Réinventer la virilité ?
“My name is Bond, James Bond !” Cette célèbre tirade n’a plus raisonné chez les cinéphiles depuis longtemps. Le dernier titre de la célèbre saga est emblématique : « Mourir peut attendre ».
Daniel Craig, lui, va bel et bien disparaître, puisqu’il incarnera le « héros masculin » pour la dernière fois. James Bond va-t-il mourir ou sa disparition peut toujours attendre ?
Dans le magazine Femina, sous la plume de Géraldine Savary, James est décrit comme un prédateur de femmes :
« En 24 films, James Bond interagit avec 108 femmes, couche avec 61 d’entre elles. Il en agresse 32, en tue 25, en gifle quatre après l’amour. Une est étranglée, une autre violée, neuf sont matées sans leur consentement. A deux reprises, il arrache soutien-gorge et bikini. Avec un palmarès pareil, le gars est clairement infréquentable ».
Évidemment, le prêtre et l’homme que je suis ne souhaiterait jamais incarner un tel homme. Mme Savary a tout juste. Si ce prédateur de femmes meurt, je ne m’en plaindrai surtout pas ! La réalité dépasse la fiction. Le monde et Hollywood a, Dieu merci, balancé ses porcs. « Me too » est heureusement passé par là.
La commission française Ciase ( commission indépendante sur les abus sexuels en Eglise ), dit aussi le rapport Sauvé, a publié ce mardi 5 octobre les ravages commis par plus de 3000 prêtres contre des innocents durant 70 ans. Face à de tels “hommes”, des criminels et des bourreaux je n’ai plus de mot tellement je suis effaré et épouvanté (330 000 victimes). Un immense chantier de justice est ouvert pour les victimes.
My name is Jeannette ?
Sans transition, la question est posée : James Bond pourrait-il être une femme ? James deviendrait-il Jeannette ? Une autre interrogation peut-être associée : la virilité a-t-elle encore sa place dans notre univers ordinaire et quotidien formaté par notre société médiatique, cinématographique et littéraire ?
Personne ne souhaite être un porc ! Cependant être viril, un homme adulte, responsable, raisonnable et fort est-il encore possible de nos jours ? N’est-ce pas être patriarcal ? A mon avis, les féministes sont parfois des « machistes » en miroir. Certaines pensent que l’homme viril doit mourir sans attendre.
Derrière le débat de réinventer James Bond se superpose, comme la technique cinématographique du flou enchainé, le passage d’un homme prédateur à un homme viril. Le défi consiste à vivre les uns pour les autres, pour devenir des hommes et des femmes authentiques. Non pas pour entrer dans la guerre des sexes, mais pour assurer l’harmonie sociale, l’équilibre du marcher ensemble avec les deux manières d’être pleinement humain, homme et femme.
Ce clivage se retrouve au sein de l’Eglise catholique. Pourquoi Jésus est un homme ? Pourquoi les chrétiens prient Dieu en invoquant « Notre Père qui est aux cieux », « le Père tout puissant » ? Pourquoi, comme le redit le Pape François, l’ordination sacerdotale, la vocation de prêtre, est exclusivement réservée aux hommes ? Vastes questions. Jean-Paul Ier, Pape durant 33 jours, disait fort à propos: « Dieu est masculin et féminin ».
Faut-il pour autant que la virilité meurt ? A mon avis, l’homme ne peut pas mourir, mais se redécouvrir à chaque instant.
L’adage grec bien sage le souligne : nous ne pouvons pas toujours réinventer la roue. Le défi technique consiste à l’améliorer, L’homme doit toujours apprendre à être viril ( du latin « vir » homme ). Pour qu’il le devienne, une femme est toujours, sans être sa rivale ou sa proie, sa meilleure alliée donc son égale. James Bond peut se réinventer. Toutefois, la mort de l’homme peut vraiment attendre.
Bon film.
