Réforme de la LPP: un affront envers les femmes et les salarié-e-s

La réforme de la LPP conduit à une baisse des rentes à des coûts élevés. Ce n’est pas seulement un non-sens du point de vue de la politique sociale, c’est aussi une violation flagrante de la parole qui a été donnée par la majorité bourgeoise du Parlement. Voici le discours que j’ai tenu ce matin lors de la conférence de presse de lancement du référendum organisée par l’Union syndicale suisse. Je vous invite à signer le référendum sur le site de la campagne des syndicats.

Des promesses non tenues

Durant la campagne de votation sur AVS 21, les partis bourgeois avaient promis qu’après le relèvement de l’âge de la retraite des femmes, on allait enfin empoigner le problème des rentes trop basses, surtout celles des femmes. Pour mémoire : les rentes des femmes sont en moyenne inférieures d’un tiers à celles des hommes. Cela s’explique d’une part par la discrimination salariale, d’autre part par le désavantage systématique des femmes dans le 2e pilier. Or la droite bourgeoise n’a pas tenu ses belles promesses. Au lieu d’améliorer les rentes, c’est le contraire qui risque de se produire pour une majorité de femmes, et d’hommes également : la réforme de la LPP décidée par le Parlement mène à une baisse drastique des rentes. C’est un mauvais calcul, pas seulement pour les femmes, mais aussi pour tout le monde.

Une attaque contre le pouvoir d’achat

Ce qui nous attend, c’est un projet de démantèlement qui entraînera des détériorations importantes pour les assuré-e-s. D’une part, les déductions salariales augmenteront par endroits de plus de 7 points de pourcentage pour les personnes à faibles revenus. Dans un contexte d’inflation et d’augmentation du coût de la vie, cela affaiblirait encore le pouvoir d’achat des salarié-e-s. D’autre part, les rentes des caisses de pension seront réduites. Et ce alors que les nouvelles rentes dans le 2e pilier ont déjà baissé de plus de 10% depuis 2015.

Payer plus pour toucher moins

Bref : il faudra payer plus pour toucher moins de rente. Voilà ce que signifie cette réforme de la LPP pour la grande majorité des salarié-e-s. Elle sera particulièrement dévastatrice pour les femmes d’âge moyen touchant un salaire moyen, car le retard dans leurs revenus reste très important. La moitié des femmes gagnent moins de 4500 francs par mois. Et même celles dont le revenu brut à 100% est supérieur à cela ont souvent moins dans leur portemonnaie en termes réels, car les emplois à temps partiel sont très répandus : près de 60% des femmes travaillent ainsi. Environ un quart de million de femmes souffrent de sous-emploi. Beaucoup d’entre elles ont plus de 40 ans. Globalement, le taux de manque de travail – donc de personnes qui souhaiteraient travailler plus qu’elles n’en ont la possibilité – est avec 11,2% presque deux fois plus élevé chez les femmes que chez les hommes (6,5%). Des taux d’occupation trop bas impliquent toujours aussi des salaires plus bas et des rentes plus basses. Après le relèvement de l’âge de la retraite, voilà que ces personnes seraient touchées de plein fouet par la baisse du taux de conversion minimal et l’augmentation des déductions salariales.

Ce que signifie concrètement la réforme de la LPP

Voici quelques exemples qui montrent ce que cette réforme ratée signifie pour les salarié-e-s:
Prenons une coiffeuse qui a aujourd’hui 23 ans et gagne 40 000 francs par an (ce qui correspond à un revenu mensuel d’un peu plus de 3300 francs). Elle devrait payer chaque mois 157 francs de plus, soit 4,7% de son revenu. Où devrait-elle prendre cet argent, avec une inflation de 3%, une augmentation des primes d’assurance maladie de 6% pour cette seule année et l’explosion des frais de loyer et des charges annexes? Dans 42 ans, elle pourrait alors compter sur 335 francs de rente en plus par mois, et selon toute vraisemblance, elle serait ainsi bien loin d’avoir une rente suffisante pour vivre. Son revenu ne devrait donc pas augmenter à la retraite, car le supplément serait simplement à nouveau déduit des prestations complémentaires.
La situation serait encore moins bonne pour une vendeuse dans la fin de la quarantaine qui gagne 55 000 francs par an (près de 4600 francs par mois). Elle devrait payer chaque mois 147 francs de plus, soit 3,2% de son revenu. Pour obtenir quoi? La rente de sa caisse de pension, déjà faible, diminuerait par rapport à aujourd’hui.
Cela ne concerne pas seulement la vendeuse, mais aussi le cuisinier, l’infirmière, le menuisier, la peintre en bâtiment et le plâtrier. Les personnes à bas et moyens revenus, professionnel-le-s des branches les plus diverses, paieront plus cher avec cette réforme et recevront en fin de compte des rentes moins bonnes.
Qu’en est-il de l’ouvrière spécialisée de 50 ans disposant d’un revenu annuel confortable de 88 200 francs (7350 francs par mois) ? Elle devrait certes payer 40 francs de plus dans le 2e pilier, mais subirait tout de même une énorme baisse de rente de 270 francs par mois.

Cela sera sans nous !

