosse géologique dont la caractéristique est de receler des énergies fossiles, du gaz notamment (on parle de Permo-carbonifère). Dans le cas présent, Walter Wildi et Marcos Buser relèvent que la Nagra ne veut pas faire de forages pour vérifier les quantités de gaz et des autres matières premières qui pourraient se trouver sous les sites pressentis, de peur d’en trouver suffisamment, ce qui compliquerait les choses…

 

Illustration 4 : Carte du Nord de la Suisse avec les fosses du Permo-carbonifère et la localisation des trois sites pressentis.

Retirer le gaz naturel du sous-sol pour un usage industriel quelconque suffirait à déstabiliser les couches d’argiles fossiles situées au-dessus (risque d’affaissement et de déstructuration, un phénomène géologique bien connu). On mesure l’ampleur de la contradiction. Si l’ambition de créer un dépôt de déchets radioactifs étanche et sécurisé à 500 mètres sous le sol pouvait être ruinée par l’exploitation de gaz, sa localisation irait à rebours du but visé. Pour le dire autrement, si l’exploitation de gaz en vue d’un bénéfice économique à court terme avait le potentiel d’entamer la sécurité d’un dépôt qui devrait rester sûr pendant 100’000 ans et constituer la clé de voûte d’un projet dont le budget avoisine les 20 milliards, le projet de la Nagra ne serait pas crédible. Alors pourquoi ne pas vérifier cette partie de l’équation ?

Selon les géologues Buser et Wildi, malgré huit forages d’une profondeur de 1’000 à 2’500 mètres, la Nagra n’a jamais fait les analyses qui auraient permis de s’assurer qu’il n’y a pas de gaz ou d’autres matières premières en quantité exploitable. Sur les huit forages, seul un, Riniken, a été fait au-dessus du Permo-carbonifère, mais sans aller au fond du problème évoqué ici.

On nous fera peut-être remarquer que placer le site au nord de la zone « Zürich Nord-Est » permettrait de ne pas se retrouver au-dessus du Permo-carbonifère puisque le socle de roche cristalline sous-jacente est un peu plus élevé qu’ailleurs. Mais ce secteur a d’autres défauts géologiques – dont celui expliqué dans la première partie de ce papier – et il est fortement contraint par la frontière qui zigzague entre la Suisse et l’Allemagne selon des courbes improbables.

 

En guise de conclusion

Sur l’ensemble des questions qui méritent un débat public, je me suis concentré sur deux aspects : les zones de roches fracturées autour des galeries qui pourraient créer un réseau de circulation d’eau souterraine dommageable ; le manque d’analyse de la Nagra sur la question de la présence de gaz exploitable et d’autres matières potentiellement utiles sous le dépôt projeté. Vu ces deux lacunes, le calendrier de la Nagra semble déraisonnable. Tout indique qu’il vaudrait mieux que la Nagra réponde de façon documentée à ce double régime d’incertitudes avant que de se lancer dans la création de ‘zones expérimentales’ supplémentaires à 500 mètres sous terre. Ce genre d’expérience pourrait se muer en politique du fait accompli, au détriment de la volonté des citoyens des régions concernées.

Que le lecteur ne se méprenne pas sur mes intentions. Les arguments donnés ici ne contestent pas l’hypothèse d’un dépôt dans une couche géologique profonde. Ils remettent en cause la méthode et le calendrier fixé par la Nagra et par les autorités fédérales. Contrairement à ce que d’aucuns laissent accroire, il faudra plus de temps que prévu pour parvenir à un résultat scientifiquement solide sur ces interrogations et d’autres questions non mentionnées ici. Mais l’avenir reste ouvert. Il est possible que les résultats finissent par confirmer le bien-fondé du concept et du site choisis par la Nagra, mais il est aussi possible qu’ils l’infirment.

On verra quelles sont les réponses de la Nagra à ces critiques. Il semble toutefois raisonnable de reconnaître que le problème du stockage définitif des déchets radioactifs n’est toujours pas résolu. La Nagra a néanmoins annoncé qu’elle déterminera le site définitif encore cette année. Vu le contexte, il serait sain que les citoyens demandent et obtiennent des expertises indépendantes. Car si la recherche indépendante est encore trop peu sollicitée sur les enjeux démocratiques, elle offre néanmoins la meilleure garantie d’un débat de qualité au service de la Suisse.

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Voir une conférence de Marcos Buser sur l’histoire de l’entreposage des déchets radioactifs, symposium international sur la gestion post fermeture (sept. 2021, Berne)

Frédéric-Paul Piguet

Frédéric-Paul Piguet est philosophe du droit et expert en sciences de l’environnement. L'axe principal de son blog est celui de la résilience de la Suisse et de ses habitants, alors qu'il convient de restaurer les qualités de la biosphère. Afin d'élargir le propos, le blog met aussi à profit les apports de l'histoire et de l'anthropologie.

25 réponses à “Malgré les apparences, aucune solution en vue pour le stockage profond des déchets nucléaires

  1. Je suis clairement pro-nucléaire (non dans le sens ou j’adore cette énergie, mais dans celui ou je la vois comme notre unique “parachute de secours” comme dirait Jancovici).
    Toutefois votre analyse est bienvenue, il s’agit d’entendre des arguments de fonds et non de céder à la peur irrationnelle à laquelle nous avons généralement droit.
    Ce type d’argument fait réfléchir et, effectivement, refuser les analyses nécessaires afin d’avoir des certitudes est dangereux pour ne pas dire suspect et mon envie de parachute de secours ne me fait pas oublier les nombreux scandales passés (liés à cette énergie ou à d’autres d’ailleurs). Faire aveuglément confiance à une entreprise de ce type qui a un incitatif aussi important à masquer la vérité me parait déraisonnable et idiot.
    Merci pour votre texte.

