Summer Meeting In Lausanne Europe. Greta Thunberg : 1 – Michel Onfray : 0

Il y a quatre semaines, l’UNIL a accueilli le SMILE = Summer Meeting In Lausanne Europe organisé par l’association Friday for future,réunissant 450 étudiants du monde entier, première réunion du genre concernant le plan d’action contre le réchauffement climatique.

Greta Thunberg était évidemment présente. Jacques Dubochet, prix Nobel, aussi.

Curieusement, Jacques Dubochet s’engageant pour le climat aux côtés de Greta notamment, ne suscite aucune critique, Greta par contre, déclenche de nombreuses réactions hostiles.

Au lieu d’applaudir la démarche, beaucoup de messieurs, tels Michel Onfray, philosophe, critique sa voix, son style. Pourquoi pas aussi la couleur de son vernis à ongles ?

Quelles mouches les piquent?

En quoi lanotoriété d’une jeune fille de 16 ans les dérange-t-il ?

Peut-on imaginer que ces personnes ignorent le réchauffement climatique qu’ils n’ont lu aucun ouvrage sur le sujet, ni une seule page des rapports du GIEC ou qu’ils n’ont pas entendu les appels dans les tribunes des 15’364 scientifiques ?

La démarche du SMILE est unique et présente plusieurs mérites : celle d’être pacifique, cadrée, et constructive pour trouver la voie permettant de diminuer très rapidement le recours aux énergies fossiles.

Que deviendra t’- elle ? Une épée dans l’eau ? Je fais le pari que non.

Il y a donc lieu de se réjouir de cette mobilisation.

L’engagement : comment garder la motivation ?

Parce que travailler ensemble à une même cause sur tous les continents permet de maintenir la motivation. Et c’est heureux car de mobilisation, il y en a besoin. Furieusement même.

C’est peu dire que la cause est délicate. Quand bien même on arrêterait aujourd’hui les émissions de gaz à effet de serre, la moitié des glaciers fondrait malgré tout.

Appel aux philosophes

Le défi qui attend l’humanité est absolument inédit, dans son ampleur, dans sa dangerosité, dans son irréversibilité, dans ses effets totalement destructeurs.

Quand j’y pense, je suis, comme chacun, saisie d’effroi. Nous avons ardemment besoin de philosophes pour trouver la force et le sens et nous aider à regarder la vérité en face, à l’affronter et à la surmonter en gardant une vision de notre civilisation.

 

La critique des politiciens : un peu facile

L’engagement : celui du général Guisan, celui des Justes pendant la guerre, celui de n’importe quel.le blessé.e. qui s’accroche, celui de l’humble militant qui colle des affiches et récolte des signatures, souvent dans l’indifférence générale.

Mon mandat local est récent.

Sans défendre ma paroisse, j’y ai trouvé des gens dévoués, et ce, dans tous les partis. Même s’il y a une minorité de brebis galeuses, d’ambitieux sans talent, de médiocres qui font une fin, d’autres un début, et certains qui servent leurs petits intérêts au lieu de l’intérêt général.

Des élus qui lisent de longs rapports pour préparer le Conseil communal mensuel, qui siègent en commission et qui montent les tentes le jour du marché. Exercice humble, généralement anonyme.

Donc, je m’insurge sur la dénonciation du « tous pourris, tous paresseux ».

Vous avez dit courage?

Dans le meilleur des cas, les politiciens manqueraient de courage. Le propos est injuste.En 2012, quand Madame Widmer-Schlumpf alors Conseillère fédérale voulait progressivement passer le carburant à cinq francs le litre.

Lucide, elle a dû faire marche arrière en moins de quarante-huit heures, après une importante levée de boucliers.

Les bonnets rouges ont eu raison de l’écotaxe, les gilets jaunes de celle sur le l’augmentation de la taxe sur le diesel.

Quant au directeur de l’OFROU, l’Office Fédéral des Routes, qui en septembre 2015, voulait interdire l’importation de véhicules diesel qui polluaient jusqu’à quarante fois la norme d’oxyde d’azote, il a fait marche arrière rapidement.

Il faisait son travail en protégeant notre santé, c’est-à-dire l’intérêt général.

Pas si facile entre la fin du monde et la fin du mois, et surtout l’intérêt à court terme bien défendu d’une corporation contre l’intérêt général à moyen terme.

Exemple de la taxe au sac pour les déchets

Alors que le système était en vigueur dans vingt autres cantons depuis des décennies, le canton de Vaud résistait contre une taxe au sac, jugée anti-sociale, inefficace, inutile.