Où est passée la promesse d’améliorer les rentes des femmes et des personnes à bas revenus ? Elle est oubliée, sacrifiée au profit des bénéfices des compagnies d’assurances. Disons-le clairement: la réforme de la LPP est une attaque frontale contre le niveau de vie des personnes qui, par leur travail, contribuent à faire fonctionner ce pays. Les partisans des baisses de rentes peuvent être certains que nous allons combattre ce projet dévastateur avec la plus grande fermeté.

 

 

26 000 francs de rente en moins ? Non à la réforme AVS 21 !

Avec plus de 50 000 participant-e-s à des manifestations et actions, la journée de grève des femmes du 14 juin de cette année a montré une fois de plus que les femmes sont mécontentes. Et cela à juste titre ! Elles perçoivent toujours un salaire inférieur de 20% à celui des hommes. Au niveau des rentes, l’écart est même d’un tiers, étant donné que les femmes sont systématiquement désavantagées dans le deuxième pilier. Qu’on leur demande maintenant à nouveau de payer unilatéralement avec AVS 21 est une injustice manifeste.

Une réduction de rente de 26 000 francs pour chaque femme et le chômage au lieu d’une retraite bien méritée : voilà ce que signifie concrètement la réforme AVS 21.

 

De quoi allons-nous vivre ?

Voici quelques chiffres que l’on ne peut s’empêcher de répéter encore et encore, tant ils mettent en évidence l’absurdité du démantèlement des rentes sur le dos des femmes :

■ Aujourd’hui encore, près d’un tiers des femmes ne perçoivent aucune rente du 2e pilier.
■ Pour autant qu’elles aient une caisse de pension, leur rente ne représente environ que la moitié de celle des hommes.
■ Dans les branches typiquement féminines, les rentes des caisses de pension se situent généralement entre 500 et 800 francs par mois.

 

26 000 francs de rente en moins

AVS 21 a un prix élevé pour les femmes : par rapport au revenu médian, AVS 21 représente une perte de revenu d’environ 26 000 francs (cotiser une année de plus, recevoir une année de rente en moins). Les couples mariés recevraient également moins de rente avec AVS 21, car la réduction des rentes des femmes se répercuterait aussi sur les rentes des couples, quand bien même ces rentes sont déjà plafonnées aujourd’hui.

 

AVS 21 rime avec pénibilité

Pour de nombreuses femmes, travailler dans les soins, la restauration, aux caisses des magasins et dans les centres logistiques représente un effort physique incroyable. Quand on a tous les jours mal au dos, aux bras et aux pieds, une année est un temps très long. C’est souvent dans ces métiers physiquement éprouvants, où beaucoup de femmes travaillent, que presque personne ne peut tenir jusqu’à la retraite. Lors d’une enquête menée par Unia auprès des soignant-e-s en 2019, plus de 70% ont déclaré souffrir de douleurs physiques à cause de leur travail, et près de la moitié ne s’imaginaient pas travailler dans cette profession jusqu’à la retraite. Et c’était encore avant la pandémie ! Un rapport du SECO de fin 2021 sur la situation des travailleuses et travailleurs âgé-e-s présente une image similaire. Le nombre de salarié-e-s entre 55 et 64 ans qui quittent complètement la vie active pour cause d’invalidité, de maladie ou d’absence de perspectives sur le marché du travail a globalement augmenté entre 2010 et 2020, pour les femmes de 10 000 personnes.

 

Poussées vers le chômage

Tout cela soulève un problème supplémentaire de la réforme AVS 21 : les femmes âgées seront poussées vers le chômage. Au lieu de pouvoir prendre une retraite bien méritée à 64 ans, elles devront continuer à travailler, dans un marché du travail qui est très dur pour les salarié-e-s âgés. Aucun groupe d’âge ne compte autant de chômeuses et de chômeurs que celui des 60-64 ans. Même dans les secteurs où les employeurs se plaignent de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, le nombre de femmes âgées au chômage a fortement augmenté. Connaissez-vous un employeur qui embauche une femme de 64 ans pour qu’elle travaille encore un an dans son entreprise à plein temps, et pas seulement à 20% ou 30% ou en tant qu’intérimaire ? Dans la réalité, ces femmes se retrouveront au chômage, peut-être même à l’aide sociale. C’est un manque de respect et un non-sens économique !

 

Nous l’avons souvent dit : les gens en Suisse ont besoin de rentes plus élevées, pas d’un âge de la retraite plus élevé.
Voilà pourquoi nous nous battons contre cette réforme dévastatrice et irrespectueuse.

Pour en savoir plus sur les réponses des syndicats sur les enjeux qui attendent nos retraites, je vous invite à visiter notre page consacrée à la prévoyance vieillesse.

 

Nous ne laisserons pas passer une augmentation de l’âge de la retraite des femmes !

A l’occasion du débat qui s’ouvre aujourd’hui au parlement sur la réforme AVS 21, l’Union syndicale suisse et Unia ont remis les 314’187 signatures de l’appel lancé contre l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes et pour de meilleures rentes de l’AVS. Cette importante vague de protestation envoie un message très clair au parlement : nous ne voulons pas de réforme de l’AVS qui se ferait sur le dos des femmes!

En Suisse, les femmes sont plus que jamais massivement désavantagées : elles travaillent dans des professions « typiquement » féminines comme la gastronomie et la vente, où les salaires sont particulièrement bas. Elles sont deux fois plus nombreuses que les hommes à devoir se débrouiller avec un bas salaire. Elles travaillent plus souvent à temps partiel, quand bien même elles aimeraient travailler plus. La discrimination salariale persiste dans toutes les classes de revenus ou augmente. Et le dernier point qui n’est pas des moindres, elles accomplissent la grande partie du travail non-rémunéré de care, de soins et de prise en charge des personnes dépendantes, sans reconnaissance salariale.

