L’homme qui valait -473 milliards

Donald Trump, qui se présente à l'élection présidentielle américaine comme un homme d'affaires qui a réussi, est parvenu à un exploit rare comme candidat d'un parti de droite. Il a détruit plus de valeur boursière que la très, très grande majorité de ses pairs.

Entre le 28 octobre au soir et le 4 novembre à la clôture, les bourses mondiales ont dévissé comme rarement au cours de l'actuelle campagne électorale, effrayées de la perspective d'une victoire de Donald Trump. Un calcul de coin de table (littéralement: back-to-the-envelope, et ce n'est pas qu'une image!) chiffre à 473 milliards de francs la valeur boursière anéantie aux Etats-Unis et en zone euro parmi les seules grandes sociétés constitutives des indices de référence que sont le SP 500 et l'Eurostoxx 50.

Le 28 octobre, le FBI annonce la réouverture de l'enquête sur les e-mails envoyés par Hillary Clinton via sa messagerie privée. Cette nouvelle fait dégingoler la candidate démocrate dans les sondages, si bien que sa victoire ne paraît plus assurée. Or, les marchés financiers ont basé leurs scénarios sur cette victoire. De plus, ils préfèrent l'ancienne secrétaire d'Etat et sénatrice au fantasque homme d'affaires, dont le programme (notamment en économie) est tout sauf clair. La seule perspective de son accession à la Maison-Blanche bouleverse leurs plans.

Une phase d'incertitude s'ouvre, que n'aiment pas les investisseurs. Ces derniers vendent. Lorsque le FBI annonce le 5 novembre qu'il n'a pas trouvé de motifs à incriminer Hillary Clinton, les perspectives de victoire de la sénatrice se redressent et les marchés aussi. Au cours des huit jours séparant ces deux annonces, le SP500 recule de 1,9% et l'Eurostoxx de 4%. Certes, d'autres éléments ont pu influer les marchés, qui avaient entamé une baisse avant même la première annonce du FBI. Mais ceux-ci ont les yeux rivés sur les urnes américaines.

A la mi-octobre, la capitalisation boursière du SP500 s'élevait à près de 19500 milliards de dollars. Et celle de l'Eurostoxx avoisinait 2510 milliards d'euros. Au terme de ces huit jours difficiles, celles-ci avaient fondu respectivement de 372 milliards de dollars et 100 milliards d'euros.

Ces calculs mériteraient bien sûr d'être affinés. Mais ils donnent un ordre de grandeur: le prix d'une l'arrivée à la Maison-Blanche de l'homme à la crinière.

Yves Genier

Journaliste économique depuis le milieu des années 1990, historien de formation, je suis particulièrement intéressé aux questions bancaires, financières, fiscales et, naturellement, macroéconomiques et leurs conséquences politiques et sociales.