Les paradigmes du temps

Plaidoyer pour l’histoire

Jean Duvet. L’Apocalypse figurée. 1555

Il semble curieux à certains de s’intéresser encore de nos jours à l’histoire alors que notre temps se mesure de plus en plus souvent sur le court terme, et se décline en enjeux, économiques ou idéologiques avant tout. La recherche historique, la quête d’une origine, quelle qu’elle soit, contraste ainsi avec notre monde ultra connecté dont les informations qui le parcourent se succèdent à un rythme effréné. Un monde ponctué d’événements qui parfois l’ébranlent et qui tout aussi rapidement disparaissent, recouverts par l’amnésie collective que génèrent nos modes de vie contemporains !

Pourtant, la place du passé, si elle a longtemps interrogé, s’avère maintenant fondamentale. Car le fugace, le transitoire, l’éphémère, le ponctuel ne cessent de fracturer nos identités jusqu’à la nauséeuse perte des référents qui nous permettent de nous situer dans la société qui est la nôtre.

Comment et pourquoi ? Des questions simples que tous les enfants du monde posent dès leur plus jeune âge. Des interrogations auxquelles il convient de répondre. Tous les parents le savent bien. Mais lorsque ces enfants devenus adultes n’ont du passé que la saveur de la galimafrée prise la veille, ignorant tout du sordide du régime de Vichy ou de l’hypocrisie post-coloniale et que leur esprit critique se borne à une conviction forgée dans des feux tisonnés par la rumeur, peut-être convient-il de se poser une autre question, celle de la faillite de nos systèmes de société actuels ?

Mais à l’évidence, tout le monde se fout de cet effondrement duquel émergent ceux qui hier encore se tenaient terrés : les fachos de la 25ème heure, les serviteurs du règlement et de l’ordonnance, les orants de l’omnipotence verte, les serfs de la sourate, de la Halakha et du verset, les éblouis du complot, les terrifiés du hidjab et du masque, les promoteurs d’une culture aseptisée sur les bûchers du politiquement correct, les opportunistes de la plus-value et du dividende, les moulés du cervelet mesurant leur semblable à l’aune d’une taxinomie politique évidemment rivale, les provocateurs de l’inutile.

Et lorsque là-bas, au bout du chemin, nous nous demanderons ce que serons devenues nos libertés révolues, il sera alors trop tard pour nous rappeler de ce que hier pouvait nous apprendre.

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