Oui, sans salaire. Et encore plus grave : l’engagement des femmes et leur travail n’est pas seulement mois bien rémunéré que celui des hommes durant leur vie professionnelle, mais durant toute leur existence. Car le fossé entre les genres existe aussi à l’âge de la retraite. En Suisse, les femmes perçoivent des rentes un tiers inférieures à celles des hommes ! La responsabilité va au deuxième et troisième pilier de la prévoyance vieillesse qui désavantagent grandement les femmes.

Et que veulent faire maintenant les politiciens des partis bourgeois ? Prévoient-ils de corriger cette intolérable injustice ? Sont-ils prêts à ce que toutes les femmes puissent jouir d’une retraite leur permettant de vivre ? Non. Bien au contraire. Maintenant, ils veulent encore imposer aux femmes une augmentation de l’âge de la retraite. Pour beaucoup de travailleuses âgées qui ne trouvent plus de travail ou qui sont obligées de prendre une retraite anticipée, cela signifie purement et simplement une réduction de leurs rentes qui sont déjà basses.

Il en est hors de question pour nous ! Quiconque a travaillé toute sa vie mérite une rente lui permettant de vivre. Les femmes aussi !

Le débat sur l’âge de la retraite passe à côté de la réalité sociale. Il faut au contraire combler l’écart dont souffrent les rentes des femmes. C’est pourquoi les syndicats ont lancé l’initiative AVS x13. L’AVS est solidaire et profite à tout le monde, en particulier aux personnes à faibles revenus et aux femmes.

Le parlement ferait bien de prendre au sérieux le mécontentement des femmes de ce pays, plutôt que de bricoler des réformes dont elles ne veulent pas. Dans sa forme actuelle, cette réforme de l’AVS est vouée à l’échec !

50 ans de l’initiative Schwarzenbach : nous avons retenu la leçon

Si les « Républicains » de James Schwarzenbach avaient gagné, en 1970, avec leur « initiative contre l’emprise étrangère », je ne serais pas là aujourd’hui. Mes parents sont venus d’Italie en Suisse pour y travailler. James Schwarzenbach voulait expulser du pays plus de 300 000 personnes et familles comme la mienne. Les autres salariés étrangers auraient vécu en marge de la société, sans les leurs, sans égalité des chances, sans avoir le droit de choisir leur emploi.

 

James Schwarzenbach a joué sans scrupule sur la peur du chômage et le besoin de reconnaissance de nombre de Suissesses et Suisses frustrés par une rémunération indécente. Mais au lieu de désigner les responsables, soit les capitalistes et leurs partis politiques, il a désigné les travailleurs saisonniers comme fautifs de cette situation. Faisant de boucs émissaires ceux-là même qui ont construit la Suisse, logés dans des baraquements froids et exigus en bordure des villes. Une forte proportion d’employé-e-s et même des syndicalistes l’ont cru et ont contribué aux 46% de oui dans les urnes.

 

Entre-temps, beaucoup de choses ont changé. Les syndicats ont lutté âprement pour obtenir l’abolition du statut de travailleur saisonnier et des baraquements indignes dans lesquels ils étaient logés. La libre circulation des personnes renforce les droits d’une partie des employé-e-s sans passeport suisse. Pour bon nombre d’entre eux, la Suisse est devenue leur patrie. Pour moi aussi.

 

Tempi passati ? Epoque révolue ? Malheureusement non ! Aujourd’hui encore, les entreprises recherchent avant tout des forces de travail bon marché et flexibles. Le dumping salarial, des conditions de travail précaires, les discriminations et le chômage en sont la conséquence. Et comme en ce temps, un parti xénophobe essaie d’en profiter. Aujourd’hui, c’est l’UDC qui joue ce rôle infâme. Son « initiative de résiliation » veut mettre fin à la libre circulation des personnes et donc à l’égalité des droits pour plus d’un million d’employé‑e‑s. L’UDC veut revenir à la politique discriminatoire des contingents. L’ancien président du parti, Toni Brunner lui-même, veut réintroduire le statut inhumain de saisonnier, la variante suisse de l’apartheid. C’est un « très bon système », dit-il.

 

Comme James Schwarzenbach, l’UDC dirige sa propagande contre « les étrangers ». Cependant, comme ses représentants ne cessent de le souligner, l’économie doit continuer de disposer à l’avenir des ressources en personnel dont elle a besoin. Ce n’est pas une immigration plus ou moins forte qui les intéresse. Ils veulent diviser les employé-e-s et affaiblir les syndicats. Ils veulent faire pression sur les salaires et supprimer les conventions collectives de travail. Des milliardaires comme les Blocher, autant le père que la fille, n’ont jamais accepté nos droits et mesures durement acquis pour la protection des salaires et des conditions de travail. Ils essaient maintenant de les supprimer à nouveau avec une campagne faisant des « étrangers » les boucs-émissaires. Ils veulent détourner l’attention des vrais problèmes : du dumping salarial, des mauvaises conditions de travail et de l’arbitraire des employeurs. Et de leur propre recherche de profit sans limite qui porte préjudice à tout le monde.

