La cabane à sucre, ou l’art de la conservation des traditions

La température qui repasse en degrés positifs, la neige qui entame son timide repli, les oiseaux migrateurs qui reviennent, pas de doute, un vent de printemps souffle en terres canadiennes. Cette période de l’année correspond également à un événement très important : la récolte du sirop d’érable, qui s’accompagne d’une grande fête des sucres, se prolongeant du mois de mars au mois d’avril, au rythme des gouttes d’eau d’érable s’échappant des précieux feuillus. Si l’on connaît bien le sirop d’érable en tant que produit en bouteille, disponible dans toutes les grandes surfaces, le chemin parcouru de la sortie de l’érable jusqu’à notre table, en passant par la valeur culturelle de ce précieux sirop, reste encore relativement méconnus du grand public. Alors que cache l’érable au-delà de sa place d’icône du drapeau canadien ? Quelle importance tient le sirop d’érable dans la culture canadienne d’aujourd’hui ?

De l’érable à la bouteille

Il faut savoir que le sirop d’érable est le fruit d’une importante transformation. D’abord récolté des érables sous forme d’eau, dont le goût sucré est presque indétectable, le sirop est ensuite obtenu par un procédé d’ébullition qui permet de séparer le sucre de l’eau pure. Il faut ainsi 40 litres d’eau pour créer 1 litre de sirop d’érable. Bien des exploitations tiennent aujourd’hui à conserver la tradition de la récolte à l’aide de seaux fixés aux arbres et non de câbles reliant les arbres directement à la cuve centrale. La tradition prime ainsi sur la productivité dans plusieurs de ces cabanes, luttant contre une récolte certes plus efficace mais bien moins ancestrale.

Une tradition qui perdure

Industrie sans pareil au Canada, le commerce de l’érable a parfaitement intégré le milieu touristique de ses multiples dérivés à l’érable : le beurre d’érable ou le popcorn à l’érable valent largement le détour, soyez-en assuré. Mais l’érable va au-delà de la simple production de sucre, tout un art de vivre y est associé : la production étant fortement reliée au climat particulier qui est nécessaire à la production de la sève, l’érable illustre une dépendance à l’environnement qui se fait rare dans les autres productions agricoles, les engrais et les méthodes modernes permettant de maitriser les aléas de la nature. L’érable, lui, conserve cette fragilité même si l’évolution de la technologie a tout de même permis d’accroitre la production. Cette année s'avère notamment être une récolte exceptionnelle, la production étant jusqu'à doublée chez certaines acériculteurs tant les conditions climatiques sont idéales. De plus, la production de sirop représente aussi tout un art des produits du terroir, qui sont mis à l’honneur durant les fêtes des sucres : saucisses à l’érable et tartes au sucre y remportent toujours un franc succès. Cette dépendance au climat ainsi que les produits d’antan mis à l’honneur forment ainsi un rappel à un passé qui semble toujours plus lointain, au fil de l’évolution des modes de vie de nos sociétés.

Cuve tradittionnelle pour préparer le sirop d'érable, Sucrerie de la Montagne

De la cabane à sucre à la buvette d’alpage

Si les cabanes à sucre authentiques sont des hauts lieux de conservation de la tradition, elles ne sont pas sans rappeler une forme d’équivalence connue en Suisse. En effet, le chalet d’alpage et sa traditionnelle buvette pour randonneurs ou les fêtes de la désalpe ne sont que quelques exemples de cet appel à la tradition que nous connaissons également en terre helvétique.

Ces différents lieux et événements forment ainsi des ponts entre tradition et modernité, démontrant une époque révolue mais dont on n’est pourtant pas prêt à se séparer. Alors pensez-y la prochaine fois que vous sucrerez vos crêpes au sirop d’érable, c’est toute la tradition et le terroir canadien que vous dégustez. 

Valérie Zonca

Actuellement étudiante en Relations Internationales à l’Université de Genève, Valérie Zonca est passionnée par les voyages et la photographie. Agée de 23 ans, elle nous raconte à travers son échange universitaire à Montréal sa vision du Canada et nous dévoile les particularités qui composent le pays du Grand Nord blanc.