La politique des villes ne doit surtout pas être fédérale

Il y a plusieurs années déjà, je ne sais plus quel parlementaire fédéral avait suggéré de consacrer un article de la Constitution fédérale aux grandes agglomérations. Par chance, l’idée n’avait pas eu de suite.

Mais à l’approche des élections fédérales, le PLR semble vouloir reprendre l’idée. Il me paraît nécessaire de la neutraliser dans l’œuf.

Les grandes villes connaissent toutes plus ou moins les mêmes problèmes

Surpopulation, densification, pauvreté de certaines classes sociales, parfois délinquance et scènes de drogue importantes, nécessité d’occuper la population oisive, développement culturel, circulation et transports publics, pour ne citer que quelques exemples, voilà des problèmes communs aux grandes agglomérations. Mais faudrait-il que la Confédération intervienne pour proposer, payer, puis peut-être imposer des solutions uniformes ?

Ma réponse est résolument NON.

Les villes sont des éléments constitutifs importants des cantons

Certains cantons sont plus urbains, d’autres plus ruraux, mais tous ceux qui ont des villes d’une certaine importance ont vu ou voient celles-ci jouer un rôle qui leur est propre et qui fait intimement partie de l’histoire locale. Il appartient à chaque canton de chercher l’équilibre nécessaire entre les autorités cantonales et les autorités de ses plus grands centres urbains. Il est essentiel à la vie et au développement de chaque canton que les difficultés et les particularités de ses centres urbains soient étudiées et réglées selon le « génie du lieu ». Une solution fédérale serait uniforme et risquerait d’être peu adaptée.

Elever les grandes villes au rang d’interlocuteurs directs de la Confédération constituerait une grave menace pour le fédéralisme

Cela équivaudrait à créer un nouvel échelon de décisions pardessus les frontières cantonales, ou à côté de celles-ci, complexifiant la vie économique culturelle et politique du Pays. Le fédéralisme est indispensable à la paix confédérale. Mais c’est une construction délicate qui ne saurait être « doublée » par un genre de « fédéralisme des villes » superposé à celui des cantons et immanquablement dans un rapport.de concurrence.

Si les cantons veulent conserver la maîtrise de leur existence politique, économique culturelle et sociale pour le plus grand bien de leur population, ils ont intérêt à prendre deux sortes de mesures : d’une part à être plus attentifs aux problèmes spécifiques de leurs grandes communes au lieu de voir déjà souvent en celles-ci des concurrentes, des menaces de leur pouvoir, d’autre part à se consulter les uns les autres pour chercher d’éventuelles solutions communes à leurs agglomérations.

Des partis fédéralistes feraient preuve de lucidité politique en travaillant à l’intérieur des cantons à l’élaboration de solutions locales aux problèmes urbains plutôt qu’en sollicitant Maman Confédération pour faire parler d’eux en période électorale fédérale.

Suzette Sandoz

Suzette Sandoz est née en 1942, elle est professeur honoraire de droit de la famille et des successions, ancienne députée au Grand Conseil vaudois, ancienne conseillère nationale.

9 réponses à “La politique des villes ne doit surtout pas être fédérale

  1. Ben voyons, la gauche rose verte veut cimenter son pouvoir. Elle a le pouvoir dans les villes, elle veut que ce soient les villes qui commandent en Suisse. C’est aussi simple que ça.

  2. Les structures démocratiques ne devraient-elles pas évoluer aussi?

    Le cas de Genève inter-frontières sera intéressant, sans doute Bâle aussi et dans une moindre mesure, le Tessin, ce qui correspond, dans le fond, à une Europe des régions.

    Mais comme tout ça est mesuré à l’aune du bassin de votants, c’est sans doute le seul domaine où l’on peine à rationaliser.

    1. Dans le fond, chère Suzette, vous voulez dire que la presque majorité des villes sont de gauche et qu’il ne faut pas laisser filer la pelote hors du PLR?

      Bon, je vous souhaite d’intégrer que le monde d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec gauche-droite, s’il veut survivre, tous devront s’allier!