 

Nous, les syndicats, nous avons retenu la leçon. Elle s’appelle « solidarité ». Ce n’est qu’ensemble, avec les mêmes droits pour toutes et tous, indépendamment de notre origine, que nous sommes forts. Cette fois, nous ne nous laisserons pas diviser. Unia s’engage pour cela.

 

Baraques, xénophobie et exploitation: un aperçu des conditions de vie des saisonniers en Suisse.
Photos: Archives sociales suisses


Les saisonniers étaient logés à plusieurs dans les baraques

Coup d’oeil à l’intérieur d’une baraque

File d’attente pour la visite médicale obligatoire à Brig

Plus d’égalité entre les sexes grâce à une AVS renforcée

L’Union syndicale suisse lance aujourd’hui la campagne de signatures pour une 13e rente AVS. Elle bénéficiera particulièrement aux femmes toujours et encore victimes d’inégalités salariales qui se répercutent sur leurs retraites. Cette revendication sera centrale lors de la journée des droits des femmes du 8 mars prochain.

L’AVS est la plus importante institution de sécurité sociale de Suisse. C’est un rempart contre la pauvreté dans la vieillesse et un puissant levier d’équilibre social. Elle est également une importante institution pour promouvoir l’égalité entre les sexes. L’initiative populaire pour une 13e rente AVS est donc aussi une nécessité dans une perspective de genre. Pourquoi l’AVS est-elle un élément d’égalité entre les sexes ? Il y a des raisons systémiques et mathématiques à cela :

 

  • La première raison est que l’AVS favorise en général les petits revenus par rapport aux gros salaires. Bien que ces derniers paient des cotisations AVS sur l’ensemble du salaire, ils reçoivent au maximum le double de la rente AVS minimale, qui est de 1185 francs. Cet effet de redistribution en faveur des bas salaires profite tout particulièrement aux femmes, car elles travaillent souvent dans ce que l’on appelle les branches à bas salaires, et sont en plus massivement discriminées sur le plan salarial. L’AVS atténue au moins les conséquences de cette discrimination à l’âge de la retraite.

 

  • Deuxièmement, les femmes ont aussi des bas salaires parce qu’elles accomplissent encore la plus grande partie des tâches non rémunérées au sein de la famille. De fait, leur carrière professionnelle est marquée par des interruptions d’activité, du travail à temps partiel et des possibilités d’avancement limitées. L’AVS ne peut certes pas corriger ce désavantage des femmes dans le monde du travail, mais elle reconnaît le travail de prise en charge des enfants et des proches pour ce qu’il est : un travail socialement utile qui donne droit à une rente. L’AVS est donc non seulement beaucoup plus sociale et plus juste que les normes salariales en vigueur sur le marché du travail, mais elle est aussi nettement plus moderne et moins discriminatoire. C’est pourquoi les rentes AVS des femmes sont presque aussi élevées que celles des hommes.

 

  • Troisièmement, on ne peut malheureusement pas en dire autant du deuxième pilier. Au contraire : en raison de la déduction de coordination, les bas salaires y sont systématiquement désavantagés. Les employeurs ne sont pas tenus de cotiser pour eux dans la prévoyance professionnelle. Cela a des conséquences pour les personnes à bas revenus et pour les employé-e-s à temps partiel, donc surtout pour les femmes : les rentes des caisses de pension qui leur sont versées sont en moyenne moitié moins élevées que celles des hommes. Et pire encore, un tiers des femmes ne perçoivent pas de rente du deuxième pilier.

 

Si nous examinons les branches dans lesquelles travaillent beaucoup de femmes, la situation est préoccupante. Quelques exemples tirés de branches où Unia est actif montrent que des « mini-rentes » y sont versées. La rente de vieillesse moyenne de la caisse de pension « Coiffure & Esthétique » de la branche de la coiffure et de la cosmétique n’est que d’environ 800francs. Les caisses de pension « GastroSocial » et « Fondation LPP de SVGroup » qui comptent parmi les institutions de prévoyance les plus importantes de l’hôtellerie-restauration ne versent en moyenne qu’environ 600, respectivement 500 francs de rente de vieillesse par mois. Cela ne correspond même pas à un quart de la moyenne suisse.

 

Un pas important vers une prévoyance vieillesse assurant le minimum vital pour toutes et tous

De telles rentes ne suffisent pas pour vivre. Cela est contraire au mandat constitutionnel garantissant le droit à une bonne rente à toutes celles et ceux qui ont travaillé toute leur vie. À elle seule, une 13e rente AVS ne suffirait pas à remédier à cette situation. Vu comme cela, l’initiative est trop modeste, ou trop « pragmatique ». Mais son acceptation serait d’une part un pas important en direction d’une vraie prévoyance vieillesse permettant de couvrir les besoins vitaux pour toutes et tous, et elle profiterait d’autre part à toutes celles et ceux qui sont pénalisés à l’âge de la retraite, à savoir les employé-e-s dans les branches à bas salaires, et en particulier les femmes. Je suis convaincue que l’heure est venue de faire ce pas vers plus de sécurité sociale et d’égalité entre les sexes.

Si ces arguments vous convainquent, alors signez et faites signer l’initiative pour une 13e rente AVS !

Merci d’avance !