  2. Si vous ne le connaissez pas déjà, je vous recommande le superbe documentaire « Into Eternity » qui part du site de stockage permanent de déchets nucléaires en Finlande, Onkalo, et qui nous emmène vers une réflexion métaphysique sur la notion de futur et d’avenir de l’Humanité.

    https://www.youtube.com/watch?v=ovx6d34f6S4

  3. On a besoin de beaucoup d’énergie! Et encore plus si on choisit la voiture électrique! Le solaire, l’éolien, l’hydraulique ont des limites. Alors il faut développer la recherche pour le nucléaire sans déchets de longue durée. Exemple le projet mirrha en Belgique. Avec MYRRHA, le SCK CEN étudie le processus de transmutation. “La transmutation convertit les substances radioactives à longue durée de vie en substances moins toxiques à courte durée de vie” selon https://fr.wikipedia.org/wiki/MYRRHA.
    La fin du blog de Monsieur Brisson sur ce thème montre quelques réflexions également intéressantes: https://blogs.letemps.ch/pierre-brisson/2022/01/01/pour-coloniser-mars-lhomme-a-besoin-du-nucleaire-et-il-aura-des-solutions/

  4. Nos déchets nucléaires* existent et nous allons continuer à en produire. La loi nous interdit de les exporter. La principale question, non traitée dans l’article, est donc de savoir ce que nous allons en faire. Contrairement à ce que dit le titre, cette question est très loin d’être sans issues et de nombreuses propositions extrêmement bien documentées, sérieuses et de nature diverse ont émergé chez nous, en Finlande, en Suède, en France, en Russie, … Ces solutions vont de la rétention en piscines, majoritairement, à l’enfouissement profond, en phase de planification.
    Il y a lieu en effet de se hâter lentement, volontairement, car il n’y a pas urgence, et il est préférable de bien réfléchir avant de se lancer dans des choix hasardeux. A noter dans ce sens que les avis des géologues divergent significativement, si l’on on juge par les publications récentes du Laboratoire de Mécanique des Sols de l’EPFL. A noter aussi, par exemple, qu’une concertation publique est en cours au sujet d’un projet de piscine de combustibles nucléaires à La Hague. Juste pour fixer les idées, un tel bassin aurait une capacité de 6 500 tonnes de combustibles. Il serait construit à côté des bassins actuels de la Hague où refroidissent un peu moins de 10 000 tonnes de combustibles irradiés dans les centrales nucléaires françaises, l’équivalent de 100 cœurs de réacteurs. (Dépêche AFP, 04.02. 2022). A titre personnel, la solution provisoire des piscines me convient très bien. J’ai un faible pour le bleu Tcherenkov que je préfère au bleu de Delft …
    Au-delà de ces réflexions de bon sens, les spécialistes réfuteront sans peine un article qui semble très daté.

    *Au lieu de “déchet nucléaire”, il serait d’ailleurs plus correct de parler de “combustible usagé”, dans la mesure où à chaque recharge de réacteur, 95% du combustible “neuf” introduit est mis au rebut. Recyclons!

    1. Votre solution provisoire des piscines est déjà en vigueur en Suisse. Après le passage en piscine, les barres de combustibles usagées sont envoyées dans un lieu de stockage intermédiaire tel que concrétisé par le dépôt Zwillag à Würenlingen. Le danger du stockage provisoire et du stockage intermédiaire, c’est qu’ils risquent de durer trop longtemps, beaucoup plus longtemps que prévu vu l’absence de solutions abouties. L’espoir d’un recyclage – tout comme les retards dans le stockage définitif – ne font que rendre plus évident le besoin d’un stockage dont le degré de sécurité soit très supérieure à celui Würenlingen (sans atteindre le niveau de sécurité que l’on espérait atteindre avec le stockage profond puisque cette solution n’est pas disponible). Je n’en ai pas parlé dans l’article car cela menait trop loin. Quoi qu’il en soit, il n’y a donc aucune raison de poser la question de piscines supplémentaires en Suisse.

  5. Qu’est-ce qu’on dirait si pour le pétrole on n’utilisait que les produits de raffinage de la plus haute qualité et considérait tout le reste comme des “déchets” dont il faut se débarrasser ? C’est pourtant par analogie ce que l’on fait (en pire!) avec les combustibles nucléaires, dont on n’utilise essentiellement aujourd’hui que les 0,71% (!) d’uranium-235 et pas le reste (uranium-238, transmutable dans un réacteur surgénérateur en plutonium-239, fissile comme l’uranium-235). De même, les actinides de longue durée de vie résultant de la fission peuvent être valorisés (“brûlés”), en produisant par ailleurs de l’énergie supplémentaire, dans certains types de réacteurs (réacteurs à neutrons rapides “de génération IV” actuellement en développement). Solution clairement préférable et plus intéressante que celle du stockage “définitif” en profondeur! Il vaut donc mieux, comme l’écrit justement M. Jacquot, prévoir entre-temps des solutions de stockage temporaire en surface (les volumes sont faibles), avant le recyclage ultérieur de ces “déchets”.

