Le revenu de base inconditionnel (RBI) : un instrument adapté à une sortie de crise ?

La tragédie sanitaire a l’insigne mérite de dévoiler les faiblesses de nos sociétés : dépendance économique envers la Chine ou l’Inde (médicaments), souffrances et pénuries dans les métiers du soin, agonie des PME, violences pour les précaires, etc. Une crise inédite sur fond d’urgence sociale et écologique qui appelle autre chose que le nième retour d’une proposition qui n’est jamais parvenue à convaincre : un revenu de base inconditionnel (RBI). Récurrente en période de crise, séduisante en théorie, cette proposition, dont les arguments pouvaient s’entendre dans les années 1990, puis partiellement en 2017, n’est plus audible en 2020. De quelle pertinence est-elle quand les emplois font défaut dans les hôpitaux comme dans les champs ?

Un système économique problématique
Le principal problème, c’est que nos sociétés dépendent d’un système économique qui dépend lui-même encore à 80% des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), dont on doit impérativement sortir pour éviter une augmentation de plus de 2° avant le mitant du siècle. Nous sortirions d’un tunnel de variations des températures auquel toutes les espèces se sont acclimatées depuis des millions d’années. Au-delà ce seuil, les conséquences déjà perceptibles, que l’on songe à l’Australie, pourraient devenir insupportables. Nous menacent en effet des effondrements régionaux des rendements agricoles et des écosystèmes. Protéger le climat, c’est donc protéger le vivant.
Toutefois, sortir du fossile trop vite est un problème économique et social immédiat. Et ne pas en sortir, un problème pour la survie de l’espèce. La donne n’est pas agréable à jauger ; mais elle n’est pas insurmontable. Pour peu que l’on prenne en compte ces deux temporalités en évitant les pièges d’une relance économique « à n’importe quel prix ».
Ce dont nous avons besoin, nous l’éprouvons en ce moment : un système alimentaire durable, de qualité et de proximité, assurant la production et la distribution en quantités suffisantes pour tout le monde ; une économie relocalisée afin de s’assurer une plus grande autonomie. Sortir d’une crise inédite appelle des réponses inédites. Cela exclut le RBI.

Les dangers du RBI
La revendication d’un « droit à un revenu inconditionnel » tiré de la nature à dépenser comme on le souhaite, a été énoncée au 18e siècle par Thomas Paine. Revendiquer un droit sur la Terre, cela se discute. Quid de nos devoirs envers cette Terre, pour protéger le vivant ? Au nom de quel droit devons-nous approuver le modèle économique – édifié non sans paradoxe en modèle archétypal – d’un RBI financé en Alaska par l’exploitation du pétrole ? Une idée approuvée par des gouvernements ultra-libéraux, dont ceux à la tête des plus puissants pays, encouragent l’exploitation du pétrole non conventionnel, mais aussi la production de charbon et la déforestation au mépris des impératifs écologiques. Au mépris donc du vivant.
En outre, le sort réservé aux plus précaires n’émeut guère, alors qu’elles et ils sont touchés de plein fouet par les conséquences de la robotisation et de l’introduction massive d’algorithmes : au nom de la rentabilité, il faut remplacer le maximum d’êtres humains, à commencer par les moins qualifiés devenus « inutiles ». Et pour éviter les troubles sociaux, l’argument de leur verser un RBI est largement répandu dans les milieux de la Sillicon Valley. Une double aubaine pour l’ultralibéralisme de stopper toute autre aide sociale, en misant sur un taux d’imposition unique dans certains cas, tout en s’assurant de la relance de la consommation du marché des voiture ou de la junk food, peu importe la santé des humains et de la planète. Tout est bon pour relancer la croissance et ne surtout pas remettre en question le paradigme économique dominant.
Bien sûr, d’autres arguments en faveur du RBI ont été avancés par les théoriciens dans les années 1990, dont le développement d’une société de pleine activité. Mais soyons lucides. Nous ne sommes plus dans le monde des années 1990 ! On croyait encore au développement durable, au découplage grâce aux seules technologies pour nous sortir de l’ornière pointée par le GIEC ou l’IPBES.
Aujourd’hui, compte-tenu du triple contexte social, écologique et politique, est-ce bien raisonnable de ressortir des tiroirs sans recontextualiser, cette très vieille idée de verser inconditionnellement un revenu à tout le monde, aux soignants et aux agricultrices comme aux traders et aux pilotes de ligne ? Au nom de la transition en prime, pour laquelle on manque cruellement d’emplois rémunérés ? Des emplois et une reconnaissance que demandent les précaires aussi, indépendamment de l’aide immédiate plus nécessaire aujourd’hui que jamais avec un chômage massif probable.
Indépendamment de l’épineuse question des coûts (estimé à plus de 300 milliards d’euros selon Benoît Hamon en 2017), certains espèrent qu’il contribuera à refondre le système de protection sociale en place, auquel tiennent les précaires. Je repose la question : dans un contexte d’ultralibéralisme mondialisé, est-ce bien raisonnable ? Car ne soyons pas dupes, le RBI sera perçu comme une aide directe pour relancer la consommation ; argument avancé d’ailleurs par certains défenseurs du RBI dans un esprit de relance keynésienne.
Or cela est anti-écologique et donc anti-vivant : cette ultra-consommation est destructrice. Pour l’économie, pour notre culture, pour notre connexion au vivant, fondement de la spiritualité depuis des millénaires.
A quoi bon l’obsession d’un droit « universel », matérialisé par un simple versement monétaire individualisé, quand la décrue énergétique menace, quand l’habitabilité de la Terre n’est plus assurée pour les jeunes générations ?