 

Economie de plateforme : les autorités doivent appliquer les lois

A l’occasion d’une conférence de presse, nous avons présenté aujourd’hui les problèmes posés par les entreprises de plateformes qui contournent les lois suisses et les réponses juridiques à y apporter. Ces sociétés déclarent que les personnes travaillant pour elles sont indépendantes alors qu’au regard de notre législation elles devraient être considérées comme dépendantes. Cela fait une grande différence s’agissant de leur couverture sociale et des conséquences quand elles sont victimes d’un accident de travail.

Uber : des centaines de millions spoliés
L’exemple le plus criant de violation de la loi par une entreprise de plateforme se trouve chez le service de transport Uber dont le modèle d’affaires est entièrement basé sur l’indépendance fictive et le travail au noir. Selon nos calculs qui se basent sur des chiffres concrets, les montants spoliés aux conductrices et conducteurs oscillent entre 63 et 99 millions de francs par an. Depuis 2013, date de son apparition sur le marché suisse, Uber a détourné de son personnel un montant avoisinant le demi-milliard de francs. Et ce n’est pas tout : les assurances sociales enregistrent également un manque à gagner important. Elles perdent chaque année près de 20 millions de francs de cotisations de l’employeur et de l’employé-e. Pour les six années d’activité d’Uber en Suisse, ce montant s’élève à clairement plus de 100 millions de francs.

Les autorités doivent agir
Vu les montants en jeu, les autorités ne peuvent pas rester inactives plus longtemps et attendre que les salarié-e-s revendiquent individuellement leurs droits devant les tribunaux. Les autorités cantonales et fédérales doivent assumer leurs responsabilités et faire appliquer la loi. Différentes autorités ont la possibilité, mais aussi le devoir d’agir :

  • Les offices cantonaux du travail peuvent déterminer si une entreprise est soumise à la Loi sur le travail (art. 41 al. 3 LTr) ;
  • Les organes de contrôle cantonaux doivent vérifier l’existence du travail au noir au sens du droit des assurances sociales (art. 6 LTN) ;
  • Les caisses de compensation AVS sont tenues de contrôler l’enregistrement de toutes les personnes tenues de payer des cotisations (art. 63, al. 2 LAVS) ;
  • Le SECO doit coordonner les efforts des cantons, afin qu’ils appliquent la loi et la protection des salarié-e-s (art. 42 al. 1-4 LTr) ;
  • L’Office fédéral des assurances sociales doit prescrire aux caisses cantonales de compensation des contrôles des entreprises de plateforme soumises à l’obligation de cotiser, pour vérifier le respect des dispositions légales par ces entreprises (art. 129 al. 2 RAVS).

Non aux solutions politiques « créatives »
La Suisse dispose de l’arsenal juridique adéquat pour régler la situation. Il n’y a pas besoin de solutions politiques « créatives » additionnelles. Aussi bien la proposition du PLR pour l’instauration d’un « troisième statut » à côté de celui de salarié-e et d’indépendant-e, que l’initiative parlementaire du conseiller national PVL Jürg Grossen préconisant de tenir compte des « accords entre les parties » pour la classification par les assurances sociales, entraîneraient une insécurité juridique extrême et permettraient aux employeurs de se soustraire plus facilement à leurs responsabilités.

Etude éclairante du professeur Pärli
J’invite les personnes souhaitant approfondir les questions juridiques liées à l’économie de plateforme à prendre connaissance de l’étude du professeur Kurt Pärli de l’Université de Bâle. Il livre des informations sur la soumission au droit du travail et des assurances sociales. Intitulée « Arbeits- und sozialversicherungsrechtliche Fragen der Sharing Economy » (Questions du droit du travail et des assurances sociales dans l’économie de partage, éd. Schulthess), il y expose de manière détaillée les raisons pour lesquelles les employé‑e‑s de plateforme doivent en règle générale être considérés comme non-indépendants, respectivement comme salarié-e-s.

Un enjeu syndical et de société majeur
Une généralisation des rapports de travail de plateforme qui consistent à imposer le statut de faux-indépendant à des personnes en réalité salariées, entraînerait une pression accrue sur l’ensemble des salaires et des assurances sociales. L’enjeu aujourd’hui est de faire appliquer la loi chez des entreprises qui ne s’en soucient pas. Unia lutte pour que les lois qui protègent les employé-e-s soient respectées. Nous ne tolérerons pas que les plateformes de dumping détruisent notre économie, nos institutions sociales, nos salaires et notre travail. Le temps presse, il est temps d’agir !

Après la grève, les salaires…

Tant de femmes ont donné un signal incroyablement fort le 14 juin dernier en faveur de l’application de leurs droits ! La grève des femmes* a montré que le temps est venu d’avancer rapidement sur la voie de l’égalité. Cette mobilisation aux proportions historiques donne à toutes les forces progressistes l’énergie de continuer à lutter pour des changements profonds dans le monde du travail et dans la société. Les syndicats continueront à travailler de manière décisive sur les trois axes du respect, du temps et de l’argent.

Avant comme après la grève, l’égalité salariale est une priorité. Nous devons veiller à ce que toutes les entreprises la respectent. La révision de la loi sur l’égalité doit donc être mise en œuvre rapidement au parlement. Mais cela ne suffira pas. C’est pourquoi nous exigeons également des sanctions efficaces contre les entreprises qui enfreignent les lois et la Constitution. Nous voulons utiliser les prochaines négociations salariales à l’automne pour promouvoir les salaires des femmes. Les professions dites féminines doivent être revalorisées, les salaires des femmes doivent être sensiblement augmentés. 53% des femmes en Suisse gagnent aujourd’hui moins de 4 000 francs par mois. 70% gagnent moins de 5 000 francs. C’est par là que nous devons commencer !

