Des commodités peu commodes

 

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Un hôtel-restaurant a rouvert ses portes mercredi à Lucerne. L’annonce aurait pu passer inaperçue s’il n’y avait eu un simple détail qui a résolument titillé plusieurs médias : le restaurant comptera désormais des toilettes mixtes – et ce en violation du droit cantonal imposant cabinets et lavabos séparés.
La mesure a suscité de nombreuses discussions – et des avis très tranchés sur la possibilité de cohabiter dans les mêmes commodités. Mais une question, qui me parait pourtant évidente, semble avoir été oubliée : pourquoi donc faut-il une loi réglementant les toilettes ?

En effet, chacun semble tellement camper sur sa position qu’il en oublierait presque l’essentiel : pourquoi donc vouloir imposer sa vision aux autres par la loi ? La configuration des toilettes est-elle vraiment à ce point constitutive de notre modèle de société ? Permettez-moi d’en douter.

Démontrons-le d’abord par l’absurde. Outre des toilettes séparées, on peut également considérer essentiel la fourniture de papier à triple épaisseur pour le confort de nos séants. La loi est assurément lacunaire sur ce principe vital et il conviendrait donc de la corriger. En s’éloignant un peu des lieux d’aisance, on peut aussi réfléchir à nos assiettes. Ne faudrait-il pas réglementer leur couleurs, formes et dimensions de façon précise ? Quant à leur contenu, ne vivrions-nous pas dans un monde plus simple si le droit décrivait de façon exhaustive l’ensemble des menus et recettes possibles, que les restaurateurs seraient tenus de suivre scrupuleusement ? Nous aurions ainsi la garantie de consommer un produit parfaitement identique – et donc concurrentiel – d’un restaurant à l’autre. Décidément, tant de choses manquent dans nos lois !

Pousser ce raisonnement à son terme en démontre immédiatement le ridicule. En réalité, nul besoin d’une loi aussi précise : si un restaurant ne vous plait pas, il suffit de ne pas y retourner. Cela n’empêchera pas ceux qui s’y plaisent de s’y rendre, et tout le monde en sera satisfait.
Les toilettes n’échappent évidemment pas à cette logique : si la perspective de commodités unisexes vous horripile, d’autres restaurants se feront un plaisir de vous accueillir, et vice versa.

Ce sur quoi nous devrions tirer la chasse, c’est bien cette dérive législative qui consiste à vouloir réglementer dans le détail tant de choses qu’il serait bon de laisser au libre-choix de chacun. Le droit des toilettes en est un exemple, au milieu d’une jungle abondante de normes et de dispositions légales. Le carcan qu’elles nous imposent est indigne d’une société où l’on considère que l’être humain est libre de faire ses propres choix.

Vincent Arlettaz

Vincent Arlettaz a étudié à Lausanne et Saint-Gall, ainsi qu'à la Richard Ivey School of Business au Canada. Détenteur d'un Master en Finance HEC de Lausanne, il est aujourd'hui économiste, mais aussi délégué du PLR et membre fondateur du Cercle des Libertés.