AG à huis clos

Assemblées générales 2020 : Covid-19 et changement climatique à l’ordre du jour

La saison 2020 des assemblées générales arrive gentiment à son terme. En Suisse comme ailleurs, elle aura été marquée par la pandémie de Covid-19 qui a poussé les entreprises à tenir leur réunion annuelle à huis clos. Ceci n’a pas empêché une pression importante des actionnaires, liée principalement aux questions de rémunération. Les scandales à répétition au Credit Suisse ont également fait souffler un vent de contestation inédit sur le président du conseil d’administration. Malgré les appels à limiter les dividendes, les sociétés suisses sont restées très généreuses avec leurs actionnaires : CHF 36 milliards ont ainsi été distribués par les sociétés du SMI, un chiffre similaire à celui de 2019. A l’étranger, les assemblées 2020 sont marquées par un activisme des actionnaires en matière de responsabilité climatique.

A circonstances extraordinaires, mesures extraordinaires. En Suisse, l’ordonnance 2 du conseil fédéral du 13 mars 2020 stipule que les organisateurs d’une assemblée générale (AG) peuvent imposer aux participants, autrement dit aux actionnaires, d’exercer leurs droits exclusivement par écrit ou sous forme électronique ou par l’intermédiaire d’un représentant indépendant.

Au vu de l’interdiction de réunion de plus de 5 personnes qui a simultanément été prononcée, l’ensemble des sociétés cotées du SMI, à l’exception de Novartis qui tenait son AG le 28 février, ont organisé des assemblées générales à huis clos.

Les actionnaires ont dès lors été privés d’une présence physique à un événement durant lequel ils ont, en temps normal, le droit d’intervenir et de poser des questions face à l’ensemble du conseil d’administration, de la direction et des autres actionnaires.

Face à cette impossibilité exceptionnelle de maintenir une assemblée générale physique cette année, des pratiques bien différentes ont toutefois émergé dans le monde :

  • Des assemblées se sont tenues à huis clos sans intervention d’actionnaire et avec des votes effectués à l’avance (parfois retransmise par vidéoconférence)
  • Des assemblées se sont tenues à huis clos mais avec la possibilité pour les actionnaires de poser des questions à l’avance sur un forum dédié avec des réponses données lors de l’AG retransmise en direct par vidéoconférence
  • Des assemblées virtuelles se sont tenues avec la possibilité pour les actionnaires d’intervenir en direct et de voter durant l’assemblée générale

Mauvaise pratique des sociétés suisses

Contrairement à de nombreux exemples à l’étranger, aucune entreprise cotée en Suisse n’a organisé une assemblée générale virtuelle durant laquelle les actionnaires pouvaient intervenir et poser leurs questions, tel que prévu pourtant par le Code des Obligations. La Suisse fait ainsi figure d’exception et se distingue par une certaine mauvaise pratique en la matière. Avec les technologies actuelles, il aurait été tout à fait possible, en Suisse également, d’organiser un tel échange entre les actionnaires et le Conseil d’administration.

Les mauvaises langues diront que certaines sociétés suisses ont ainsi évité un débat potentiellement houleux avec des actionnaires mécontents. L’AG 2020 de Credit Suisse, qui a été retransmise par vidéo mais sans intervention externe possible, a ainsi duré moins d’une heure contre plus de 4 heures en moyenne ces dernières années. Au vu des affaires de filatures qui ont entaché la réputation de la banque en 2019, il est probable que les actionnaires, s’ils avaient pu le faire, auraient posé de nombreuses questions et émis des critiques sur la gouvernance de la banque.

Les actionnaires semblent toutefois privilégier le maintien des assemblées générales physiques, comme le suggère un vote sur le sujet à l’AG de Standard Life Aberdeen le 12 mai 2020 : 37% des actionnaires se sont en effet opposés à un changement statutaire qui visait à autoriser l’organisation d’une assemblée générale virtuelle. Par la suite, l’entreprise s’est justifiée en expliquant que le but de ce changement statutaire n’était pas de supprimer l’assemblée générale physique mais de se donner plus de flexibilité (communication de la société sur la résolution 16).