Plus pour les femmes
Ces dernières années, les salaires réels ont stagné, et dans le commerce de détail, un des secteurs les plus important du secteur privé à forte présence féminine, l’évolution des salaires a été encore plus faible que dans les autres secteurs. Dans le même temps, la productivité du travail n’a cessé d’augmenter, de sorte que les vendeuses sont de plus en plus sous pression. Nous exigerons donc une augmentation substantielle des salaires pour tous, et encore plus pour les femmes. Nous allons également agir sur le terrain, dans les entreprises, pour mettre l’accent sur cette demande. Il faut aussi améliorer les possibilités pour les femmes d’évoluer professionnellement, donc faire progresser la conciliation entre travail et vie privée. Des investissements dans les crèches, les écoles en horaire continu et les soins à domicile permettront de les soulager.

Lutter contre le harcèlement sexuel au travail
On l’a senti le 14 juin dernier : la colère des femmes est grande. Le refus de leur dévalorisation constante aussi. Avec beaucoup de confiance en elles et de créativité, elles ont protesté contre le sexisme omniprésent. Dans toutes les négociations à venir sur les CCT, nous, les syndicats, nous devons nous concentrer sur la lutte contre le fléau du harcèlement, et revendiquer des mesures préventives efficaces. Par exemple, chaque entreprise doit élaborer et mettre en place une réglementation contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Les employeurs doivent maintenant montrer, dans ce domaine comme dans d’autres, qu’ils ont entendu le cri d’alarme lancé par les femmes et les hommes solidaires lors de la grève.

 

Pour les femmes!

Unia est présent dans les entreprises et aux premières loges pour constater l’ampleur des discriminations et des inégalités dont sont victimes les femmes. Dans ce texte, je reviens sur les témoignages très concrets de plusieurs d’entre-elles. Les choses doivent maintenant changer : ensemble, soyons nombreuses à participer à la grève des femmes* du 14 juin!

Une femme d’une quarantaine d’années, décoratrice, membre active d’Unia depuis des années, me racontait récemment l’histoire suivante : « Peu de temps après avoir terminé mon apprentissage, j’ai dû réduire mon engagement professionnel suite à la naissance de mes enfants, que j’ai élevés seule après mon divorce. Je ne pouvais pas travailler à plein temps, à cause des enfants. Mais il était impossible de vivre d’un emploi à temps partiel comme décoratrice, je n’arrivais pas à joindre les deux bouts. Pour moi, cela signifiait la nécessité d’avoir deux emplois. Le matin, parfois même avant l’ouverture des magasins, je travaillais comme décoratrice et je préparais les vitrines des succursales. Pendant la journée, je prenais soin des enfants, j’organisais notre quotidien et je gérais tout ce qui était nécessaire. Et le soir, je devais souvent ressortir pour mon deuxième emploi dans la gastronomie. Je terminais parfois à 3 heures du matin. »

Cette brève description résume bien ce qui ne va pas pour les femmes en Suisse aujourd’hui. Les salaires dans les professions dites féminines sont structurellement trop bas, les heures de travail difficiles à planifier, les taux d’occupation trop faibles, la pénibilité très élevée.

Les discriminations sont de trois ordres :

Salaires trop bas

À propos des salaires des femmes, il y a une réalité simple, mais qui illustre très bien le problème de fond : plus la proportion de femmes est élevée dans un secteur, plus le salaire est bas. En Suisse, environ 53% des femmes ont un salaire net de moins de 4000 francs par mois, et environ 70% touchent moins de 5000 francs. Les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes dans la catégorie des bas salaires (17% contre 7,6%), et ce rapport défavorable persiste depuis des années. C’est cette discrimination structurelle des femmes qui est à l’origine de bon nombre des problèmes actuels.

Sur le plan individuel, la situation est tout aussi déplorable pour les femmes. Même avec une bonne formation, le même niveau de qualification et le même travail que les hommes, dans des professions tant masculines que féminines, les femmes gagnent tout de même moins que leurs collègues masculins. Je pourrais vous montrer des centaines d’études ou des milliers de statistiques, mais je me limiterai à un chiffre : pour une femme professionnellement active en Suisse, cette discrimination salariale se traduit par un manque à gagner de 660 francs par mois en moyenne. Non pas parce qu’elle serait moins bien formée, moins expérimentée ou hiérarchiquement moins bien placée qu’un homme. Non : ces 660 francs de moins s’expliquent par le simple fait qu’elle est une femme. Ce n’est pas moi, en tant que femme, qui le dis. C’est l’enquête suisse sur la structure des salaires, que la Confédération réalise tous les deux ans. Les conséquences de cette discrimination salariale sont énormes : ce sont 10 milliards de francs que les femmes perdent chaque année. 10 milliards de moins pour le même travail et la même performance. Un scandale qui se répercute tout au long de la vie : par rapport aux hommes, les femmes à la retraite touchent actuellement une rente vieillesse réduite de plus d’un tiers.

