L’économie déchiffrée

Une étrange expérience sur le revenu de base

La commune zurichoise de Rheinau projette de tester le revenu de base inconditionnel (RBI) pendant une année. Le projet laisse perplexe car il fait abstraction du principal problème, à savoir son financement.

Le coût du RBI est le problème majeur

Le débat lors de la campagne de juin 2016 a souligné que le problème majeur avec le RBI était son coût. Il aurait en effet nécessité des taxes substantielles qui auraient fortement réduit les incitations à travailler.

Il est dès lors étonnant de voir que le projet de Rheinau fait abstraction de ce point. Plus précisément, le coût du RBI pour les 500-600 personnes que le projet espère recruter ne sera pas supporté par la commune. Or ce coût est substantiel : on parle de 3 à 5 millions, ce qui semble plutôt optimiste (si 500 personnes touchent 2’000 francs par mois le coût est de 12 millions). Ce montant devrait être couvert par d’autres sources, comme le financement participatif ou fondations (soit dit en passant, si les gens sont prêts à investir de tels montants dans la recherche économique, mes collègues et moi avons une longue liste de projets à proposer).

Les habitants de Rheinau recevraient donc un transfert massif du reste de la Suisse. C’est tout le bien que nous pouvons leur souhaiter. Le problème est que les leçons de l’expérience seront d’un intérêt au mieux très limité : le comportement des personnes touchant le RBI sera très différent selon que ce revenu soit un cadeau ou qu’elles doivent en supporter le coût. Or un RBI appliqué sur l’ensemble du pays de manière durable devrait être financé par les Suisses eux-mêmes. A moins que par un soudain élan de générosité les pays voisins ne décident de nous subventionner, on peut toujours rêver.

L’effet dépend de la durée du RBI

En plus du coût, la courte durée de l’expérience limite son intérêt. La réaction des personnes recevant un transfert est très différente selon qu’il soit limité ou durable. Si vous me dites qu’un généreux donateur va payer mon salaire pendant une année sans conditions, je vais continuer à travailler car dans un an la fête sera finie et il faudra que je subvienne de nouveau à mes besoins. Si en revanche ce donateur me paye à vie je réduirais fortement mon temps de travail.

Nous pouvons donc nous attendre à ce qu’un RBI limité dans le temps comme à Rheinau n’ait que peu d’effet sur les choix des gens concernés. Mais cela ne nous dira rien sur l’effet qu’aurait un RBI versé sur une longue période.

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