Perception de la conduite autonome en ville : entre mythe et réalité !

Vous les avez peut-être déjà croisées à Sion en centre ville, à Schaffhouse sur les rives des chutes du Rhin ou encore à Genève, Fribourg, Zoug : les navettes autonomes fleurissent un peu partout en Suisse. Toutefois, il s’avère difficile pour les organisateurs de tels projets d’avoir une représentation claire des attentes ou des problèmes rencontrés par les passagers ou les passants. Joujoux pour geeks, véritables révolutions technologiques ou alors dangers publics ? Comment les gens perçoivent-ils ces “OVNIS” qui feront probablement bientôt partie intégrante de notre quotidien ?

La HES-SO Valais-Wallis a mené une étude sur la perception des habitants de Sion, Sierre et Monthey, en parallèle avec l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich qui s’est quant à elle penchée sur trois villes du canton de Schaffhouse. Ces deux enquêtes visent à comprendre l’évolution des perceptions des habitants quant à la facilité d’utilisation et à l’efficacité des navettes autonomes en termes d’alternative émergente aux transports publics sur le dernier kilomètre.

Entre fascination et méfiance

Qui n’a pas déjà entendu ou vociféré des critiques acerbes – ou au minimum empruntes d’un certain scepticisme – sur le mode Autopilot (pilotage automatique) des véhicules Tesla ? Mais est-ce bien là le sentiment général, ou uniquement la méfiance d’une poignée d’incrédules ?

Brisons une fois pour toute ce mythe : une large majorité des sondés se montrent intéressés, voire enthousiasmés, par ces nouvelles technologies et ils affichent un soutien marqué pour les projets sédunois et schaffhousois (en vert, sur les graphiques ci-dessous) :

Les habitants sondés estiment aussi que la mise en service de bus autonomes améliorerait le quotidien de gens qui n’ont pas accès à un véhicule privé, comme par exemple les personnes sans permis de conduire ou encore les personnes âgées.

Malgré leur intérêt évident et leur conscience des avantages de la mobilité autonome, les personnes interrogées ne voient toutefois pas nécessairement tout en rose ; les questions relatives à la sécurité mettent le doigt sur d’importantes – et légitimes – préoccupations. Qui serait responsable en cas d’accident ? Comment les navettes réagissent-elles lorsqu’elles sont confrontées à des cyclistes ou à des imprévus ? Voilà quelques exemples de situations dans lesquelles les véhicules autonomes devront encore faire leur preuve.

Enfin, la question du partage de données personnelles à des tiers est également épineuse. Seule une petite minorité accepterait timidement de mettre à disposition des informations sur leurs trajets, leur conduite et autres habitudes au volant. Pour les autres, c’est hors de question. Ce partage d’informations pourrait pourtant faciliter grandement l’efficacité des véhicules autonomes et augmenter aussi la sécurité. Il faudra donc trouver le bon équilibre entre respect de la sphère privée et partage utile de données, peut être en le limitant aux véhicules les plus proches par exemple ?

Des résultats encourageants

Malgré les craintes affichées sur certains aspects, il s’avère au final que les habitants de la ville dans laquelle circule la navette (en l’occurrence Sion) tendent à lui accorder plus de confiance. Côtoyer et utiliser la navette depuis bientôt 5 ans semblerait ainsi rassurer la population et participer à l’acceptation de ce nouveau mode de transport.

Les navettes qui circulaient à Sion depuis 2016 évoluent désormais à Uvrier, toujours sur routes ouvertes. Depuis cette semaine, elles proposent une innovation majeure : un service “à la demande” qui permet de sélectionner sa destination précise, à partir d’une borne tactile disponible à la gare CFF. L’occasion de tester la navette pour celles et ceux qui ne se sont pas encore prêté à l’expérience !

 

Je remercie Julien Reichenbach pour sa contribution à la rédaction de cet article 😉

Yann Bocchi

Yann Bocchi est Professeur en informatique de gestion au sein de la HES-SO Valais-Wallis. Expert dans le domaine de l’Internet des Objets (IoT) et de la mobilité, il en fait ses thématiques de recherche principales depuis plus de 15 ans au sein de l’Institut Informatique de gestion à Sierre où il conduit également une unité en Digital Experience. Il est également responsable du Pòle Digitalisation de la HES-SO Valais-Wallis depuis le 1er janvier 2021.

3 réponses à “Perception de la conduite autonome en ville : entre mythe et réalité !

  1. Le problème le plus important est la dépense énergétique folle de ces engins/ Ils nécessitent pour assurer une sécurité minimale et accomplir leur mission des capteurs en tous sens avec une puissance de calcul phénoménale. Pourquoi ne pas multiplier des petites voitures avec chauffeur (En les payant mieux qu’UBER !). Pourquoi ne pas organiser l’urbanisation en privilégiant la proximité des habitants et des commerces et services de première ligne !……

  2. Parler de “navettes autonomes” est ambigu: certes il n’y a pas de conducteur, mais l’itinéraire est planifié millimètre par millimètre. On est loin d’un véhicule autonome pouvant circuler dans un contexte inconnu de la même façon qu’une voiture classique conduite par un humain.
    Rédiger un algorithme permettant de distinguer instantanément le feu rouge (ou vert) concernant le véhicule dans un océan de néons et d’éclairages de toutes les couleurs (y compris les reflets quand il pleut !) me semble une gageure.

  3. Sujet intéressant pour la recherche sur les outils destinés à la mobilité intelligente (capteurs, IA, etc.). Toutefois jusqu’à preuve du contraire, je doute une utilisation de ces engins à vitesse réduite autrement que sur des pistes balisées et sécurisées. Les lois sur la circulation routière et les assurances RC des véhicules sont loin d’être adaptées. Il y a donc encore du boulot, mais tant mieux pour les chercheurs.

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