Dans son arrêt du 4 juillet 2011, le Tribunal Fédéral a obligé le canton à rentrer dans le rang. La taxe au sac dans les communes vaudoises a vu le jour dès janvier 2013, voire en janvier 2014 pour les retardataires. Certes au prix d’une moindre qualité du tri sur les organiques. Bien sûr, on a observé quelques incivilités de plus dans les endroits délicats qui le sont restés.

En quelques semaines, l’objectif a été atteint: – 35% d’ordures ménagères en moins dans quasiment toutes les communes et un volume de matières recyclées bien supérieur.

Au fur et à mesure, les communes ont aménagé les infrastructures, adapté les rythmes de collecte, modernisé leur communication.Le bas Valais a rejoint les autres cantons en 2018.

Pas de quoi fouetter un chat par cette remise en question salutaire.

A quand Genève?

Le « signal prix » du sac est efficace. En payant leur sac deux francs, une part très significative de la population s’est donnée plus de peine pour le tri.

Bien accompagnée, l’augmentation des  prix des carburants polluants serait assurément une mesure efficace.

Cette mesure est plus gérable que la généralisation de 43°C en été. « L’environnement », publication de l’Office Fédéral de l’environnement, l’OFEV, de mai 2019 le rappelle: « Chaud devant. Sans la mise en œuvre de mesures de protection du climat à l’échelle mondiale, la moyenne annuelle des températures sera supérieure de 2 à 3,3 °C en Suisse en 2060 par rapport à 1981-2010. Un réchauffement de 3.3 à 5.4 °C est même probable entre 2070 et 2100 si aucune mesure n’est prise. »

La canicule : néfaste pour la santé et pour les affaires

A 36°C au Paléo, tous ceux qui devaient rester debout étaient en souffrance, y compris la jeune génération. Comme l’explique le corps médical, au-delà d’un certain seuil propre à chacun, tout degré supplémentaire demande au corps une adaptation toujours plus pénible.

En quelques minutes, le soleil de plomb est devenu une pluie diluvienne qui s’est arrêtée comme elle est venue. La brutalité du phénomène a été remarquable.

Citons toujours « L’environnement » du même numéro: « Les simulations montre que les précipitations estivales diminueront d’ici 2060. Mais quand il pleuvra, il pleuvra très fort. »

Les commerçants qui ont organisé les soldes fin juin et juillet en ont fait l’amère expérience : qui fait du shopping à 38°C ?

Mis à part la vente de crème solaire, de glaces ou de chapeaux, la canicule est néfaste pour le commerce. Le prix des fruits et légumes est en hausse car la production manque. Dans les métiers du bâtiment, la possibilité a été ouverte de faire la demande de chômage technique. Au risque de me répéter, le système d’assurances ne pourra être invoqué qu’exceptionnellement.

L’absence de préparation technique

Les trains ont été retardés parce qu’ils ne sont pas prévus pour la dilatation de juin ou de juillet ni pour les pluies diluviennes.

Ça alors.

L’employé des CFF interrogé par la RTS propose, en mesure d’urgence, de peindre quelques tronçons de voie en blanc, car peindre les rail coûte et prend du temps. Cette opération de blanchiment des voies a déjà eu lieu sur les principales voies du réseau italien.

Dès qu’un orage s’abat, c’est la fin du trafic, la coupure d’électricité ou les souterrains inondés, et un certain temps pour mettre en place des moyens de rechange. Des retards en pagaille, des plans B peu rodés.

Les conditions dégradées pour les usagers des transports vont devenir ordinaires.Adaptons vite les systèmes.

Trouver le chemin de l’action du héros ordinaire

Saluons ces jeunes qui se mobilisent. Quand « laisser tomber » signifie mettre en péril l’avenir de ses enfants, cela devient coupable.

Certains s’engagent à leur échelle, dans leurs associations, pour leur quartier. Il y a déjà tant de choses concrètes à faire. C’est tant mieux. Il y a ceux qui ont déjà donné et ne veulent plus s’y mettre. Je les comprends, enfin pas tant que cela. Il y a aussi des moyens de ne pas se sentir impuissant.