Contestation stable en Suisse

L’absence d’AG physiques n’a pas eu de grand impact sur le taux de présence des actionnaires, attestant qu’une vaste majorité d’entre eux votent de toute manière déjà par correspondance.

La crise n’a pas non plus freiné une contestation grandissante parmi les actionnaires. A l’AG 2020 de Credit Suisse, 22.5% des votants se sont opposés à la réélection du président du Conseil d’administration, confirmant ainsi une perte de confiance sans précédent envers les instances dirigeantes de la banque. Ce taux est d’autant plus important que les principales agences de vote américaines, ISS et Glass Lewis, recommandaient de soutenir la réélection du président.

Les rémunérations des conseils d’administration et des directions générales restent les sujets les plus controversés. Les rapports de rémunérations au sein des sociétés du SMI ont été approuvés par 88.5% des actionnaires en moyenne, un taux légèrement supérieur à 2019. A noter à ce titre que la pression des actionnaires sur les rémunérations s’est traduite par une réduction de 5% des rémunérations moyennes des présidents des conseils des sociétés du SMI par rapport à 2018 et de 1.5% dans les rémunérations des CEO des plus grandes capitalisations boursières.

Par contre, et malgré les appels à réduire les dividendes, notamment dans les sociétés ayant recours au chômage partiel, les sociétés du SMI sont restées très généreuses avec leurs actionnaires qui n’ont finalement pas contesté cette rémunération. Des dividendes totaux de CHF 36.2 milliards a été proposé aux actionnaires de 18 des 20 sociétés du SMI (Richemont tiendra son AG en septembre et Alcon n’a proposé aucun dividende). C’est seulement CHF 300 millions de moins qu’en 2019.

En moyenne les actionnaires ont approuvé ces propositions à 98.7% contre 99.7% en 2019. Malgré la crise économique qui menace, les actionnaires ont à priori basé leurs votes sur les très bons résultats 2019 plutôt que sur les perspectives moroses en matière économique.

L’activisme environnemental ne faiblit pas au niveau international

Au niveau international, malgré l’absence d’assemblées générales physiques, les actionnaires se sont montrés particulièrement engagés en matière environnementale cette année. De nombreuses résolutions d’actionnaires visant l’industrie fossile ont déjà été déposées, notamment dans le cadre de l’initiative « Climate Action 100+ ». Si l’ensemble des résultats n’est pas encore disponible, les premiers signaux sont très positifs pour les investisseurs soucieux des problématiques environnementales.

En Australie, la résolution déposée lors de l’AG de Santos demandant à l’entreprise de fixer des objectifs de réduction compatibles aux accords de Paris a reçu 43% de soutien. Ce résultat est d’autant plus remarquable qu’un article du Financial Times a révélé que BlackRock avait voté contre cette proposition. Un refus très surprenant si l’on se souvient de la lettre écrite en début d’année par le chairman/CEO du géant de la gestion d’actifs américain dans laquelle il assurait que la durabilité serait désormais au cœur du processus d’investissement et que le changement climatique était en train de conduire à un « remodelage fondamental de la finance ».

Une autre résolution déposée par l’ONG « Follow This » lors de l’AG de Royal Dutch Shell le 19 mai 2020 a également obtenu un soutien notable avec près de 15% des voix. Elle demandait à Shell de fixer des objectifs de réduction de CO2 compatibles avec un scénario bien inférieur à un réchauffement à 2°, y compris dans le cadre de l’utilisation des produits de Shell. Cette demande légitime n’a pas été soutenue par le Conseil d’administration qui estimait avoir déjà pris assez de mesures dans ce sens. Pourtant, malgré la volonté du Conseil d’administration, les investissements de Shell en énergie renouvelable restent bien inférieurs à ce qui est nécessaire, c’est ce qui poussé certains investisseurs à soutenir la résolution de « Follow This ».