    1. Votre message est clair et limpide, merci. Deux remarques:
      1° Les centrales nucléaires à neutrons rapides dites de génération 4 existent depuis les années 50; les statistiques de l’Agence internationale de l’énergie atomique étant lacunaires, il est difficile de donner un nombre précis, mais on peut estimer qu’une quinzaine de réacteurs ont été construits depuis lors. Electricité de France a construit trois réacteurs sur ce principe, elle n’a jamais vraiment réussi à leur faire produire de l’électricité (de mémoire, on était à 20% de leur capacité). De nombreux pays s’y sont cassés les dents sur le plan strictement technologique. Seuls deux réacteurs construits sur ce principe produisent de l’électricité actuellement dans le monde, en Russie (dont les critères de sécurité ne sont pas forcément les nôtres du fait de sa structure territoriale – à vérifier). Voilà où on en est après plus de soixante ans d’efforts avec les centrales dites de génération IV. Là encore, comme pour le stockage en couche géologique profonde, l’histoire de cette technologie nous enseigne qu’entre les rêves et la réalité il y a un gouffre. Je ne ferme pas la porte, mais la solution que vous envisagez est bien plus compliquée qu’il n’y parait tant sur la question de la sécurité que du délai pour commencer une ligne de production, tester les premiers réacteurs, et en faire construire un qui soit abouti et maitrisé.
      2° Revenons à la question du stockage des barres de combustibles. Si on peut les réutiliser (voir point 1), sachant que les énergies renouvelables répondront de façon croissante aux besoins de consommation électrique, combien de temps faudra-t-il pour utiliser dans les centrales à neutrons rapides les barres de combustibles usagées par les cinq réacteurs nucléaires suisses ayant fonctionné en moyenne pendant 50 années ? Faites le calcul, vous verrez, on dépasse très largement les 5 siècles, voire bien davantage. D’où ma question, pensez vous que les différents types de stockage dit intermédiaires en surface ont été pensés et sont acceptable dans leur principe pour accueillir des déchets de haute activité pendant plus de 5 siècles ?

  6. 1/ “Les centrales nucléaires à neutrons rapides dites de génération 4 existent depuis les années 50”, faux! La quatrième génération désigne les réacteurs EN COURS DE CONCEPTION, appartenant à six filières définies par le Forum international Génération IV, et qui pourraient entrer en service A L’HORIZON 2030. C’est bien pourquoi j’ai précisé “de génération IV”, il n ‘s’agit pas des “vieilles” centrales à neutrons rapides.
    2/ Fournir de l’énergie en détruisant en même temps des “déchets” qui de toute façon existent, est bien plus rationnel que de les enfouir soi-disant “définitivement” sous terre (vous avez vous même mis en doute le “définitivement). L’avantage du nucléaire est que le volume de ces déchets est faible, donc leur stockage temporaire n’est pas un gros problème. Pensons par comparaison à tous les déchets que l’on a envoyé et envoie encore sans aucun confinement en énorme quantité dans l’atmosphère (et pour d’autres dans les océans) utilisée comme poubelle. Cela pose un problème pour l’avenir bien plus sérieux que dans le cas du nucléaire où ces “déchets” sont confinés et contrôlés, et en faibles quantités.

    1. Merci pour votre retour.
      1) On est donc d’accord sur le fait que les centrales à neutrons rapides existent depuis les années cinquante, c’est l’essentiel. L’histoire longue de ce concept devrait néanmoins nous faire réfléchir sur les problèmes nouveaux auxquels les modèles de génération IV devront faire face pour garantir une sécurité optimale, problèmes auxquelles les centrales des années cinquante n’étaient pas confrontées.
      2) Sur votre deuxième point, vous ne répondez pas à la question et vous vous méprenez totalement sur mes intentions. Mettre en doute, comme je l’ai fait, le stockage en surface des barres de combustibles usagées quand leur présence dans des dépôts de surface va s’éterniser, pose la question d’un stockage à 20 m ou 30 m dans le sous-sol. Cette approche permettrait de réaliser un dépôt plus sûr que l’actuel dépôt de Zwillag, tout en étant bien moins compliqué à réaliser qu’un dépôt en couche géologique profonde. Faire ce dépôt permettrait d’envisager sereinement l’avenir du stockage profond et de juger sur pièce l’opportunité d’une centrale à neutrons rapides en regard des autres sources d’énergie, de telle sorte que l’avenir reste ouvert.

