A défaut de convaincre, certains élus ne manquent pas d’imagination pour imposer leur vision des choses, allant jusqu’à évoquer une pénalisation des opinions opposées. La dernière interpellation de l’élue verte Valentine Python, cosignée par son collègue Raphaël Mahaim, doit nous alarmer.
Il aura fallu lire la presse alémanique pour le découvrir : les deux conseillers nationaux vaudois demandent au Conseil fédéral si, à l’instar de l’appel à la haine et au racisme, « la diffusion de propos climatosceptiques » ne devrait pas « tomber sous le coup de la loi ». Le texte fait référence à l’article 261bis du Code pénal, punissant l’incitation à la haine d’une peine allant jusqu’à 3 ans de privation de liberté.
Déposée sous la forme inoffensive de la question, l’idée n’est-elle pas un simple pas en avant contre la désinformation ? Non, bien au contraire. Au moins trois éléments fondamentaux plaident contre une proposition aussi aberrante que dangereuse, dont la simple évocation au Parlement devrait nous alerter.
1) Le débat politique directement visé
Lors de la dernière extension de la norme pénale antiraciste, le Conseil fédéral affirmait clairement que le débat politique devait rester autorisé, tout comme l’expression d’opinions critiques. Juridiquement, le point central de la norme pénale est ainsi, selon ses partisans, de protéger la dignité humaine et d’interdire les discriminations tout en garantissant autant que possible les débats d’opinion.
Tout le contraire de l’idée soulevée par les élus écologistes, pour qui c’est directement l’expression d’opinions politiques qui est visée. Les questions adressées au Conseil fédéral sont extrêmement claires : « n’est-il pas problématique que des personnages publics et des partis politiques puissent diffuser leur climatoscepticisme sans aucune restriction ? »
Premier constat : désormais, il est ouvertement envisagé chez les Verts d’introduire une limitation des opinions légalement admises en dehors de toute lutte contre l’incitation à la haine, l’atteinte à la dignité humaine et la discrimination.
2) Des juges chargés de définir la vérité scientifique
L’idée est de pénaliser la « diffusion de propos climatosceptiques ». La question est alors de savoir ce qu’est le climatoscepticisme. C’est là que commencent les ennuis les plus sérieux : une définition claire de ce dernier n’existe pas à l’heure actuelle. Le Robert parle de « mise en doute des théories les plus répandues concernant le réchauffement climatique » alors que le Wiktionnaire évoque le « fait de douter du réchauffement climatique, de ses causes comme de ses conséquences ».
Alors qu’actuellement, les juges qui appliquent l’article 261bis font face à des notions juridiques (incitation à la haine, atteinte à la dignité humaine, discrimination), ils devraient, si l’idée de Mme Python aboutissait, définir ce qu’est la vérité scientifique en matière de climat et ce qui lui est contraire.
Deuxième constat : il existe des voix chez les Verts pour que les tribunaux prennent la place des scientifiques en matière de délimitation de ce qui est vrai ou pas. Dans l’hypothèse où un juge se tromperait dans son appréciation, il pourrait condamner des chercheurs dont les propos sont présumés climatosceptiques. Nous connaissons pourtant les conséquences funestes de la mise sous tutelle de la recherche scientifique.
3) Une distinction entre politiciens et scientifiques pas toujours claire
Dans leur interpellation, les conseillers nationaux font la différence entre les politiciens climatosceptiques d’une part et la communauté scientifique d’autre part. Cette posture est particulièrement perverse dès lors que Mme Python s’inclut dans ce qu’elle appelle communauté scientifique, statut qu’elle instrumentalise lors qu’il s’agit de poursuivre des objectifs politiques.
Prenons pour exemple un Tweet dans lequel la principale intéressée affirme ce qui suit : « le nucléaire n’est pas compatible avec le réchauffement du climat ! La température de l’eau est trop élevée en été pendant les canicules pour refroidir les réacteurs ». Cette désinformation crasse est un exemple typique d’utilisation du statut de scientifique par une militante afin de soutenir une action politique, en l’occurrence l’interdiction du nucléaire, prônée par son parti. Pourtant, le rôle du nucléaire en matière de politique climatique ne fait l’objet d’aucun consensus scientifique.
Troisième constat : il existe chez les Verts une frange qui estime être seule garante des mesures aptes à préserver le monde, même en dehors de tout consensus scientifique. S’opposer aux mesures qu’elle propose relève d’une opinion à censurer, quand bien même ces mesures seraient potentiellement contre-productives en matière de lutte pour le climat.