La fin du mois sera encore chargée dans ce domaine. Pour l’AG d’Exxon Mobil le 27 mai, des investisseurs se sont déjà prononcés publiquement en faveur de la résolution d’actionnaire demandant la séparation des fonctions de président et de CEO. Cette résolution avait été soutenue l’année dernière par plus de 40% des actionnaires. Elle a de nouveau été déposée cette année et a de bonnes chances d’être approuvée. Il est indispensable de prévoir cette séparation des fonctions dans l’industrie pétrolière au vu des risques massifs de perte de valeur en lien avec le changement climatique (stranded asset). Si le conseil d’administration décide d’adapter la stratégie de l’entreprise et d’abandonner certaines activités incompatibles avec les objectifs climatiques, des amortissements et des pertes de valeurs devront être constatés qui pourrait impacter les rémunérations de la direction générale. Une telle décision nécessite une indépendance du conseil d’administration qui n’est pas possible en cas de cumul des fonctions de chairman/CEO.

Le 27 mai également, les actionnaires de Chevron devront se prononcer sur 7 résolutions d’actionnaires dont 4 en lien avec la stratégie climatique du groupe pétrolier. Le 29 mai enfin, Total, une autre « major », est visée par une résolution d’actionnaires similaire à celle déposée chez Shell.

Les banques aussi visées

Les actionnaires responsables ont non seulement visé les industries fortement émettrices de gaz à effet de serre cette année mais également les banques qui les financent.

Lors de l’AG de Barclays le 7 mai 2020, les actionnaires ont dû se prononcer sur une résolution qui enjoignait la banque d’aligner sa politique de financement aux objectifs de l’accord de Paris. Elle demandait à la banque anglaise de fixer et de divulguer des objectifs visant à supprimer progressivement la fourniture de services financiers, y compris, mais sans s’y limiter, le financement de projets, le financement d’entreprises du secteur de l’énergie et aux entreprises de services publics d’électricité et de gaz qui n’ont pas aligné leurs modèles d’affaires à l’accord de Paris. Elle prévoyait également que la mise en œuvre de cette politique soit alignée sur les objectifs de Paris et que la banque rende compte des progrès réalisés sur une base annuelle, et ce dès 2021.

Il faut rappeler que Barclays a été fortement pointée du doigt ces dernières années comme étant l’un des principaux fournisseurs de capitaux à l’industrie fossile. La dernière étude « banking on climate change » la classe au 7ème rang mondial des contributeurs de capitaux avec des financements pour plus de USD 118 milliards en faveur de l’industrie des énergies fossiles depuis la signature de l’accord de Paris en 2015.

Sentant la pression des actionnaires monter, le conseil d’administration a fait sa propre proposition, moins contraignante, par laquelle Barclays s’engage à un objectif « net zero » de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, y compris pour les émissions indirectes notamment liées au financement d’entreprises (source d’émission du domaine 3 / scope3).

Malgré cette contreproposition du conseil d’administration, la résolution d’actionnaires a été maintenue car elle exigeait des actions rapides de la banque. Les actionnaires qui ont déposé la résolution recommendaient de voter pour les deux propositions. Finalement, la résolution d’actionnaire a été soutenue par 24% des actionnaires tandis que la proposition du conseil, moins contraignante, a reçu plus de 99% de soutien. Même si c’est la proposition moins contraignante du conseil qui a été approuvé, la pression des actionnaires va influencer de manière déterminante le comportement de Barclays dans ses activités de financement de l’industrie fossile. La banque devra dorénavant intégrer dans le cadre de l’apporbation des crédits la manière dont ses clients alignent leurs activités aux besoins de la transition énergétique. A noter au passage que BlackRock, 3e actionnaire de la banque, a là aussi voté contre la résolution d’actionnaires. Selon « ShareAction », l’ONG à l’origine de la résolution, le plus grand gérant d’actifs au monde pourrait avoir eu un conflit d’intérêt important du fait qu’il a également été sélectionné par Barclays afin de l’aider à mettre en place sa stratégie climatique…

Quoiqu’il en soit, ce succès de l’actionnariat actif et responsable pourrait donner des idées à d’autres actionnaire souhaitant faire pression sur d’autres banques moins proactives, notamment en Suisse.

Investir pour le climat malgré la crise économique : un choix pour les actionnaires

Cette fin de saison d’assemblées générales à huis clos s’annonce donc très intéressante. Les actionnaires et les investisseurs ont l’occasion d’exercer une pression importante sur les entreprises fortement émettrices de CO2. C’est le moment pour eux d’avoir le courage de leurs opinions et de soutenir ces démarches d’actionnaires responsables.