Pour rappel :

  • S’informer et aborder ainsi le phénomène en conséquence de cause .
  • Signer les initiatives et pétitions sur le sujet.
  • Voter, localement, pour le canton, et au niveau fédéral.
  • Consommer moins, mieux.
  • Boycotter certains produits, certaines marques.
  • Devenir autonome : eau de pluie, potager, poules, planter des arbres.
  • Bannir le plastique.
  • Manger moins de viande, rouge en particulier et moins de poissons.
  • Apprendre les savoir-faire de base, particulièrement en matière d’agriculture et de construction.
  • Se réunir et rejoindre un mouvement pour éviter la solitude.
  • Et méditer pour revenir ou venir à l’essentiel : plus de frugalité.

La cible se résume à réduire les gaz à effet de serre, et ne consommer que l’équivalent d’une planète, pas 3,59 comme en Suisse.

La canicule, la sécheresse et les orages brutaux ultra-localisés nous montre des signes tangibles du réchauffement. Pour l’heure, nous ne sommes prêts, ni techniquement, ni psychologiquement, ni philosophiquement.

Les politiques doivent prendre les mesures nécessaires, certes. Cela ne dispense aucun d’entre nous, dans son domaine de compétence, de le faire.

Et au lieu de critiquer les jeunes et les moins jeunes, soutenons sans réserve ceux qui prennent en main leur avenir et le nôtre.

Source : OFEV Magazine «l’environnement» 2/2019 – Génie génétique(PDF, 5 MB, 28.05.2019)

Valérie Mausner Leger

Candidate au Conseil national. Titulaire d’un diplôme d’HEC et au bénéfice d’un Master en systèmes d’information., Valérie Mausner Leger conseille les communes romandes pour leur politique déchets. Conseillère communale à Nyon, elle a co-fondé l’association Demain la Côte qui promeut l’agriculture urbaine, les énergies renouvelables et la consommation sobre.

10 réponses à “Summer Meeting In Lausanne Europe. Greta Thunberg : 1 – Michel Onfray : 0

  1. On voit bien qu’elle ne comprend rien au climat et qu’elle confond les sujets. Elle n’a pas voyagé non plus pour constater la surpopulation, seule menace réelle pour l’humanité et les autres espèces, parce que malgré les efforts que nous pourrons consentir, il faudra bien nourrir la population . Au Sri Lanka , par exemple, les éléphants n’ont bientôt plus d’espace où se déplacer sans tomber sur des routes construites pour relier les villes de plus en plus densément peuplées. À Madagascar, les pauvres lémuriens n’ont bientôt plus de forêts où s’abriter, bien que le niveau de vie soit faible, ce qui montre que ce n’est pas le bon critère.
    Elle s’imagine que ses remèdes de grand-mère suffiront à guérir tous les maux , mais comme tous les pauvres demeurés obsédés par les discours du GIEC , la nouvelle secte, elle ne se rend pas compte du principal défi à relever, la technologie seule ne suffira pas .
    La consommation reste proportionnelle au nombre d’habitants !

    1. Bonjour Monsieur, je crois comprendre que vous pensez qu’il y a d’autres combats tels la croissance démographique. C’est effectivement une question. Nourrir 7, 8, voire 9 milliards d’humains est un autre challenge que d’en nourrir 3 il y a 55 ans. Sur la fertilité des femmes, les nouvelles sont plutôt bonnes. En effet, dès qu’elles mangent à leur faim, que leurs enfants sont vaccinés et qu’elles ont appris à lire, les 7 enfants par femmes deviennent 2.1 comme au Sri Lanka par exemple (Université de Sherbrooke, Québec, Canada). Quant à la production agricole, des progrès sont à faire car un tiers de la production mondiale n’atteint pas l’assiette. Vous citez le difficile dialogue entre les besoins des animaux et l’habitat humain.C’est en effet une question non résolue et pas seulement dans les pays à haute croissance démographique. La cohabitation avec les loups est délicate non loin d’ici.Enfin, je vous rejoins sur le fait que le développement de “consommation à l’occidental” ne peut s’appliquer à 9 milliards d’individus. C’était d’ailleurs un sujet de la COP 21 soulevé par les pays du Sud : vous les occidentaux voulez nous bloquer sur notre développement, c’est un comble. Comme l’écrivent Messieurs Christian Arnsperger et Dominique Bourg de l’université de Lausanne, la solution consiste à baser notre système économique à une seule planète, ce qu’ils appellent la société perma-circulaire. Leur ouvrage de référence à ce sujet s’appelle “Ecologie intégrale: pour une société perma-circulaire”.
      Au plaisir d’un prochain échange.

      1. Tant d’empathie dans vos réponses ne donnent que plus de poids à vos arguments, chère Valérie.
        Mais je m’arrêterai là, afin que l’on ne nous suspecte pas de connivence.

