Le Pendolino

Oui aux dons d’organes, mais pas ainsi !

Dans deux jours, le peuple suisse votera sur un sujet très émotionnel et délicat. L’éthicien Steve Bobillier, de la conférence des évêques suisses, est favorable aux dons d’organes. C’est la manière de prélever les organes qui pose question. Ce scientifique recommande un non pour un oui !

Le consentement présumé n’augmente pas les dons

En l’état, un donneur doit explicitement signaler ce geste en faveur de la vie, notamment par une carte de donneur. Mais en Suisse, ces dons se font hélas un peu trop rare. Pour sortir de l’ornière, un nouveau système serait mise en place en cas de oui au référendum de ce dimanche, soit le consentement présumé. Ainsi, toute personne décédée serait donneur à moins de s’y être opposée de son vivant.

Selon Steve Bobillier, ce nouveau paradigme ne fait pas grimper le pourcentage des dons, des études mondiales le révèlent. La CES veut donc favoriser le don d’organe en augmentant le nombre de donneur libre et volontaire, mais pas avec le consentement présumé. Il y a des autres mesures pour arriver à cette augmentation. La situation est paradoxale, car pour augmenter les dons d’organes en Suisse, il faudrait voter non au consentement présumé.

Le CES, en étant résolument en faveur du don pour la vie, recommande de voter non ce dimanche.

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Steve Bobillier:
1. “Le taux de dons a augmenté dans certains pays qui ont introduit le consentement présumé, notamment en Belgique et en Espagne, parce que ces pays ont introduit de nombreuses autres mesures dont on sait qu’elles sont efficaces, comme par exemple la formation des soignants à la communication avec les proches. Le taux est resté inchangé dans d’autres pays, par exemple en Suède et à Singapour, et il a diminué au Brésil, au Danemark et dans les pays baltes. A l’inverse, certains pays comme l’Australie et les Etats-Unis ont vu le taux de dons augmenter avec l’introduction du modèle du consentement explicite.
Donc, il n’y a aucune preuve de l’augmentation du don avec le consentement présumé, mais seulement une corrélation. Par contre, il y a une conséquence directe entre la diminution du don et l’introduction du consentement présumé. Dans tous les cas tu as raison, un simple changement de loi reste inefficace car dans 60% des cas la famille ne sait pas et refuse par précaution. C’est pour cela que nous proposons un autre système de déclaration, mais pour l’introduire et il faut hélas refuser la prochaine votation…”
2. “pourquoi le consentement présumé n’est pas une mesure permettant effectivement d’améliorer la situation :
– tout d’abord, il n’est pas prouvé que ce régime permette d’augmenter le nombre de donneurs. Je ne vous parlerai pas seulement de la littérature scientifique; je ne vous parlerai pas seulement des expériences menées en Suisse qui montrent que ce n’est pas le cas. On pourrait rappeler à ce titre-là d’ailleurs qu’avant la loi sur la transplantation de 2007, 17 cantons suisses appliquaient le régime du consentement présumé, mais que le canton du Tessin, qui avait le taux de donneurs le plus élevé, appliquait l’autre modèle, celui du consentement au sens large.
– Le deuxième élément est le cas de l’Espagne. Le cas de l’Espagne est souvent cité.. Si nous observons le cas de ce pays, nous voyons que le modèle du consentement présumé a été introduit en 1979. A ce moment-là, l’Espagne avait un taux de donneurs relativement faible, environ 14 par million d’habitants. Et ce taux n’a pas changé avec le changement de système. Il n’a commencé à changer qu’à partir du moment où, environ dix ans plus tard, l’Espagne a mis en place un plan d’action. Nous avons là un exemple très concret qui montre ce qui marche et ce qui ne marche pas, si vous me permettez de le formuler ainsi. C’est la raison pour laquelle le Conseil fédéral, fort de cette expérience, fonde beaucoup plus d’attentes sur un plan d’action que sur un simple changement de régime.
On voit d’ailleurs dans le comparatif entre plusieurs pays que parmi ceux qui ont opté pour le consentement présumé, très peu appliquent ce régime dans la pratique. Dans la plupart des cas, les proches sont sollicités pour consentir au don d’organes. Si certains des pays qui ont opté pour le modèle de l’opposition ont un taux de donneurs très élevé, ce n’est de loin pas le cas de tous. A l’inverse, certains des pays appliquant le modèle du consentement comptent eux aussi de très nombreux donneurs. On peut citer par exemple les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.
– Le troisième élément que j’aimerais citer dans ce débat, c’est que la Commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine n’est pas favorable au consentement présumé, dans la mesure où ce système affecte les droits de la personnalité”
Source: Page Facebook 
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Arguments du comité référendaire

  • Selon le comité référendaire, le principe du consentement présumé viole le droit constitutionnel à l’autodétermination et à l’intégrité physique. Le comité critique le fait que les personnes ne souhaitant pas donner leurs organes doivent expressément faire usage de ce droit.
  • Il y aura toujours des gens ignorant qu’ils auraient dû exprimer leur opposition. On acceptera ainsi que des organes soient prélevés sur une personne alors qu’elle y était opposée.
  • Le modèle du consentement présumé soumet les proches à une pression supplémentaire, car il leur sera reproché de ne pas avoir fait preuve de solidarité en cas de refus de leur part.
  • Il faudrait informer toutes les personnes en Suisse de la nouvelle réglementation. Or, il est irréaliste de croire que tout le monde obtiendra et comprendra ces informations.
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