Ce soutien est d’autant plus important que les entreprises pourraient utiliser le prétexte de la crise économique actuelle pour limiter leurs investissements en faveur du climat. C’est dans ce contexte qu’il revient aux actionnaires de faire comprendre leurs priorités. Même si les assemblées générales se tiennent à huis clos, les actionnaires peuvent tout de même se faire entendre !

 

Multinationales responsables : des investisseurs se mobilisent en faveur d’un devoir de diligence obligatoire

Le jeudi 26 septembre 2019, le Conseil des Etats va décider s’il entre en matière sur un contre-projet à l’initiative pour des multinationales responsables et, dans l’affirmative, quelle version les sénateurs souhaitent adopter. Des investisseurs, tels que des banques, des gérants d’actifs et des fonds de pensions, suisses et étrangers, représentant ensemble plus de 800 milliards d’actifs sous gestion, ont envoyé une déclaration d’investisseurs aux membres du Conseil des Etats pour les enjoindre à soutenir le contre-projet.

L’initiative pour des multinationales responsables prévoit un mécanisme de responsabilité des entreprises en cas de violations des droits humains et de non-respect des normes internationales en matière d’environnement. L’initiative vise ainsi à éviter des violations fondamentales telles que le travail des enfants, la pollution de l’eau, le travail forcé ou encore le mépris des standards environnementaux.

En cas d’acceptation de l’initiative (ou du contre-projet), les multinationales ayant un siège en Suisse seraient responsables, en vertu du droit civil, des violations des droits humains ou des normes environnementales commises par les entreprises qu’elles contrôlent à l’étranger. Elles devraient dès lors assumer leur responsabilité civile pour les dommages commis à l’étranger, sauf si elles parviennent à prouver qu’elles ont pris toutes les mesures possibles pour empêcher un tel dommage.

Cette notion de devoir de diligence obligatoire – qui, en matière de droits humains, est basée sur les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme (“Ruggie framework”) et s’aligne sur les principes directeurs pour les entreprises multinationales de l’OCDE, -est clé pour les investisseurs soucieux d’intégrer de manière crédible des facteurs environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG) dans leurs décisions d’investissement. Des violations des droits humains ou des standards environnementaux peuvent avoir un impact financier majeur sur les investisseurs. Le devoir de diligence est ainsi devenu obligatoire dans plusieurs pays, que ce soit en France, en Australie, au Canada, en Grande Bretagne ou encore aux Etats-Unis. La Suisse ne ferait donc en rien cavalier seul.

Réelle chance de succès de l’initiative

Il est vrai toutefois que l’initiative va plus loin que la plupart des législations, notamment en étendant la responsabilité aux fournisseurs sur lesquels les entreprises ont un contrôle économique. La Suisse deviendrait donc un exemple au niveau international avec des règles claires et favorables aux respect des droits humains et des standards environnementaux partout dans le monde.

Les lobbies économiques estiment que l’initiative nuirait à la compétitivité de la place économique suisse et pourrait encombrer les tribunaux. Cet argument est toutefois difficile à accepter et à comprendre. En effet, cela revient à dire que notre compétitivité est basée sur un non-respect des droits humains et des standards environnementaux ! Bâtir la campagne de votation contre l’initiative sur cet argumentaire sera délicat pour les lobbies économiques. D’autant que malgré des moyens très disproportionnés à leur avantage, les chances de succès de l’initiative devant le peuple sont significatives.

C’est d’ailleurs cette tendance qui a conduit le Conseil national à accepter, en juin 2019, un contre-projet indirect à l’initiative. Celui-ci va beaucoup moins loin que l’initiative puisqu’il limite le nombre d’entreprises concernées ainsi que le champ d’application aux seules entreprises et à leurs filiales (alors que l’initiative s’appliquerait également aux fournisseurs sur lesquels l’entreprise exerce un contrôle économique).

Concessions du comité d’initiative

Le Comité d’initiative a fait d’importantes concessions en acceptant de retirer son initiative si le contre-projet devait être approuvé par le parlement ; cela afin que le devoir de diligence et la notion de responsabilité puissent entrer rapidement en vigueur. En effet, en cas de votation et d’acceptation de l’initiative par le peuple, le processus législatif de mise en œuvre du texte risquerait d’être très long.