  7. J’ai apprécié votre article très circonstancié, mais il aurait été souhaitable de rappeler que la faisabilité du stockage profond (des résidus radioactifs issus du combustible usé de nos réacteurs) dans le sous-sol du Plateau suisse (couche constituée d’argiles à Opalinus, présentes depuis des millions d’années et encore là pour autant de temps) a été reconnue et entérinée par le Conseil fédéral déjà en date du 28 juin 2006
    (https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-5857.html ).
    Il est donc faux de dire et répéter qu’« il n’y a pas de solution ». Les réticences de MM. Buser et Wildi sont donc un combat d’arrière-garde. On sait maintenant que, grâce à sa plasticité, l’argile à Opalinus a la capacité de s’autocolmater après les fissures dues au percement. Si l’on avait eu affaire à des roches cristallines, comme c’est le cas à Onkalo (sur le site granitique d’enfouissement en Finlande qui sera opérationnel dès 2023 et pour cent ans avant son scellement), une injection de bentonite recrée un remplissage étanche. D’autre part, la Suisse n’a désormais plus l’intention de rechercher dans son sous-sol ni gaz profond ni pétrole en dessous de ces couches d’argile. Ces deux arguments sont donc périmés et le Conseil fédéral l’a déjà reconnu en 2006. La Nagra va proposer très prochainement, cette année encore, un ou deux sites définitifs pour les déchets hautement radioactifs (99,9% de la radioactivité à gérer) et pour les autres déchets faiblement radioactifs (0,1%), beaucoup plus volumineux mais bien moins problématiques à gérer, soit séparés soit regroupés en un seul site.
    Un petit rappel chiffré aurait été bienvenu sur les masse et volume en cause : si l’on additionne le tout sur 50 ans d’exploitation du nucléaire en Suisse (après 1’200 TWh d’électricité produits heureusement sans pépins majeurs), la quantité de combustible usé et donc de résidus radioactifs (qui représentent donc les 99,9% de la radioactivité), sera de 3’600 tonnes (à raison de 72 tonnes de combustible frais utilisé par année). Avec une masse volumique (densité du dioxyde d’uranium) de 11 grammes par cm³, ou 11 tonnes par m³, cela correspond à un volume de 327 m³ de matières nucléaires brutes, soit un petit cube de 7 m de côté. Par tête d’habitant (population de 8,5 millions) cela représente, en tout, 423 grammes ou 39 cm³ par habitant, un gobelet, et cela cumulé sur 50 ans.
    Les Suissesses et les Suisses étant habitués à trier leurs déchets, il est absurde qu’il y ait actuellement dans la loi une interdiction (purement légale mais infondée) de retraitement de ces résidus avec séparation : on a en effet 4% de produits de fission et quelques pour-milles d’actinides mineurs, comme vrais déchets radioactifs à gérer ultimement, plus 1% d’U235, 1% de Pu239 et 94% d’U238, trois isotopes (deux fissiles et un fertile) recyclables et contenant encore 25 fois l’énergie déjà produite. Ces 4% de vrais déchets nucléaires à gérer ultimement représentent donc 17 grammes ou 1,5 cm³ par habitant, le reste étant encore valorisable, comme on saura le faire avec les prochains réacteurs dits de 4e génération. Il n’est du reste pas prévu de creuser ce dépôt d’enfouissement avant 2040, le site intermédiaire de Würenlingen ayant encore des capacités pour des décennies.

  8. Commentaire de Jean-François DUPONT reçu par email et qu’il me prie de publier pour lui :

    Jean-François DUPONT:
    “Dire qu’il n’y a pas de solutions pour les déchets nucléaires c’est simplement ignorer la réalité des travaux faits depuis longtemps. Mais combien de fois ne l’a-t-on pas entendu ? Au moins dans ce blog, il y a un énorme progrès : pour la première fois un opposant au nucléaire argumente en identifiant des défauts de la solution et en proposant des améliorations à apporter encore. Bravo et merci, admettre qu’une solution a des défauts, c’est admettre qu’elle a une certaine existence. Pourtant le titre de votre post est ambigu, puisque vous dites « pas de solution en vue »… Pourtant la lecture de votre post montre que vous n’êtes pas dans la négation totale de l’existence d’une solution, mais dans l’énumération de ses insuffisances. Cela intéresse beaucoup les professionnels et j’espère que la NAGRA répondra à vos interrogations.

    “Il y a cependant quelques éléments de mise en perspective des déchets nucléaires, que comme philosophe, si non comme physicien, vous devriez évoquer. Le discours antinucléaire habituel fait comprendre que le nucléaire serait la seule technologie à laisser des déchets indestructibles et toxiques pour longtemps. Les déchets nucléaires n’en sont qu’une petite partie, env. 0.5 kg par hab. et par an en Suisse, alors que les déchets spéciaux (toxicité chimique) totalisent 50 kg par hab. et par an, 100 fois plus. Il y a une autre différence : la durée de toxicité. Pour les déchets spéciaux elle n’est pas longue, mais illimitée. On ne peut donc pas appliquer la solution du dépôt géologique profond dont la sécurité est basée sur une décroissance plus rapide de la radiotoxicité que le temps de retour en surface. On pratique donc pour les déchets spéciaux le dépôt surveillé en surface. Joli thème de réflexion philosophique : on garantit comment la pérennité des institutions de surveillance sur l’éternité ? Encore une autre différence : on a généré des déchets spéciaux pratiquement depuis le début de l’ère industrielle. Pas toujours avec des méthodes fiables : quand ils ne sont pas bien gérés, on provoque des pollutions et des sites contaminés. Un inventaire fédéral donne une liste de 38’000 sites contaminés en Suisse. Trois exemples parmi les plus connus : la décharge de Bonfol, le mercure de la Lonza à Viège et la dioxine de plusieurs terrains en ville de Lausanne. Les déchets nucléaires sont provisoirement aussi stockés en surface, mais il n’y a pas de sites contaminés par de la radioactivité recensés en Suisse. Cela pour les déchets solides. Il y a aussi les déchets gazeux : 10’000 kg par hab. et par an pour le CO2 et env. 50 kg par hab. et par an pour l’ensemble des Nox, CO et HC. Tous des déchets de combustion des énergies fossiles. Les doses due à cette pollution chronique sont clairement plus élevées que les valeurs naturelles, mais surtout elles dépassent souvent, dans les grandes agglomérations principalement, les valeurs limites sanitaires fixées dans la loi. Du côté du nucléaire, pas de pollution gazeuse chronique : les valeurs mesurables restent en dessous des valeutrs naturelles, et bien sûr des valeurs limites sanitaires.

