Cette eau qui coule…

On sort gentiment de la crise due au Covid-19. Le retour à la normale (ou presque) doit pourtant s’accompagner des mêmes gestes que nous avons appris dans l’urgence. Se laver les mains “comme il faut” en fait partie. L’OFSP a même fait un tuto pour nous apprendre à le faire. Le hic: la vidéo véhicule un très mauvais comportement par rapport à cette ressource essentielle qu’est l’eau.

Dès la maternelle, et même bien avant dans les familles, les tout petits enfants apprennent à se laver les mains. C’est bien sûr ce que vous faites après être passé.e aux toilettes (du moins je l’espère pour votre entourage!). C’est le passage obligé avant de préparer le repas et de toucher les denrées alimentaires. C’est le réflexe que l’on a avant de passer à table. Bref, vous savez vous laver les mains. Alors quand j’ai vu débarquer les vidéos pour m’apprendre à me laver les mains, j’ai souris. Vous aussi?

Le sourire aux lèvres, je me suis dit: pourquoi pas? Pour ce geste que je fais chaque jour machinalement, il y a peut-être quelque chose à apprendre. Déjà, j’ai appris qu’en période d’épidémie ou de pandémie, c’est-à-dire en gros chaque hiver (et bien oui, les rhumes et les grippes saisonnières peuvent s’éviter si on se lave les mains!), il est nécessaire de se laver les mains jusqu’à 20 fois par jour. Si, si! C’est Didier Pittet qui le dit.

Au visionnement de la vidéo officielle de l’OFSP, mon sourire s’est un peu crispé…

Allez, on se rafraîchit un peu la mémoire ?

Mais qu’est-ce qui cloche, me direz-vous ?

Nous avons appris à fermer le robinet durant le lavage des dents, pour économiser l’eau qui coule pour rien.

On s’est résolu à couper l’eau de la douche pendant le savonnage, pour économiser l’eau qui coule pour rien.

Quoi, pas vous ? Saviez-vous qu’à chaque minute, ce sont entre 15 et 20 litres d’eau qui partent directement à la canalisation? Il existe désormais des “stop-douche” qui permettent d’interrompre le flux sans modifier les réglages.

Personnellement, vu que la douche se situe au 3ème étage et qu’elle met de longues minutes à arriver au pommeau depuis la cave où se situe la chaudière, je me suis habituée à me doucher à l’eau froide.

Soit dit en passant, c’est une très bonne habitude: la douche réveille, elle ne dure pas longtemps, et on n’a pas froid en sortant, tellement la circulation sanguine s’est activée…! Une astuce pour s’y habituer: je commence à mouiller les jambes, puis les bras, puis le ventre, le visage et je recommence pour le dos. Essayez en été et gardez cette habitude quand le temps se rafraîchit, vous verrez, c’est délicieux!

Et si vos ados râlent, vous pouvez toujours installer, comme dans les cabanes alpines ou de Norvège, des compteurs à jetons. Un jeton = 2 ou 3 minutes d’eau qui coule. Au tarif norvégien, nous avons très vite appris à nous doucher vite et bien! Un truc à importer, assurément…

Et que voit-on sur ces vidéos de lavage de mains? L’eau qui coule, qui coule, qui coule.

Visiblement, l’OFSP ne discute pas trop avec l’Office fédéral de l’environnement…

Le gaspillage des ressources, même quand apparemment elles sont pléthoriques, c’est vraiment un réflexe à ancrer dans les mentalités. En tout temps, même en période de pandémie…

Cet été, et les étés qui vont suivre, il y a fort à parier que nous devrons à nouveau subir une sécheresse due au réchauffement climatique. On en a eu un avant-goût ce printemps. Alors la Suisse, château d’eau de la Suisse, c’est un concept qui ne va pas durer. Autant s’y faire dès maintenant.

Mes astuces pour économiser l’eau

Mon coup de gueule passé, voici quelques astuces pour économiser notre or bleu. Ce n’est pas exhaustif, alors profitez des commentaires pour ajouter vos idées !

  • la voiture est sale ? Et alors…! Qui s’en soucie ?
  • l’herbe du jardin jaunit en été ? Et alors…! Elle repoussera dès les premières pluies d’automne !
  • à la cuisine, je récupère l’eau de rinçage de la salade et des légumes dans un seau dédié. Avec, j’arrose les plantes et les fleurs au jardin. Le seau de 10 litres est plein en deux-trois jours… Un truc de ma voisine (merci Marie-Thérese!).
  • installer des embouts mousseurs sur chaque robinet, afin de mélanger de l’air au flux d’eau. Économies garanties.
  • comme à San Fransisco, on ne tire pas la chasse systématiquement à chaque petit pipi (et on ferme le couvercle pour emprisonner les odeurs)
  • les jardiniers amateurs récupèreront même l’urine familiale comme engrais pour le jardin (un truc de fou? mais regardez donc cette vidéo explicative de France 3, où l’on parle de l’EAWAG à Zürich qui a mené des essais en plein champ très prometteurs…!)