Taux d’occupation trop bas

En Suisse, le sous-emploi touche les femmes de manière totalement disproportionnée. Les femmes sont nettement plus nombreuses à vouloir travailler davantage : au lieu d’un mini-emploi sur appel, elles souhaitent peut-être un temps partiel correct ou même un poste à plein temps. Elles recherchent un revenu stable qui leur permette de vivre, un débouché professionnel, ou simplement la satisfaction au travail. Or ceci leur est refusé, souvent par leur hiérarchie masculine. Il ne s’agit pas d’un phénomène marginal : selon les statistiques officielles suisses, 262 000 femmes étaient en sous-emploi en 2018. C’est le chiffre le plus élevé depuis 2004. Et il est frappant que dans tous les secteurs sauf la construction de machines, la part des femmes travaillant à temps partiel est nettement supérieure à celle des hommes.

Pas assez de respect

Le « piège du temps partiel », c’est-à-dire le temps partiel subi, s’accompagne d’un manque de reconnaissance et de respect envers le travail des femmes. Car malgré tous les progrès, la responsabilité de prendre soin des enfants incombe généralement aux femmes. Dans notre travail syndical, les situations des femmes que nous rencontrons confirment tous les jours la triste réalité derrière les chiffres.

Une jeune femme nous a récemment donné une description impressionnante des discriminations plus ou moins évidentes qu’elle subit en tant que cuisinière qualifiée. Il lui arrive régulièrement que les fournisseurs ne la prennent pas au sérieux, que sa compétence soit mise en doute, ou qu’un homme soit sollicité pour confirmer ce qu’elle dit. « Je ne guette pas les discriminations, dit-elle. Mais à un moment donné, on ne peut plus faire semblant de ne rien remarquer. Chaque fois qu’il y a un nouveau fournisseur, je dois lui faire comprendre que je suis au même niveau hiérarchique que mes collègues hommes. Chaque fois que je travaille avec un nouveau traiteur, je suis obligée de lui expliquer que c’est moi la responsable du jour, et que le collègue cuisinier n’a rien à dire à propos du buffet. Cela m’énerve bien plus que si on doutait de mes capacités de cuisinière. »

Appel à la grève des femmes* !

La grève du 14 juin est donc une nécessité, une urgence même ! L’histoire de cette collègue est emblématique pour des milliers de femmes. Les faits, les statistiques et les études sont là pour le prouver. Je cite encore une fois la jeune cuisinière, qui conclut son message ainsi : « Je fais grève le 14 juin pour toutes les femmes qui vivent la même chose que moi au travail. Elles font exactement le même travail que leurs collègues masculins, mais leur compétence et leur expertise sont mises en doute et dépréciées, consciemment ou inconsciemment. Et surtout pour les femmes dont les collègues masculins ne sont pas solidaires, et ne disent pas : “C’est elle la patronne, ce n’est pas moi qui décide” ou “Demandez à ma collègue, c’est elle qui sait”. Pour les femmes que personne ne défend dans ce genre de situations. »

Un constat que je soutiens pleinement ! Le 14 juin et au-delà, avec toutes les femmes de Suisse, nous lutterons pour obtenir du respect, du temps, de l’argent ! Pour les situations au travail que je viens d’évoquer, cette lutte se concrétise par les revendications suivantes :

  • Dans tous les secteurs, nous exigeons des salaires et des taux d’occupation qui permettent de gagner décemment sa vie.
  • Nous demandons des horaires de travail clairs et planifiables, qui permettent de concilier la vie familiale ou privée et la vie professionnelle. Nous rejetons le travail sur appel et la disponibilité permanente.
  • Et nous revendiquons le respect envers les femmes et leur travail.

Rendez-vous le 14 juin !

1er mai : nous voulons plus qu’un bon travail pour tous !

Aujourd’hui, je m’exprime à Winterthur et Altdorf lors de rassemblements du 1er mai. Voici un résumé des idées que je vais aborder dans ces prises de paroles.

Nous travaillons pour vivre. Cela a toujours été le cas et cela déjà bien avant l’apparition des marchés, voire du capitalisme. Si la fin du travail, avec le fantasme d’une économie entièrement robotisée, est une question récurrente, la réalité est tout autre : le travail va certainement changer, mais il ne disparaîtra pas. Dès lors, la question d’avoir un « bon travail » restera décisive dans les temps à venir. La plupart des gens souhaitent pouvoir exercer une activité qui leur permette de mener une vie digne et de subvenir aux besoins de leurs proches. Mais il est loin d’en aller toujours ainsi, même en Suisse. Quelques exemples concerts :

  • Cette semaine, la presse a rapporté l’énorme scandale du chantier des transversales alpines au Monte Ceneri, avec un énorme cas de dumping salarial qui concerne des dizaines de travailleurs exploités. Ils ont dû rembourser une partie de leur salaire et étaient soumis à des journées de 16 à 17 heures de travail. Ils n’ont pas touché la moitié du salaire minimum obligatoire. Les entreprises en cause ont mis en place des stratagèmes pour contourner les contrôles.
  • Chez ABB, la direction surpayée ne cesse pas de prendre des mauvaises décisions. Au bas de l’échelle, ce sont des centaines de salarié-e-s qui doivent ainsi craindre pour leur emploi. La production est transférée de Genève en Pologne, la division réseau électrique est vendue à Hitachi et les actionnaires réalisent 8 milliards de bénéfices.
  • Ce n’est pas mieux dans les entreprises publiques : ces dernières années, le nombre d’intérimaires a triplé au sein des CFF. Certaines personnes attendent un poste permanent depuis 16 ans et plus. Le personnel qui s’occupe du nettoyage des toilettes voit supprimée un certes petit mais important complément de salaire. Pendant ce temps, le CEO des CFF Andreas Meyer reçoit son salaire de millionnaire.