    “On trouvera sur https://clubenergie2051.ch/2015/02/13/dechets-nucleaires-est-il-vrai-quil-ny-a-pas-de-solution/ une description plus détaillée de la solution appliquée pour gérer les déchets nucléaires.

    “Il faut aussi rappeler cette déclaration récente du prof. EPFL Lyesse Laloui dans 24H du 6.11.2021: « Il n’y a pas de problème de sécurité qui justifierait de se passer du nucléaire », reproduite sur https://clubenergie2051.ch/2021/11/14/interview-du-prof-epfl-l-laloui-il-ny-a-pas-de-probleme-de-securite-qui-justifierait-de-se-passer-du-nucleaire/

    “Remarque : P.-A. Haldi évoque avec pertinence les perspectives de recycler et brûler certains déchets existants dans le combustible irradié avec des réacteurs de 4e génération. Il a raison, retraiter et recycler est bien le B A BA d’une saine gestion de tous déchets. Et pourtant, la fameuse Stratégie Énergétique 2050, ne se contente pas d’interdire de construire de nouveaux réacteurs, elle interdit aussi de retraiter le combustible usagé. C’est de l’aveuglement.”

  9. 1) La filière de surgénération avait été explorée en France par la construction du surgénérateur Phoenix qui a malheureusement été démantelé avant d’être exploité et ceci pour des raisons purement politiciennes (pour faire plaisir aux écologistes et récupérer leurs voix aux élections). C’est également ce qui s’est passé avec Fessenheim où les deux réacteurs fermés avaient subit des gros travaux de mise à niveau et avaient eu l’aval pour 20 années d’exploitation supplémentaires en toute sécurité.
    2) Il est dommage que la Suisse investisse de son côté et la France également à Bure pour une solution identique, une coopération aurait permis d’optimiser les investissements car les forages et tests à Bure on lieu depuis des années.
    3) On oublie souvent de mentionner le faible volume de déchets nucléaires à “traiter” en comparaison de l’énergie produite. Un réacteur de la taille d’une citerne de camion n’a qu’une quantité faible de combustible en volume, le reste ce sont les barres de contrôles, liquide caloporteur et gaines des barres. Le combustible produit l’énergie nominale pendant 12 années et on le remplace par tiers tous les 4 ans pour maintenir la puissance. En comparaison, une centrale de 900 MW type Fessenheim correspond à un train entier de 40 wagons de charbon à bruler chaque jour ! On imagine le volume de fumées, CO2 et autres polluants et cendres/scories à évacuer et stocker en comparaison du volume de combustible d’un réacteur nucléaire pendant 12 années de production avec le même combustible (abstraction faite de la rotation par tiers du combustible).

    1. Je réponds à vos trois points:
      Sur votre point 1, la critique politique des surgénérateurs d’EDF a certes eu une influence sur leur fermeture, mais il faut avoir l’honnêteté de reconnaître qu’ils n’ont jamais fonctionné à satisfaction. Des lacunes techniques ont mené à leur fermeture: notamment, Super-Phénix était beaucoup trop puissant vu le niveau d’expérience acquis jusque-là et sa production d’électricité s’est avérée très décevante.
      Sur votre point 2, votre suggestion est judicieuse.
      Sur votre point 3, qui compare les pollutions du charbon à celles du nucléaire, vous avez raison de dire que le charbon est infiniment polluant et les autres contributeurs ci-dessus ont raison de relever qu’il existe d’autres problèmes de pollution graves voire très graves, mais dont on s’occupe bien moins que le nucléaire. Ma question : votre constat vise-t-il à affaiblir les mesures de sécurité prises contenir une éventuelle pollution radioactive ? Ou l’avez-vous formulé pour appeler à relever les niveaux de sécurité insuffisants des autres activités non nucléaires que vous dénoncez comme très polluantes, afin d’éviter un nivellement par le bas ? Je ne comprends pas votre logique.

      1. Sauf erreur, Super-Phoenix n’a jamais eu le temps de fonctionner “normalement” avant d’être arrêté pour raison politique, aucun réel retour d’expérience n’a malheureusement pu être acquis pour améliorer cette filière qui fonctionnait avec les “déchets” des autres réacteurs.

        sur le point 3, mon propos n’est pas d’affaiblir les normes, mais simplement de remettre en perspective les volumes et quantités de “déchets” dont on parle et les remettre en rapport avec la quantité d’énergie produite.
        Bien sur, il faut sécuriser ces derniers, mais on les mets trop souvent en avant pour dénigrer la filière nucléaire sans jamais comparer leur très faible volume avec les autres filières.
        On traite les centrales à charbon comme émetteurs de CO2 uniquement, mais on oublie la montagne de “déchets” qui sort de ces centrales tous les jours.
        Stocker quelques m3 de déchets nucléaires vitrifiées dans des conteneurs en inox dans un endroit souterrain et de manière réversible est bien plus “propre” que de bruler quotidiennement des trains entiers de charbon comme le fait l’Allemagne. D’autant que l’on travaille à des solutions pour neutraliser ces déchets à période longue et que d’ici quelques décennies on peut imaginer les ressortir et les traiter.
        Mettre en avant les ordres de grandeur est important et c’est une dimension trop souvent éludée des discussions sur les sources d’énergies et leur réel impact.