N’ouvrons pas la porte à tous les abus
En parlant sans gêne d’interdiction de certaines opinions, on ouvre la boîte de Pandore de la délimitation par le monde politique des idées acceptables ou pas. En effet, s’il existe aujourd’hui des élus prêts à censurer le libre débat au nom de l’urgence climatique, rien n’empêcherait d’autres majorités, demain, d’agir au nom d’autres urgences.
Verra-t-on un jour une majorité atlantiste interdire toute critique de l’OTAN pour faire face à la menace russe ou chinoise ou une coalition libérale interdire la critique des grandes banques pour éviter un effondrement boursier ? Toutes les dérives sont envisageables dès lors que l’on accepte de donner au monde politique le pouvoir fascisant d’interdire les opinions qu’il estime être potentiellement néfastes.
Les questions posées par Valentine Python et Raphaël Mahaim au Conseil fédéral font froid dans le dos, en ce qu’elles nous montrent que la censure n’est plus un tabou au Parlement fédéral. Le fait que ce grave dérapage n’ait pas été relevé par la presse en Suisse romande devrait aussi nous questionner – une démarche similaire venue de la droite politique aurait assurément provoqué haut-le-cœur et comparaisons avec les heures les plus sombres de notre histoire.
Reste à espérer que le corps électoral appréciera ces propositions à leur juste valeur et que nous continuions à vivre dans un pays libre qui n’instrumentalise pas la science pour affirmer des visions politiques. Ce n’est que lorsqu’on ne peut convaincre que l’on songe à interdire.
On ne les appellent pas “pastèques” pour rien; car c’est rouge à l’intérieur. Je pense que les élus verts mettent la photo du président Xi Jinping sous leurs oreillers pour les aider à s’inspirer en dormant !
Eh oui, les verts ne le sont pas, ce sont des rouges (comme les pastèques vertes en surface, mais bien rouges foncées à l’intérieur). On est en plein dans la doctrine qui prévalait en ex-URSS, RDA, où la censure de toute idée contestataire était la règle, voir le goulag pour rééduquer ceux qui pensaient “mal”. Absolument rien de différent, avec leur approche (3 ans de prison si climatosceptique).
On veut changer le mode de vie et réduire les libertés des gens sous couvert de sauver la planète, après les incitations et intimidations (voir les actions des groupuscules dans les musées, routes, villes….), on passe à la taxation, puis à l’interdiction pure et simple (voir le cas des moteurs thermiques en 2035) sans avoir d’alternative.
Dans le cas présent, on interdit même de penser différemment, 1984 de G.Orwell avait mis dans le mil. A cela n’oublie pas la doctrine woke où on réécrit les textes livres et on change les titres… Rien de différent avec 1984. Bref, les verts nous entrainent vers un régime type Corée du Nord ou Chine si on n’y prête garde, et tout cela sous la bonne excuse de sauver le monde…
Merci d’avoir relevé cela. Cette position des verts mériterai d’être plus largement mise en avant pour les montrer sous leur vrai jour dictatorial.
Alors, je suis d’avis que la désinformation devrait être condamnée, sur tous les sujets potentiellement dangereux, d’ailleurs (médecine, climat, etc). Le n’importe quoi prend de plus en plus de place et représente un grand danger pour la société. Mais il faut évidemment d’abord s’assurer que les institutions soient à la hauteur.
Et les verts devraient s’assurer d’être cohérents, car il semble qu’ils ne défendent la science que lorsque cela les arrange (on peut citer le nucléaire ou les médecines alternatives…)
Je peux tout à fait comprendre l’idée selon laquelle la désinformation doit être interdite. Toutefois, il demeure un certain nombre de problèmes: qui définit ce qui est de la désinformation grave devant être punie ? Un groupe d’experts, les juges ? La frontière entre l’admis et l’interdit, poreuse, sera largement influencée par la politique. Or, donner au pouvoir politique le droit de délimiter ce qui peut être dit ou non de manière abstraite me semble très dangereux. Les exemples que vous citez sont intéressants à ce titre: en fonction de l’opinion qu’aura la majorité sur le nucléaire, il pourrait être interdit de le promouvoir ou alors interdit de le critiquer, étant donné qu’il peut être une part essentielle de la solution contre les émissions de CO2.