  • au jardin, mes carreaux de légumes sont couverts en permanence de “mulch”, soit des feuilles mortes, soit de la paille, soit du compost, pour que la terre ne se dessèche pas
  • au jardin toujours, j’arrose le soir ou très tôt le matin, en dehors des grandes chaleurs
  • nous avons installé une citerne enterrée pour récupérer l’eau de pluie qui tombe gratuitement du ciel, l’eau y reste fraîche en été et ne gèle pas en hiver. Cette mesure devrait être obligatoire à chaque nouvelle construction de bâtiment, d’ailleurs, comme les panneaux solaires thermiques le sont dans le canton de Vaud pour chauffer l’eau sanitaire (et peut-être ailleurs…)
  • au jardin encore, je remplis les ollas ou oyas installés en pleine terre (ce sont des pots en terre cuite, poreuse, qui “arrosent” par capillarité. Les ollas permettent d’économie entre 50 et 75% d’eau d’arrosage, les plantes orientent leurs racines pour aller boire à proximité de la diffusion. Une potière de ma région en fabrique de magnifiques, mais la solution la plus simple et la moins chère est d’enterrer à fleur de terre un gros pot en terre cuite dont le trou du fond est bouché et de le couvrir avec sa soucoupe)
Les ollas de Camille Rapin, Photo de Camille Rapin

  • et bien sûr, cela fait belle lurette que j’ai renoncé au bain pour préférer la douche (froide)

Et vous, vous en avez d’autres, des astuces pour économiser l’eau ?

Bon déconfinement à toutes et à tous!

Comment l’homo-consommatus est devenu un être fractionné

La segmentation est une technique marketing bien connue… et très aliénante. On ne va pas vendre du vernis à ongle à une mécanicienne sur auto (quoique…!) ou un anti-histaminique à quelqu’un en pleine forme. Pour vendre, il est nécessaire d’adapter son discours à son public, pour mieux l’atteindre. Le principe est simple à comprendre. Là où le bât blesse, c’est quand la segmentation conduit à la fragmentation de tout et de tous, à l’infini. A contrario, le mode de vie qui vise à réduire ses déchets passe automatiquement par un exercice permanent de simplification quant à la façon de consommer. En soi, le mode de vie Zero Waste s’oppose à la fragmentation et engendre une réunification de l’homo/femina consommatus (ou homo-femina-economicus).

La segmentation du marché, cela s’applique à deux concepts: diviser le marché et ses consommateurs en segments, afin de mieux définir le public auquel on destine un produit et ainsi, affiner sa façon de s’adresser à lui afin qu’il se sente concerné… et achète le produit en question. Le second concept consiste à diviser une catégorie de produits (prenons l’exemple d’une crème cosmétique pour la peau) en sous-groupes spécifiques (crème pour les mains, crème pour le corps, etc.).

L’une comme l’autre sont problématiques. Voyons pourquoi. (suite…)

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Un mode de vie créateur de valeurs

Le mouvement “Zero Waste” ou “Zéro Déchet” qui vise à réduire puis à éliminer les déchets a le vent en poupe. Il est pourtant la cible de critiques: le “Zero Waste” serait une préoccupation de Bobos gâtés des villes qui, après avoir tout eu, sont en quête de sens. Et pourtant, les efforts des uns et des autres contre le gaspillage des ressources (dans les emballages, dans le portionnement des denrées et produits) sont payants. Adopter un mode de vie “Zéro Déchet” créé des valeurs. Reste à s’entendre sur ce qui signifie la notion de “valeur”…

Depuis quelques années, de célèbres blogueuses ont mis la question du gaspillage et des déchets à l’ordre du jour: la Française émigrée en Californie Bea Johnson, auteure du bestseller “Zero Waste Home” (www.zerowastehome.com) et serial-conférencière, la New-Yorkaise Lauren Singer (www.trashisfortossers.com), l’activiste Rob Greenfield qui a trimballé sur lui  tous ses déchets produits durant 30 jours (http://robgreenfield.tv/category/trashme), ou bien plus près de chez nous les Français Jérémie Pinchon ou Bénédicte Moret (www.famillezerodechet.com) se sont fait connaître sur le mode “je ne produis plus de déchets”. Ces pionniers ont convaincu des milliers de gens à changer de mode de vie.

Sur la toile et les réseaux sociaux, on ne compte plus les blogs et des pages traitant des déchets et de toutes les alternatives pour les éviter. Il s’en crée chaque jour. En Suisse, à la suite d’une émission “A Bon Entendeur” sur le sujet en 2014 et d’une première conférence donnée par Bea Johnson sur les rives du Léman, trois jeunes femmes décident de créer l’association “Zero Waste Switzerland”. C’était en 2015, c’était hier. Dans la foulée, boostées par le documentaire “Demain” (www.demain-lefilm.com) vu par plus d’un million de spectateurs, des initiatives locales de toutes sortes voient le jour. On assiste, entre autres exemples, à la création de dizaines d’épiceries dans tout le pays qui vendent leurs produits au poids et sans emballages.

Peut-on se permettre de réduire ce mouvement à des lubies d’extrémistes écologistes, à de douces utopies, à des rêves de nostalgiques du temps des cavernes qui refusent tout progrès? A ces “mises en boîte” confortables – parce qu’elles inhibent toute réflexion, il est pourtant facile de démontrer que le thème est intéressant à plus d’un titre.

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