        1. L’ordre de grandeur dont vous oubliez de parler, c’est le temps.
          La pollution des déchet nucléaires est à gérer sur des siècles. C’est un fardeau difficile à porter (sauf à se moquer des conséquences). Surtout quand on voit que les politiciens réfléchissent à un horizon de 3-5, au mieux 10 ans.
          Arrêter le nucléaire est un principe de précaution voulu par la population.
          Même en arrêtant de produire de tels déchets comme voulu par la population, ce sera déjà un programme très coûteux et ambitieux de bien nous en occuper.

          1. Arrêter le nucléaire, mais pour le remplacer par quoi ?
            – Le solaire: on oublie, sa production est nulle la nuit et forme une sinusoïde entre le lever et le coucher du soleil et qui ne correspond en rien à la demande. Faible voir nulle en hiver quand la demande est forte, forte en été quand la demande est plus faible.
            – L’éolien, production trop variable en fonction de la météo, rendement faible / puissance installée/très instable/nulle en l’absence de vent.
            Ces deux sources adorées par les écolos sont trop instable et doivent être backupées par des centrales pilotables à charbon ou gaz pour stabiliser le réseau électrique et éviter le blackout (ce qui a failli se passer plusieurs fois en Allemagne).
            L’hydraulique: production limitée et extension quasi impossible sauf à noyer de nouvelles vallées et source de conflits entre locaux/écolos. Potentiel nouveau trop limité et insuffisant. Ne peut pas remplace le nucléaire en terme de puissance installée.
            Géothermie: Ok, mais on a vu le résultat à Strasbourg où des forages ont été abandonnés car ils ont provoqué plusieurs plusieurs séismes importants.
            Biomasse: Mouai, provoque des émissions de CO2, donc pas assez propre.
            Charbon: Très polluant, remplace les centrales nucléaires allemandes actuellement, semble convenir aux écolos allemands.
            Gaz: polluant et dépendant de la Russie.
            Pétrole: polluant et dépendant des producteurs.
            Pour information: Suisse 0,1% du CO2 mondial, France 1% du CO2 Mondial, Chine+USA+Inde 75% du CO2 Mondial.
            La population ne veut pas du nucléaire, mais elle veut de l’électricité et on va imposer des voitures électriques à toute l’Europe dans les années qui viennent. 1 réacteur nucléaire ne peut charger que 5000 Voitures électriques type Tesla à la fois…
            A ce jour je ne voit que le nucléaire comme solution censée en attendant que la fusion arrive à un niveau industriel.
            Mais je suis très intéressé de lire vos propositions alternatives (autres que la décroissance…).

  10. Nous avons déjà débattu sur ce sujet.
    Vous êtes dans une impasse, car vous refusez de baisser la consommation énergétique générale. Et du coup, vous minimisez les risques du nucléaire.
    Or, l’avenir ne nous laissera pas le choix, quoi que vous en pensiez.
    D’autre part, vous ne prenez pas en compte que cette nécessité est imposée par l’épuisement des ressources et non pas par la lutte contre le CO2.
    Cette réalité n’épargnera pas le nucléaire – car il faut bcp de pétrole pour extraire le minerai et l’amener en Europe. Et le minerai sera toujours plus cher – sans parler des déchets, comme ce billet l’explique.
    Donc, selon moi, votre proposition politique est une inadaptation aux défis à venir.
    Si l’on doit se passer de pétrole, c’est d’abord à cause de l’épuisement du pétrole BON MARCHE. Pas pour des raisons morales.
    Quant au gaz, ce serait une énergie de transition assez rationnelle (biogaz + importations) et les Chinois ne s’en passeront pas durant les prochaine décennies. Mais nous n’en voulons pas pour des raisons géopolitiques (dépendance face à la Russie).
    Une fois le diagnostic posé, il faut se mettre à l’ouvrage et suivre le seul chemin réaliste:
    diminuer la consommation énergétique de la manière la plus intelligente possible, en ciblant en premier lieu le gaspillage.
    Avec l’hydro-électricité, la Suisse dispose du meilleur atout qui soit eu Europe – car les barrages permettent de stocker les excédents en période de surproduction et de turbiner en cas de besoin. C’est une richesse à très long terme, et cela pourrait se combiner assez bien avec du photovoltaïque.
    Mais bien évidemment, si l’on veut remplacer toutes les voitures thermique par des voitures électriques, on fonce dans le mur. La solution, c’est moins de gaspillage, et plus de simplicité dans le mode de vie.
    C’est possible. Ce ne sera pas un retour aux cavernes, mais un retour à la raison. Actuellement, il y a bcp trop de gaspillage dans nos modes de vie pour que cela soit durable avec des prix de l’énergie qui vont beaucoup augmenter.