Je n’ai aucune confiance en la capacité de l’Etat à user d’un tel pouvoir durablement sans abus. Malheureusement, l’histoire regorge d’exemple tragiques, quand bien même les intentions initiales auraient été louables.
Il est peut-être préférable d’en rester à un système dans lequel la limite des opinions d’autrui se trouve avant tout en rapport avec les atteintes personnelles: insulte, menace, mais aussi mauvais conseil médical, contrainte, abus de confiance etc.
On a déjà l’exemple récent du Covid ou la moindre critique de la politique gouvernementale te valait d’être traits de complotiste anti-vaccins et j’en passe.
Cher Yohan,
Voilà un article très important et fort bien dit. On glisse rapidement dans une société de censure sur plusieurs sujets, le plus souvent la gauche tente de s’octroyer le droit suprême de décider de tout ce qui est bon ou mauvais, licite ou pas, valeureux ou vil. C’est scandaleux et très inquiétant.
Pourquoi ceci ne fait pas l’objet d’un article à la une du Temps et ne se retrouve que dans ce blog ?
e Temps ferait-il sa propre sélection “politique” des choses à publier ou non dans les articles de son journal ? Ceci a tout de même de quoi émouvoir et justifier un article à la une ?
Comme de mauvais joueurs, quand ils échouent à imposer leurs idées par les voies légales, les Verts veulent changer à leur sauce les règles démocratiques. Espérons qu’ils échouent là aussi, même si, paradoxalement, ils trouveront en automne prochain des citoyens prêts à voter pour une restriction de leurs droits.
En tout état de cause, je ne devrais peut-être rien ajouter à l’article de Monsieur Yohan Ziehli, qui se suffit à lui-même, d’autant plus que mon commentaire semblera relever de l’anecdote aux yeux de certains. Il y a, à vrai dire, quelque chose de puéril et de maladroit dans le récit qui suit et qui éclaire le comportement ahurissant de Madame Valentine Python.
Il s’agit des tribulations de mon commentaire du blog LT “Le discours cynique, sirupeux et …” de la conseillère nationale, du 25 février dernier.
D’abord publié in extenso, en première position, sans doute par erreur, mon commentaire critique est retiré. Je le réexpédie avec un petit addendum, pensant à une erreur informatique. Il est à nouveau publié, après “modération”, en fin de liste, et amputé de ce qui fait sa substance, sans explications, et sans mon accord. Au lieu d’un commentaire que je veux combatif, il passe presque pour une approbation des thèses de l’auteure.
J’ai posé à Madame Python les questions suivantes: de quel droit faites-vous de la rétention de texte à votre guise? De quel droit caviardez-vous ce même texte? De quel droit ne respectez-vous pas la chronologie de publication? Sans réponse à ce jour.
NB: Je tiens à la disposition de quiconque tous les détails, y compris le texte de mes deux commentaires. Je n’entretiens aucune connivence d’aucune sorte avec Monsieur Yohan Ziehli.
1984 en marche… Avec eux, c’est la Pravda assurée.
Merci Monsieur pour le partage de votre commentaire qui ne relève pas du tout de l’anecdote selon moi. Au contraire, il éclaire parfaitement le sujet de ce blog.
Un grand merci pour cet exemple flagrant de ce qui nous préoccupe en ce moment. La modération non-indiquée d’un commentaire est à mon sens un comportement loin d’être anecdotique, en ce qu’il indique un état d’esprit et une certaine marge de manœuvre prise vis-à-vis des faits et des expressions d’autrui.
PS: les blogueurs sont tenus au respect d’une charte relativement stricte concernant la gestion des commentaires. Le respect des opinions divergentes est précisément un élément central de cette dernière. SI vous avez des captures d’écran de vos textes et qu’en effet ils n’enfreignaient pas les règles en vigueur, cela vaudrait un signalement…
Il faut rappeler ici encore une fois que le programme politique des pastèques se limitait à:
Tout interdire sauf les interdictions et les taxes.
Si en plus, maintenant, ils veulent nous éduquer comme Mao et quelques autres dictateurs, cela risque de mal finir, pour eux bien entendu.
Je suis sans crainte, le peuple suisse va largement sanctionner leurs outrances en octobre prochain.
Le problème c’est que toutes ces outrances sont faites sous couvert de préserver la Suisse du changement climatique et sauver le monde. Beaucoup se laissent berner par la peur que véhiculent ces discours apocalyptiques. Espérons qu’ils sauront se faire leur propre opinion, car avec une presse et des médias à gauche c’est de plus en plus difficile de ne pas tomber dans leur piège.