Au lieu de se diriger vers un plus grand équilibre social, nous assistons à un accroissement constant des revenus et des richesses pour une fraction de privilégié-e-s. Les discriminations sont permanentes – voire s’accroissent – à l’égard des femmes, des migrant-e-s et des minorités. Mais cela ne s’arrête pas là. Les négationnistes climatiques tels que Donald Trump ou Roger Köppel mettent les conditions d’existence des générations futures en danger. C’est aussi criminel qu’irresponsable. La question climatique devrait concerner aussi bien l’économie que la politique. Mais là aussi, les réponses ne sont clairement pas à la hauteur.

Les atteintes aux droits des salarié-e-s viennent de la droite. Avec le projet d’accord-cadre avec l’Union européenne, les libéraux s’attaquent à la pierre angulaire de la protection des salaires en Suisse. De leur côté, les nationalistes veulent la fin de la libre circulation et des mesures d’accompagnement.

Nous nous y opposons sur la base de valeurs fortes : la solidarité, l’égalité sociale, la justice, la liberté et la non-discrimination. La libre circulation des personnes et la protection salariale sont inextricablement liées. Les droits des salarié-e-s sont prioritaires.

Ces nombreuses luttes concrètes sont nécessaires. Les petites étapes et les améliorations ponctuelles sont importantes. Mais il faut faire davantage. Des changements fondamentaux et radicaux sont nécessaires. Les syndicats défendent pragmatiquement les salarié-e-s par le biais des conventions collectives de travail, et en repoussant les attaques portées aux retraites, à la sécurité sociale et à la loi sur le travail. Les salaires minimums garantissent des conditions d’existence dignes et une meilleure répartition des fruits du travail. Mais les syndicats doivent aussi être visionnaires. Notre revendication d’un “bon travail pour toutes et tous” ne doit pas se limiter à des salaires et des conditions de travail décents. Nous exigeons que le travail soit organisé dans l’intérêt général. Nous exigeons que ses fruits soient équitablement répartis. Il s’agit d’équilibre social, d’égalité des droits, de démocratie et de préservation de nos ressources naturelles.

Depuis des mois, des dizaines de milliers de personnes, principalement des jeunes, descendent dans la rue pour une politique climatique efficace. Elles demandent un changement de politique face à l’urgence climatique. Il s’agit de notre avenir commun. En septembre dernier, 20’000 femmes et hommes solidaires ont manifesté à Berne en faveur de l’égalité salariale et contre la discrimination. Face au déni de la classe politique, elles ont décidé de lancer une grève des femmes le 14 juin.

Ces larges mobilisations sont emblématiques d’une prise de conscience au niveau national et international. Ensemble, participons à ces mouvements sociaux et exigeons les changements qui s’imposent d’urgence !

Accord cadre : il faut protéger les salaires en Suisse

Ce début d’année sera marqué par la consultation à propos de l’accord-cadre avec l’Union européenne. Je serai claire: ce texte négocié entre le Conseil fédéral et une délégation de l’Union européenne est inacceptable. Non seulement il sacrifie les instruments indispensables à d’étroits contrôles, soit le dépôt obligatoire de cautions, les annonces préalables ainsi que les contrôles auprès des indépendants. Mais tout le système des CCT étendues, qui a fait ses preuves dans le cadre de notre partenariat social, est remis en question. Au cas où la Suisse devait reprendre les directives européennes et où nos mesures d’accompagnement étaient soumises à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, le volet d’application de nos CCT serait compromis. En effet, la directive d’exécution de l’UE est loin d’être suffisante, faute de permettre aux organes de contrôle paritaires de sanctionner les infractions découvertes.
Le système suisse d’exécution des conventions collectives par les partenaires sociaux est unique en Europe. Il n’est certainement pas parfait. Mais il est peu bureaucratique, très flexible et fonctionne plutôt bien. Notre engagement résolu en faveur de la protection des salaires n’est pas dirigé contre l’Europe. Bien au contraire, nous luttons partout, avec nos homologues syndicaux des autres pays, pour le renforcement des droits de tous les salarié-e-s, indépendamment de leur pays d’origine. Un coup d’œil au-delà des frontières le montre: quand le désordre s’installe sur le marché du travail, ce sont avant tout les nationalistes et les xénophobes qui en profitent. Il nous incombe en tant que syndicats de veiller, en renforçant les mesures d’accompagnement et les droits des travailleurs en général, à ce que les salaires et les conditions de travail helvétiques restent garantis à l’avenir. Il est hors de question d’affaiblir les mesures d’accompagnement.
Dans ce contexte, l’accord proposé par le conseiller fédéral Ignazio Cassis est voué à l’échec. Unia et l’USS le rejettent et il ne fait de loin pas l’unanimité dans le camp des employeurs. Pour ne pas ouvrir une voie royale à l’UDC avec son initiative dite de « limitation » qui vise à abolir la libre circulation des personnes, le Conseil fédéral serait bien avisé de se consacrer aux bonnes priorités.