    1. Votre commentaire est très intéressant, mais vous ne proposez rien si ce n’est que de ne plus consommer… Est-ce possible ?
      Ne plus consommer de pétrole et pas de voiture électrique, ok, mais on utilise quoi ? Le vélo uniquement ? L’industrie fonctionnera avec quoi ? Votre maison que l’on ne doit plus chauffer au fioul ni au bois (trop de particules fines), on ne peut la chauffer qu’avec une pompes à chaleur…électriques.
      Selon moi, il est utopique de tabler sur une baisse de la consommation électrique alors que l’on veut supprimer les énergies fossiles (toujours largement abondantes, cela fait 40 ans que l’on nous dit qu’elle vont s’épuiser dans 10 à 20 ans alors que l’on découvre toujours des réserves de plus en plus importantes). Son prix actuel n’est que le résultat de spéculations financière et de taxes des états.

      Vous oubliez que les pays en voie de développement (Chine, Inde, etc…) ne veulent plus rester à l’âge de la charrue à bœufs, mais veulent vivre comme vous et moi, avoir le même confort et voyager. On va leur interdire tout cela et leur demander de garder leur mode de vie actuel ? Bien sur que non.
      La Suisse, tout comme la France, s’ils passent à zéro émissions de CO2 ne changeront rien au climat, même pas 0,001° car il ne représentent même pas 1% pour la France et 0,1% pour la Suisse.

      Les barrages ne représentent rien en terme de production électrique à l’échelle européenne ou mondiale, certes, c’est 58% de la production pour la Suisse, et 12 % pour la France, mais l’Allemagne, les pays-Bas, la Grande-Bretagne ne figurent dans aucun tableau car ne disposant pas d’assez de relief pour exploiter cette énergie tout comme une majorité de pays dans le monde qui sont ” trop plats”.

      Aujourd’hui, il est impossible et impensable de construire de nouveaux barrages, on a vue la bronca écologiste à Sivens (France) qui a fait un mort pour un projet de petit barrage sur une rivière.

      Je suis toujours stupéfait du discours des écologistes qui veulent supprimer des sources d’énergie et n’ont rien d’autre à proposer que de réduire la consommation d’énergie. Le monde ne fonctionne pas comme cela sauf à se retrouver dans un régime type Corée du Nord ou tout est imposé par le pouvoir, y compris le mode de vie.

      Le nucléaire est une solution propre pour produire largement de l’énergie pour plusieurs siècles en attendant la mise au point de centrales basées sur la fusion nucléaire dont la source sera illimitée.
      Le volume des déchets est ridiculement faible pas rapport à l’énergie produite sur une longue durée. Le stockage n’est pas un gros problème dans la mesure où les déchets sont vitrifiée et mis dans des conteneurs inox en attendant de mettre au point une méthode de traitement permettant de les transmuter en composés non radioactifs. La science et l’industrie y parviendra.

      En revanche, je suis contre la décroissance qui conduira à la misère et des révoltes à travers le monde, car la décroissance sera payée par les moins bien lotis, les pays émergents.
      Au plaisir de vous lire.
      Cordialement

      1. “cela fait 40 ans que l’on nous dit qu’elle vont s’épuiser dans 10 à 20 ans alors que l’on découvre toujours des réserves de plus en plus importantes”
        Pourriez-vous prouver votre affirmation? Où sont vos nouvelles découvertes de pétrole?
        Si vous ne répondez pas à cette question, c’est inutile de poursuivre la discussion.
        Nous avons sans doute atteint le pic pétrolier global vers la fin 2019.
        La crise du Covid a permis de baisser d’un coup la consommation, en diminuant drastiquement le nombre des vols et l’utilisation des transports, ainsi qu’en arrêtant les usines pendant 1-2 mois.
        Malgré cela, les prix de l’énergie vont bcp augmenter ces prochains mois. Cela n’est pas lié à la spéculation, mais à un déficit des matières premières.
        Le problème n’est donc pas ce que l’on veut, mais ce que l’on peut faire.
        Nous devons nous adapter rapidement à une explosion potentielle du prix de l’énergie.
        Penser que l’on pourra augmenter la production d’électricité au point de remplacer le pétrole est une illusion complète. C’est impossible, vu les ordres de grandeur.
        En revanche, on peut limiter la casse en faisant un travail de fond sur le gaspillage, là où il y a le plus de marge de manoeuvre.
        C’est la voie qui évitera justement la guerre et la misère, car qui dit baisse dela consommation, dit baisse des transports internationaux et relocalisation des petits services et d’usines plus petites, ce qui donnera du travail à tout le monde au niveau local.
        Les choses seront plus chères et plus durables, mais on en achètera moins – pas de doute à ce niveau.
        Les pays qui souffiront le plus sont ceux qui importent massivement leur nourriture, car les prix de la nourriture vont bcp augmenter ces prochaines années.
        Je ne souhaite ni la guerre, ni de catastrophe, ni la misère, mais parfois, mieux vaut faire un effort commun que de ne rien faire.
        Et vu la taille de ces défis, il n’y a pas de temps à perdre, il faut se mettre au travail!

