Au-delà des apparences

Ukraine: Une Europe absente ?

Si l’invasion de l’Ukraine par Poutine est un conflit européen au niveau de sa localisation géographique, sur le plan régional les rapports de force peuvent surprendre.

Une démographie réduite

La Russie compte actuellement quelques 145 million d’habitants. Si l’on compte les neuf pays de l’Europe occidentale on arrive à une population totale de 197 millions ; ce qui revient à dire que sur le plan démographique la Russie ne représente pas un danger pour l’Europe.

Une armé contenue

Sur le plan militaire on estime actuellement que la Russie dispose d’une force armée active de 850 000 hommes. Or si l’on additionne les forces armées de la France, de l’Allemagne et de la Pologne et du Royaume Uni  on arrive à quelques 700 000 hommes. La conclusion est que, les capacités Russes de mener une guerre offensive contre Europe sont pour le moins circonscrites. En fait, en s’en prenant à l’Ukraine, Poutine vise  Washington ; l’Europe n’est que le champ de bataille. Une Europe qui s’est révélée pour le moins impréparée pour faire face ce qui était une crise annoncée.

Une Europe absente

Ayant pratiquement délégué durant les années de  la Guerre Froide sa sécurité aux Etats Unis, l’Europe Occidentale se retrouva lors de la chute du mur de Berlin à la fois sans défense autonome et sans une vision propre de l’après-guerre froide. Or tout comme la chute de l’empire Ottoman ou de l’empire Austro-Hongrois la chute de l’Union Soviétique était une bombe à retardement dont la gestion aurait exigé l’équivalent d’un congrès de Vienne. Mais la mise en place d’un tel mécanisme aurait exigé, de la part des  deux grands acteurs européens, la France et l’Allemagne d’une vision à long terme et une volonté politique. Les deux firent défaut.

Washington aux commandes

Il en résultat que, en l’absence des européens, toute la problématique post URSS fut gérée par une succession d’administrations américaines en fonction de la relation Etats Unis /Moscou plutôt qu’en fonction d’une relation Europe /Russie avec Washington en arrière plan.

Il s’en est suivit que, côté occidental, la relation avec la Russie se focalisa sur un élargissement de l’OTAN plutôt que d’être la composante d’un rapport géostratégique issu d’une négociation sur le long-terme dont la France et l’Allemagne auraient fait partie. Or cet élargissement, côté Russe, aboutit à alimenter un nationalisme exacerbé pour ne pas dire une obsession sécuritaire qui fit dire à Poutine en 2021 « nous n’avons plus d’espace où reculer».

Mises en garde répétées

Du coté occidental, les mises en garde contre la gestion de cet élargissement  se multiplièrent. Ainsi Jack Matlock, Ancien ambassadeur américain en URSS la qualifia de «grave  erreur stratégique ». Pour Bill Burns, ancien directeur de la CIA c’était « une ligne rouge à ne pas dépasser. Une provocation envers les intérêts Russes. » Henry Kissinger écrivit que « L’Ukraine ne doit pas faire partie de l’OTAN. » Enfin Rodric Lyne Ancien Ambassadeur brittanique en Russie affirma que « si vous voulez une guerre avec la Russie, c’est la bonne façon de le faire.

Personne pour écouter

En fait les mises en garde étaient là mais il n’y avait personne pour écouter ; ou  pour se demander quelle serait la réaction d’un traumatisé de la chute de l’Union Soviétique.

 Le résultat aujourd’hui c’est une l’Europe sans défense autonome ou de diplomatie consolidée qui  se trouve débordée par un conflit  sur lequel elle n’as pratiquement pas de contrôle.

Un conflit larvé

En attendant, et dans l’hypothèse de plus en plus plausible que Poutine n’arrivera jamais à contrôler l’Ukraine on va vers un conflit larvé dont on ne voit pas la fin. Certes un tel scenario qui épuiserait Poutine est peut-être dans l’intérêt de Washington. Mais il n’est pas nécessairement dans l’intérêt de l’Europe. D’ou la nécessité pour les européens de trouver une voie de sortie au plus tôt. Une voie de sortie qui comprendrait la reconnaissance de l’annexion par la Crimée par Moscou, un accord sur le Donbass, une Ukraine neutre sur le modèle autrichien aux frontières garanties et enfin et surtout une nouvelle architecture sécuritaire européenne, conçue et négociée par l’Europe et dont Washington et Pékin seraient les spectateurs mais pas les acteurs.

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