Du côté du parlement, l’acceptation du contre-projet par le Conseil national a renvoyé le dossier à la commission juridique du Conseil des Etats qui l’a traité le 3 septembre dernier. Cette dernière ne pouvait pas reprendre tel quel le contre-projet du national étant donné que le Conseil des Etats l’avait refusé en avril 2019 (par 22 voix contre 20).

La commission juridique a donc revu la copie du Conseil national et introduit un mécanisme de conciliation devant Le Point de contact national (PCN) pour les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales. Cette conciliation répond à une crainte des lobbies économiques d’un risque de surcharge des tribunaux suisses par d’éventuelles plaintes infondées de la part de victimes de violation des droits humains. Cette nouvelle version du contre-projet a également été acceptée par le comité d’initiative.

Le vote du Conseil des Etats ce jeudi 26 septembre est donc crucial. En effet, un refus d’entrée en matière entraînera une votation populaire sur le sujet. Une telle décision de la part du Conseil des Etats serait également un signal très négatif.

Les investisseurs qui ont signé la déclaration précédemment citée ont envoyé un message très clair aux membres du Conseil des Etats: en tant qu’actionnaires des entreprises suisses concernées par l’initiative, ils attendent la mise en place d’un devoir de diligence obligatoire ainsi qu’une plus grande transparence de la part des entreprises quant aux moyens mis en œuvre pour éviter que des violations des droits humains et des standards environnementaux se déroulent au sein de leurs filiales et de leur chaîne d’approvisionnement.

Changement de paradigme depuis avril 2019

Depuis le refus du Conseil des Etats d’entrer en matière en avril 2019, plusieurs choses ont changé qui devraient influencer les sénateurs lors de leurs discussions du jeudi 26 septembre 2019. Premièrement, des soutiens importants (La Fédération des Églises protestantes de Suisse, un comité bourgeois en faveur de l’initiative) se sont prononcés en faveur de l’initiative, ce qui augmente ses chances d’être approuvée et donc pousse les milieux économiques à chercher un compromis. Deuxièmement, outre les investisseurs mentionnés ci-dessus, de nombreuses organisations faîtières se sont exprimées en faveur du contre-projet (Groupement des entreprises multinationales, CI Commerce de détail Suisse, STSA, CCIG, Centre Patronal, FER). Troisièmement, les sénateurs traiteront d’un contre-projet allégé prévoyant un mécanisme de conciliation, ce qui répond à la crainte principale de certains lobbies économiques. Quatrièmement, à l’approche des élections fédérales à venir et au vu de l’importance que prennent les questions du climat et de l’environnement, les sénateurs seront observés de près sur la manière dont ils abordent ces questions à l’approche des élections.

Ces tendances favorables à l’initiative ou à son contre-projet ont poussé la conseillère fédérale en charge du dossier, Madame Karin Keller Sutter, à tenter une manœuvre politique inédite en plein processus parlementaire. La conseillère fédérale, proche des milieux économiques, a en effet essayé de proposer un contre-projet alternatif qui se limiterait à demander plus de transparence de la part des sociétés. Ce nouveau projet aurait le soutien des milieux économiques car il supprimerait la notion de responsabilité et de devoir de diligence obligatoire. Il n’est par contre pas soutenu par le comité d’initiative. Dick Marty, Président du comité d’initiative, déclarait dans un récent interview qu’il n’avait jamais vu une telle intervention du Conseil fédéral durant les 16 années durant lesquelles il a siégé au Conseil des Etats.

Mardi 24 septembre, à deux jours des débats, le conseiller aux Etats, Ruedi Noser a déposé une motion d’ordre pour demander de repousser encore la discussion. Ainsi, ce débat aurait lieu après les élections du mois d’octobre. Les conseillers aux États proches des multinationales ne veulent apparemment pas se prononcer sur l’initiative avant les élections ! Le Comité d’initiative a lancé une lettre de protestation à l’intention du Conseil des Etats.

Ces différentes tentatives de dernières minutes montrent les vents favorables qui soufflent en faveur de l’initiative et qui devraient pousser les membres du Conseil des Etats à soutenir le contre-projet.