      1. Non, cher Monsieur, cela n’a rien à voir avec la gauche et la droite. La question est beaucoup plus complexe: il s’agit de savoir si le rapport fédéraliste actuel Cantons- Confédération, dans lequel les communes, quelle que soit leur taille, sont subordonnées politiquement aux cantons et n’ont pas de lien direct avec la Confédération, il serait souhaitable d’introduire une nouveau rapport hiérarchique direct Communes-Confédération. Cela modifierait profondément le paysage fédéral. Une telle modification ne peut pas être simplement l’objet d’une propagande électorale. Cela nécessiterait au moins une vraie réflexion et au niveau cantonal d’abord!

  3. Vous avez raison, cela doit rester une solution locale, mais cela n’empêche pas de rechercher une vision globale.
    Souvenez vous, les villes sont des “ îlots de chaleur “ avérés (bétonnage, routes, asphalte, imperméabilisation des sols, manque cruel d’arbres et d’une végétation diverse et variée). Par conséquent une prise de conscience fédérale, voir même européenne et mondiale est nécessaire. Comme vous le savez, le climat ne connait pas la notion de frontière ni le pouvoir (politique) local.
    Le politique heureusement (PLR et la plupart des autres partis aussi) adapte ses logiciels de réflexion, les entreprises emboîtent aussi le pas. Il était temps.

  4. Les gens de la campagne sont souvent très écolos mais ne votent pas écolo ! Les bobos eux se sentent coupables et en font trop ! Manifs propagande autoritarisme … Puis prennent l’avion plus de 1 fois par an …. Ils font cela pour se déculpabiliser !

  5. À quoi sert-il de disserter sur les vertus du fédéralisme (et du fédéralisme différencié selon le principe de subsidiarité) dont le but est une recherche presque «identitaire» aux nécessités sociales et économiques. La décentralisation – et donc le fédéralisme – est génératrice de lien social, d’unité et de créativité dans la gestion des affaires au niveau local. La responsabilité d’une action publique, lorsqu’elle est nécessaire, doit être attribuée à l’entité compétente la plus proche des administrés.
    La tendance est à la centralisation: au niveau cantonal, les grandes villes ont un pouvoir surdimensionné empiétant sur la marche des communes avoisinantes; au niveau fédéral, la souplesse de réponses locales à des situations imprévues se heurte à l’obsession de rationalisation et d’égalitarisme, à des solutions rigides ou figées; au niveau international, européen, la bureaucratie de planning désire fondre dans un creuset les nations en un alliage compact, noyant dans la quantité tout ce qui est qualitatif.
    Le PLR a ouvert ses portes à la police des normes, a signé son serment de fidélité au conformisme. Ne joue-t-il pas, avant les élections de cet automne, le rôle du «sujet naïf» dans l’expérience de Salomon Asch, montrant qu’un sujet, après plusieurs compères qui se trompent unanimement, peut répondre comme ces derniers en dépit d’une évidence objective. Ou, je n’ose l’imaginer: l’imposture règne en maître dès lors que l’on peut faire feu de tout bois, pourvu que l’on ait des résultats. N’est-ce pas ce qui fait l’art de l’imposteur, lui qui mieux qu’un autre possède le talent du conformisme et de l’opportunisme?

    1. Le PLR a donné les armes à l’UDC pour le noyer.
      On ne reviendra pas sur la schizophrénie de l’UDC (le bon paysan glaronnais avec ses Simmenthal et la haute finance), mais on pourra bientôt dire que le PLR a tué la Suisse, comme vendeur de patrie apatriote pour appuyer l’UDC!

      Seuls les figés dans la glaise constitutionnelle, ne se rendent pas compte que ce qui était valable en 1948, ne l’est pas forcément en 2019!

      P.S. me suis toujours battu dans la vie contre le “on a toujours fait comme ça”, avec peu de succès, il faut bien le dire, j’aurai sûrement du naître ailleurs?
      🙂 (sans rancune, ai toujours été droit dans mes bottes)

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