        Non, l’ami Hubert est sympa, on le connait comme le loup ou l’ours blanc (lui qui nie la fonte des Poles) sur ces blogs.

        Mais il claironne son leitmotiv ad perpetuam et sur tous ces blogs que l’unique problème est la surpopulation et que tout défenseur de la planète n’a rien compris.

        Problème surpopulatif autant qu’exhaustif auquel il ne donne d’ailleurs jamais de réponse, et encore moins de solution, alors, relax, Val!
        🙂 bravo

    2. Personne ne nie que la croissance démographique exponentielle que l’on a connue ces derniers siècles n’est pas soutenable, … mais la “décrue” est déjà bien amorcée dans le sens que l’indice de fécondité diminue PARTOUT dans le monde et est même tombé en-dessous de celui qui permettrait un simple renouvellement des populations dans les pays les plus développés. Le développement est d’ailleurs le seul facteur qui influe fortement sur cet indice. Etant donné qu’un Américain par exemple consomme (et pollue) autant qu’une dizaine d’Africains, c’est plutôt positif de ce point de vue que ce soient en priorité les populations les plus développées qui diminuent le plus; l’impact environnemental positif n’en sera que plus marqué. Mais pour que ces effets se manifestent, il faudra de toute façon du temps car l’inertie est grande dans ce domaine. A part guerres, holocaustes, famines ou grandes épidémies (faut-il les souhaiter?!!) , il n’y a aucun moyen de faire baisser RAPIDEMENT la population mondiale.

      1. A court terme, ce qui menace les populations, c’est, notamment, la montée des eaux dans des villes très denses. D’ailleurs en Indonésie, le président cherche à déplacer la capitale. C’est brutal mais nécessaire.

  2. aujourd’hui même dans Le Temps, en écho à votre article, un livre écrit par Kaouther Adimi qui signe une fable où des jeunes de 9 à 12 ans s’opposent au pouvoir dans une banlieue résidentielle d’Alger; et puis les vieux messieurs sont choqués par l’impertinence, à leurs yeux, de ces jeunes “qui se croient tout permis” même de leur dire ce qu’ils ont à faire, et que leur paresse les empêche de faire ! lorsque que Gréta est passée à Paris récemment, à l’assemblée nationale, des messieurs (vieux dans leur tête) ont eu des saillies verbales tout à fait inopportunes; merci pour votre article;

    1. Merci de vos encouragements. Effectivement à Paris comme à Alger, pour des raisons diverses, il y a levée de boucliers contre cette génération qui réclame la justice climatique ou la justice tout court. La bonne nouvelle est que les étudiants et les élèves qui font leur rentrée ont des demandes à ce sujet. Les choses vont bouger, je crois.

  3. A relire absolument:

    Ivan Ilich, “Energie et Equité”, Le Seuil, 1973 (http://carfree.fr/index.php/2008/02/03/energie-et-equite-1973/).

    André Gortz, « L’idéologie sociale de la bagnole », in revue Le Sauvage, septembre-octobre 1973 (http://carfree.fr/index.php/2008/02/02/lideologie-sociale-de-la-bagnole-1973/)

    Edgar Morin, “Le paradigme perdu”, Seuil, 1973 (sur le rapport nature-culture).

    “La bagnole, ça pue, ça tue, ça rend con” (Edgar Morin)

    Quelques échos de la rue, et leurs contre-échos:

    Un chauffeur de taxi lausannois: “Sur dix voitures en circulation, au moins huit sont inutiles”.

    Un de ses collègues genevois: “Dans ma famille – nous sommes cinq – chacun a sa voiture.

    Une de mes élèves du post-obligatoire, constatant que j’étais un des rares profs à venir à pied ou en bus à l’école:

    “Comment, vous zavez pas d’voiture, m’sieur? Mais vouzêtes pas un type normal…”

    Mais je n’abuserai pas de l’hospitalité que m’offre ce “blog” pour raconter ma vie…

    1. Bonjour, Merci pour ces références et ce témoignage.Mobility offre de belles solutions à ceux qui se déplacent en transports en commun mais qui, ponctuellement, ont besoin d’un véhicule.

  4. Bel article responsable et volontaire, chapeau bas, chère Valérie!

    Vous en appelez aux philosophes (j’adore le titre +1).

    Reste à savoir lesquels, car Onfray qui se démarquait, il y a encore quelque temps, de l'”intelligentsia” française a fini par tomber dans le chaudron de la potion et devenir aussi un autiste prétentieux et franchouilliard, comme les autres 🙂

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