Espère, espérons . Il est vrai que leurs programmes sont toujours : taxés, interdictions . Jamais rien de constructif. Jamais rien de positif .
Quand on constate que à Lausanne et pour un million de francs de nos impôts, en une NUIT , la ville a été remplie de piste cyclables …
Et ce, à deux reprises. Sans consultations, sans votations .
Sans proposition pour fournir de l’électricité, ils veulent obliger chacun à avoir en voiture électrique dans moins de dix ans.
Ils espèrent interdire la ville à toutes les voitures : notre couple d’édiles oubliant ( n’ayant même pas conscience) que tous n’habitent pas à proximité de leur travail et que tous ne peuvent pas véhiculer le matériel de leur travail sur des vélos : trop privilégiés, ils ont complètement perdu contact avec la population et vivent dans une bulle verte à côté de la réalité de leurs administrés …
Monsieur Ziehli,
Vous dites à juste titre «Reste à espérer que le corps électoral appréciera ces propositions à leur juste valeur et que nous continuions à vivre dans un pays libre qui n’instrumentalise pas la science pour affirmer des visions politiques.» En effet, «Ce n’est que lorsqu’on ne peut convaincre que l’on songe à interdire.»
Le problème n’est-il pas plus grave ? Dans notre monde mondialiste révolutionnant tout ce qui, jusqu’ici, était considéré comme traditionnel, sacré et normal, l’idéologie a remplacé la politique, la collégialité de notre Conseil Fédéral s’est effacée devant l’individualisme de ses membres, le pouvoir exécutif contrôle le législatif qui, lui, s’arroge le pouvoir judiciaire désormais exercé de fait par la presse. N’est-il pas trop tard pour éviter le naufrage ? N’allons-nous pas vers un monde nouveau qu’une jeunesse de plus en plus nombreuse, avide de combler le vide spirituel que lui offre le monde actuel, apporte un espoir pour demain ?
Un grand merci pour votre retour.
Jusqu’aux deux questions finales, je partage très largement votre constat. Vous avez raisons d’ajouter l’individualisme du Conseil fédéral à la liste (cela a par ailleurs été mis en évidence par lepeuple.ch cette semaine).
Si je devais écrire une tribune sur les points que vous abordez, le terme d’abandon aurait une place centrale (abandons de prérogatives tout aussi fréquents qu’arrogation de ces dernières, notamment. Abandon de certains cadres qui ont fait notre force: neutralité, fédéralisme, collégialité, …).
Quant aux questions, je serai plus modéré. Non, il n’est pas trop tard. Trop tard, pour préserver une certaine image de carte postale de nos valeurs, oui. Mais pas trop tard pour accompagner l’évolution de la société dans le bon sens. Actuellement, nous sommes en mauvaise posture à cet égard, mais tout n’est pas perdu.
L’avantage qu’il y a lorsque le mal de la société est une forme de fuite en avant incontrôlée, c’est qu’elle n’est pas théorisée, réfléchie et ordrée par un mouvement clair. Les générations actuelles n’ont pas su remplacer les valeurs qu’elles ont abandonnées. Cela nous laisse une chance: une fois la période de déséquilibre que nous connaissons passée, peut-être aurons-nous su reconstruire quelque chose qui compense le vide en question de manière durable… cela dépend en tous cas de notre engagement actuel et c’est l’une de mes motivations à me battre, encore et toujours, pour mes convictions.
Mais, cher Monsieur, ne voyez-vous pas que vous-même vous faites partie de cette nouvelle jeunesse ? La fin d’un monde n‘est pas la fin du Monde. Le printemps de l’an nouveau ne fait-il pas suite à l’hiver mourant de l’an écoulé ? Moi, je suis un vieux papi et j’aime vos billets dans lesquelles je retrouve les valeurs de ma jeunesse !
Assurément, je fais partie de cette génération. Toutefois, comme une minorité de ses représentants, je n’ai pas abandonné les valeurs spirituelles qui étaient si fortes à l’époque et n’éprouve ainsi pas le besoin de combler un vide, pour reprendre votre analyse pertinente.
En effet, le monde évolue et permanence et la définition de son avenir appartient à sa population présente. Il convient de s’engager, par responsabilité envers les prochains.
Quoi qu’il en soit, je vous remercie pour la lecture régulière de mes publications et vous souhaite un excellent weekend.
La censure progresse; les blogs ferment !!!😠🤦♀️