Bienvenue au Canada

Le Canada, avec ses presque 10 millions de km² de terrain, forme le deuxième pays en terme de superficie au monde. Cependant, cette vaste étendue de terre est loin d’être homogène. Avec plus de 35 millions d’habitants, dont 8 millions uniquement pour la province du Québec, la diversité régionale et le multiculturalisme sont des éléments clés de cette monarchie constitutionnelle nord-américaine. Historiquement créé sur des bases sécuritaires – vivre ensemble ou mourir seul – le Canada s’est peu à peu forgé une identité propre tout en conservant une forte hétérogénéité, revendiquée notamment par le bilinguisme et le fédéralisme à travers le système politique provincial.

Ces éléments ne sont pas sans rappeler un autre Etat, européen pour sa part, lui aussi confronté au plurilinguisme et à une forte politique régionale. La Suisse, différente en de nombreux points, notamment par sa superficie mais dont le système institutionnel et la culture ne sont pas si éloignés de notre partenaire nord-atlantique. Au niveau culturel, la francophonie et le mode de vie relativement semblable de ces deux Etats en font des voisins particuliers, dont la séparation est créée presque uniquement par le nombre de kilomètres qui les éloignent l’un de l’autre. Ce sont ces similitudes, mais également les éventuelles divergences existantes, que je vous propose de découvrir à travers mon séjour au pays du Grand Nord blanc.

Une source d’inspiration multiple

Au-delà de ces quelques remarques préliminaires, ce qui peut constituer le premier élément de cette analyse des relations helvético-canadiennes est que le Canada est une source d’inspiration pour une pléiade d’enjeux actuels que connaissent la Suisse ou ses voisins européens. Sans pour autant prétendre vouloir appliquer le modèle canadien sur le modèle suisse, des idées, des solutions et des défis de ce grand pays auraient intérêt à être davantage mis en lumières dans la sphère politique et médiatique suisse. Par exemple, la récente élection du libéral et très médiatique Justin Trudeau en octobre dernier au poste de Premier ministre et le souffle d’ouverture qui a suivi depuis est en contraste total avec le vent de fermeture qui s’étend en Europe occidentale. L’accueil du 10’000ème réfugié syrien a d’ailleurs été franchi il y a quelques jours, non sans une forte médiatisation, de la presse autant que du gouvernement libéral. Bien sûr le Canada est un pays très vaste et l’accueil de 10'000 réfugiés fait figure de débutant face à une Allemagne qui, elle, les compte déjà en millions. Il n’en est pas moins que ce vent d’ouverture est une affaire à suivre, car cela va bien au-delà de la problématique migratoire. Le gouvernement de Trudeau a déjà mis sur la table plusieurs dossiers très emblématiques qui n’étaient absolument pas d’actualité sous le gouvernement précédent du conservateur Stephen Harper : tarification du carbone, retrait des troupes au Moyen-Orient, implication dans le conflit israélo-palestinien ou légalisation de la marijuana n’en sont que quelques exemples.

Des enjeux bien présents

Ce contexte d’ouverture est d’autant plus pertinent qu’il intervient dans une situation économique difficile pour le Canada. En effet, le dollar canadien, également appelé le huard, a perdu plus du tiers de sa valeur depuis 2013, victime de la chute des prix du pétrole qui constitue l’une des exportations majeures du Canada. Cette baisse du huard, la plus importante depuis ces 13 dernières années, est d’autant plus problématique que le dollar américain, lui, s’est renforcé tout au long de l’année 2015. Les Etats-Unis représentant le principal partenaire économique du Canada, ce double déséquilibre risque de créer du côté du Canada une importante baisse de la consommation, qui se matérialise déjà aujourd’hui par une forte hausse des prix de certaines denrées importées, comme les légumes. Toutefois, on observe également une progression importante du tourisme en provenance des Etats-Unis, qui nous montre une fois de plus qu’il existe des gagnants et des perdants à cette situation. Sur ce point, il y a bien une différence majeure entre le Canada luttant contre la baisse de son dollar et la Suisse luttant contre le renchérissement du franc.

Un autre enjeu que vit en ce moment le Canada est la capacité du nouveau gouvernement libéral à faire ses preuves après les premiers mois suivant la transition de pouvoir. Les libéraux ont certes remporté haut la main les dernières élections d’octobre 2015, mais les opposants à Trudeau n’ont pas tardé à faire entendre leur voix. Son manque d’expérience exécutive, son jeune âge, ses projets de réforme pour le moins ambitieuses, comme cité plus haut, en font un personnage autant admiré que décrié. Son omniprésence médiatique est également fortement jugée, même au sein de son propre camp. Il est l’un des chefs d’Etats les plus présents sur les réseaux sociaux, n’hésitant pas à publier des photos le montrant dans des situations insolites, du match de boxe caritatif auquel il sort vainqueur en passant par la séance de danse orientale. On est alors loin de nos discrets conseillers fédéraux, qui cultivent avec sagesse l’antithèse du culte de la personne. Justin Trudeau nous fait plus penser à un Barack Obama, présent sur le terrain à grand renfort de communication 2.0. Cependant il serait réducteur de dire que la « Trudeaumania » est forcément un symbole d’incompétence politique, la communication agressive ne signifiant pas qu’il n’y ait pas d’actes concrets et efficaces qui suivent.  Affaire à suivre dans la vie politique de ces prochains mois.

Vers des temps intéressants

Au vu de ces quelques éléments précités, il serait faux de déclarer que le Canada n’est qu’un lointain voisin pour nous autres, Suisses. Un océan nous sépare peut-être, mais le système politique, les enjeux actuels en termes de diversité linguistique, d’immigration, d’environnement ou de fédéralisme nous rapprochent fortement, sans oublier le vent de libéralisme qui souffle sur le Canada et qui promet de voir des changements intéressants se produire au cours des prochains temps. Le Canada mérite donc une place qui soit davantage mise en valeur sous les projecteurs helvétiques à l’avenir. J’essaierai ainsi d’y contribuer à mon échelle via ce blog. 

 

Le Président Schneider-Ammann et son homologue Trudeau lors du Forum Economique de Davos en janvier 2016

Valérie Zonca

Actuellement étudiante en Relations Internationales à l’Université de Genève, Valérie Zonca est passionnée par les voyages et la photographie. Agée de 23 ans, elle nous raconte à travers son échange universitaire à Montréal sa vision du Canada et nous dévoile les particularités qui composent le pays du Grand Nord blanc.