Une expérience scientifique utile ou malsaine?

Le Temps des 13/14 octobre nous apprend que des savants chinois ont réussi à faire naître des souris de « deux mères » donc sans fécondation par des gamètes mâles, que ces souris se portent bien et ont même pu procréer. On ne nous dit pas si elles ne procréent que des femelles, ni d’ailleurs si leur progéniture est « normale ». L’expérience chinoise est le résultat d’interventions délicates et compliquées sur des cellules. Le même genre d’intervention sur des cellules provenant de mâles s’est, à ce jour, révélé un échec. Dont acte.

Faisant abstraction de toute réflexion éthique, pour l’instant, on se pose une question : à quoi cette recherche peut-elle bien servir ? Certes, l’être humain est toujours à la recherche de l’origine du monde et de sa propre origine et cette curiosité est souvent un moteur de progrès. Mais dans le cas d’espèce, quel est le progrès recherché ou espéré ? On a vraiment de la peine à saisir l’intérêt qu’il y aurait à développer une reproduction hermaphrodite chez les mammifères. Ne serait-ce pas avant tout un moyen de pouvoir, l’expression du désir de façonner le monde à son image ? Est-on devant une expérience utile ou malsaine ? La recherche n’est pas bonne en soi. Encore faut-il que le chercheur soit animé du sens de sa responsabilité et ne joue pas simplement à l’apprenti sorcier.

Suzette Sandoz

Suzette Sandoz est née en 1942, elle est professeur honoraire de droit de la famille et des successions, ancienne députée au Grand Conseil vaudois, ancienne conseillère nationale.

2 réponses à “Une expérience scientifique utile ou malsaine?

  1. @ Madame Suzette Sandoz.
    Je comprends la folle dérive que vous évoquez de loin mais qui saute aux yeux. Mais je ne pense pas à priori que le résultat obtenu de ces chercheurs soit un but en soi, mais parvenir par ces manipulations à évoluer dans la compréhension de la fonction et des mécanismes de ces cellules. Alors je vais choisir une image toute simple qui fera rire mais tant pis : La compréhension de la biologie cellulaire végétale a certainement permis de sauver des cultures entières de tomates touchées par un micro-organisme ou d’autres phénomènes perturbant son développement. Mais cette même science a apporté la possibilité de faire pousser des tomates remplies d’eau et sans goût qui poussent à toute vitesse sur de la ouate synthétique. Les chercheurs en biologie cellulaire végétale, pour la plupart, aiment manger des vraies tomates avant de retourner à leur laboratoire. D’autres préféreront à ce bon goût celui de l’argent qu’ils toucheront des brevets rachetés par les industries de la culture extra-rentable…
    La question des limites à imposer dans le cadre de la recherche n’est pas une question simple, parce que d’un côté ces limites pourraient viser à ne pas ouvrir la voie à des mauvaises applications, mais de l’autre elles réduiront ou bloqueront en amont les progrès d’une recherche à but honorable. La voie principale de la recherche et ses aboutissements bénéfiques serait grandement réduite s’il fallait justifier dès le départ un but trop précis. Dans ce sens, je souhaiterais donner une illustration simple qui cette fois-ci n’aura pas le bon goût de la tomate, ni celui de l’eau. On s’est intéressé, déjà à la fin du IXXème siècle, à la toxine botulinique, un puissant poison sécrété par un bacille pouvant être présent dans des aliments conservés mal préparés, pour comprendre et savoir prévenir ce danger. Le but de la recherche était donc bien clair. Il a permis aussi parallèlement de créer des cultures maîtrisées du bacille pour la confection d’armes chimiques de guerre. Rien de surprenant jusque là… Mais qui aurait pensé qu’un siècle plus tard on découvrirait la possibilité de recourir à cette toxine pour « rajeunir » les visages défraîchis ? Puis actuellement d’autres applications médicales dans le domaine du traitement de dysfonctionnements nerveux… Remettre en cause la poursuite des recherches sur ce poison, à un moment où l’on avait atteint le but fixé et annoncé, nous aurait privé de dernières découvertes utiles à notre santé.
    Le chemin du progrés est ainsi incertain, semé de dangers, de bonnes nouvelles, d’échecs… Mais je suis personnellement d’avis que c’est bien sur cette voie que l’homme doit poursuivre, autant pour sa survie que son bien-être. Construire son avenir en tentant d’aménager des bases solides, oui. Croire avoir le pouvoir de maîtriser tous les risques par des mesures de prévention en les projetant jusqu’à l’horyzon, non. L’humanité dans cette totale sécurité n’est jamais née. Il n’y a que le poupon dans son berceau qui peut y croire, et encore…

  2. Lecteurs qui avez lu cet article, et qui ne se sentent pas motivés pour faire part de leurs opinions… Ne vous sentez-vous pas concerné pour l’avenir de vos enfants, petits-enfants ? Ou même ceux des autres si vous n’en avez pas ?..
    J’oublie peut-être qu’à ce jour l’on se focalise sur les émissions de CO2 en se faisant du soucis pour le devenir de l’humanité. Et il semble que l’on serait presque prêts à sauver la planète sans nous… Parce que dans un sens nous voulons reconstruire la nature telle qu’elle était avant notre présence, et en même temps on délaisse notre nature d’être vivant humain. Alors oui, la réduction de 50 % des naissances d’enfants pourrait sauver la nature, mieux que si l’on demandait à tous les enfants de respirer deux fois moins, et le mariage nouveau genre à 100 % le ferait encore mieux. Mais il reste un espoir pour tous : Les savants chinois réussiront peut-être à obtenir des souris qui ne rejettent pas de CO2.

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