    2. En matière d’épuisement des ressources, il n’y pas trop à s’en faire pour ce qui est des combustibles nucléaires. A la différence des combustibles carbonés, l’uranium est une ressource abondante et bien répartie sur l’ensemble de la planète (il y en a beaucoup dans l’eau de mer par exemple, … et dans nos Alpes!). Et il y en en plus le thorium. Lorsqu’on parle de réserves d’uranium, on fait référence habituellement à celles CONNUES (et la prospection n’a pas été poussée très loin dans ce domaine, faute d’incitation par la demande, les réserves connues suffisant) exploitables à un coût de 130 US$/kg; il y en aurait pour une septantaine d’années à consommation actuelle. En doublant ce coût, ce qui n’a qu’une influence marginale sur le prix de l’électricité produite étant donné que la part du combustible (petite quantité) est faible dans ce prix, on fait plus que doubler ces réserves. Maintenant, si on utilise la plus grande partie de l’uranium, et pas seulement les 0,71% (!) comme on le fait aujourd’hui, c’est en millénaires que l’on peut estimer les réserves. Ce qui dépasse de loin celles de combustibles carbonés et laisse amplement le temps de développer par exemple la fusion qui pourrait prendre un jour la relève.

      1. Toujtours ces promesses de lendemains qui chantent…
        Il faut du pétrole disponible pour extraire votre uranium, oui ou non?
        Donc, plus le pétrole sera rare, moins vous arriverez à extraire cet uranium.
        Ensuite, en cas de déficit de ressources, c’est simple, les grandes puissances se serviront pour assurer leur approvisionement et les autres n’auront plus que les miettes.
        Les prix sont déjà en train d’augmenter fortement.
        https://www.allnews.ch/content/points-de-vue/uranium-le-mouvement-haussier-sacc%C3%A9l%C3%A8re
        Un petit pays comme la Suisse ne peut pas jouer ce jeu. Son intérêt est d’assurer son approvisionement en diminuant sa consommation énergétique (gaspillage/isolation) et en misant sur une combinaison photovoltaïque/hydroél., bois, biomasse/biogaz pour rester le plus autonome possible malgré la crise qui s’en vient.
        Mais de toute manière, ce sera compliqué.

  11. Le World Energy Resources Program de l’Institut d’études géologiques des États-Unis (USGS) produit les estimations officielles des ressources mondiales de pétrole pour le Gouvernement fédéral des États-Unis. Ce programme estime que les réserves mondiales restantes sont d’environ 1 000 gigabarils, et les estimations actuelles prévoient l’épuisement de ces réserves connues dans les 50 prochaines années. Les estimations des réserves encore inconnues varient largement, de 275 à 1 469 gigabarils (de 44 à 234 km3). Le Moyen-Orient possède 50 % des réserves mondiales restantes connues. L’USGS estime que les réserves totales représentent environ trois fois les quantités connues.

    D’après la compagnie britannique BP, la fin du pétrole ne serait donc pas pour demain. Selon elle, les réserves seraient suffisantes pour répondre deux fois à la demande actuelle, jusqu’en… 2050. … Si le prix du pétrole et la consommation mondiale se maintiennent au niveau actuel, il resterait 150 ans de réserves.5 févr. 2018

    Et je pourrai en citer plein d’autres….

    1. Ce sont des promesses. Vous n’avez rien fourni de concret.
      Voici un article de 2017, qui montre que les découvertes déclinent bcp:
      https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/sites/ifpen.fr/files/inline-images/NEWSROOM/Regards%20%C3%A9conomiques/Etudes%20%C3%A9conomiques/Panorama%202018/03-Panorama-2018_VF_NouvellesDecouvertesPetroleEtGaz.pdf
      Ce qui compte, c’est les découvertes exploitables et la production réelle pour répondre à la demande.
      Des réserves inexploitables ou inconnues, cela ne vaut rien, à part sur le papier.
      Le monde gagné 10 ans grâce au pétrole de schiste américain financé à taux 0, mais ce n’est qu’un feu de paille.
      Vous pouvez lire cet article (de 2019):
      https://www.lemonde.fr/blog/petrole/2019/02/04/pic-petrolier-probable-dici-a-2025-selon-lagence-internationale-de-lenergie/
      Tout cela est en train de se passer sous nos yeux.
      Pourquoi croyez-vous que les prix de l’énergie sont en train d’exploser partout dans le monde?
      Le monde a connu une augmentation continue de la production d’énergie. Cette croissance a achevé sa courbe.
      https://www.touteleurope.eu/economie-et-social/le-taux-d-inflation-en-europe/

      1. Pas la peine de continuer à argumenter, vous être aveuglé par le discours vert ambiant et ne comprenez pas que le prix du pétrole est purement spéculatif comme il le fut déjà en 2012 avec un baril à 112 $ et qu’il est ensuite retombé à 30 $ (bien avant la pandémie).
        Idem pour l’électricité avec sa règle stupide de fixation du prix global sur le coût de la dernière centrale mise en route (actuellement au gaz) alors que le vrai prix de revient est 4 à 5 fois moindre, mais interdit de le vendre à ce prix, il faut le payer au tarif du dernier groupe électrogène mis en route…
        Depuis plus de 50 ans les écologistes ne cessent de prédire la fin du monde (dans les années 70, disparition de toutes les forêts en 2000 à cause des pluies acides…. tiens elles se portent à merveille)… Le problème est que pour les écolos tout est punitif, interdiction, restrictions pour imposer un mode de vie unique austère et toute critique est également interdite. Au final, les réalités importent peu, seul compte la doctrine.
        Bonne journée

  12. Voilà, je viens de passer les deux derniers commentaires, nous reprendrons ce débat plus tard.

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