Marchands d’enfants, ça suffit!

Le Tribunal fédéral vient à nouveau de rendre un arrêt concernant une commande d’enfant par procréation médicalement assistée. Il s’agit de jumeaux nés d’une mère porteuse. Un couple (hétéro, cette fois) a « commandé » un enfant à une mère porteuse américaine, enfant provenant d’un ovule et de sperme anonymes. Les « acheteurs »  sont allés chercher l’enfant aux Etats-Unis une fois la gestation terminée et, rentrés en Suisse, ont prétendu faire inscrire cet enfant comme le leur, conformément à l’acte de naissance américain. Certains Etats américains admettent en effet qu’un enfant né d’une mère porteuse inséminée avec des ovocytes de donneurs anonymes soit inscrit comme enfant de la femme et de l’homme qui ont passé la commande.

Fidèle à sa jurisprudence, le Tribunal fédéral a, à juste titre, refusé l’inscription et rappelé qu’une telle forme de procréation est contraire à l’ordre public suisse. Il va de soi qu’une éventuelle procédure d’adoption est la solution normale et que l’enfant est pour l’instant protégé par un curateur et placé chez le couple, en tant que parents nourriciers.

Peut-on commander la fabrication d’un enfant ?

Je m’abstiendrai de qualifier l’Etat américain qui peut légaliser ce genre de fabrication d’enfants sur commande et les adultes qui usent du droit de passer la commande. C’est l’expression d’un tel mépris de la personne de l’enfant que les mots manquent pour le dire.

Mais qu’on ne vienne pas verser un pleur sur le fait que ce marché n’est réservé qu’aux riches et qu’il faudrait donc le développer en Suisse aussi pour assurer l’égalité. Et qu’on ne prenne pas non plus l’enfant commandé puis acheté comme prétexte pour légaliser le système chez nous. En effet, le malheureux enfant issu de la commande de soi-disant parents n’est heureusement pas privé de protection chez nous. Il a le sort d’un enfant trouvé, notion régie par le code civil, et peut être placé chez des parents nourriciers – le couple qui l’a commandé, par exemple – en attendant qu’une éventuelle procédure d’adoption ait abouti. Sa situation d’abord incertaine est la conséquence de l’irresponsabilité de ses acheteurs!

Combien de temps faudra-t-il encore pour que l’on proclame urbi et orbi que le mode de procréation auquel a recouru le couple en question ici est totalement incompatible avec la dignité humaine?

 

Suzette Sandoz

Suzette Sandoz est née en 1942, elle est professeur honoraire de droit de la famille et des successions, ancienne députée au Grand Conseil vaudois, ancienne conseillère nationale.

Une réponse à “Marchands d’enfants, ça suffit!

  1. J’apprécie votre façon de voir les choses. L’achat d’un enfant ou la GPA est de plus en plus pratiqué, le plus triste dans tout cela, c’est que l’enfant en subira les pires conséquences et ceci commence dès son inscription à l’état civile.

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