Sophie Swaton

Philosophe et économiste, Sophie Swaton est enseignante-chercheure à l'Institut de géographie et durabilité de l'Université de Lausanne où elle coordonne le master en fondements et pratiques de la durabilité. Elle préside également la fondation d'utilité publique ZOEIN, signifiant vivre en grec, qu'elle a créée en 2017 pour promouvoir en Suisse et à l'étranger des initiatives solidaires de transition écologique et solidaire (https://www.zoein.org). Sophie Swaton co-dirige également la collection "Nouvelles Terres" aux Presses Universitaires Françaises, partenaire éditorial avec la Revue de la pensée écologique de la fondation Zoein.

23 réponses à “Le revenu de base inconditionnel (RBI) : un instrument adapté à une sortie de crise ?

  1. Je n’y comprends que pouïc.

    Vous êtes contre le RBI (revenu de base inconditionnel), et là dessus je vous donne raison. Car cette idée me paraît utopique et insensée, ce que j’ai essayé d’expliquer à votre collègue Dorota Retelska, qui semble avoir fumé la moquette. Mais là où je ne comprends plus rien, c’est quand vous vous déclarez pour le RTE, (revenu de transition écologique). Là je cale. Car pour moi c’est exactement aussi utopique et farfelu que le RBI et pour les mêmes raisons. Je ne vois pas la différence entre les deux. Dans les deux cas on paie des gens pour autre chose qu’un emploi réel, économiquement justifié et viable, que seul peut donner le marché du travail dans une économie libre. Donc, pour moi, dans les deux cas c’est de la foutaise.

    Ou alors, peut-être que vous croyez qu’on peut décider comme ça, dans un bureau, qu’à partir de maintenant on va entamer une “transition écologique”? Et en quoi est-ce que ça consisterait ? Pouvez-vous m’expliquer svp, parce que sincérement, je ne comprends pas.

    Ca n’existe pas des choses pareilles. Jamais dans l’histoire du monde on n’a décidé d’entamer une “transition” quelle qu’elle soit. Ni une transition néolithique, ni une transition de la machine à vapeur, ni même une transition nucléaire quand Giscard et d’autres ont décidé de s’équiper de centrales nucléaires ce qui etait, peut-être, une erreur. En revanche, il existe des évolutions économiques, technologiques, qui sont les conséquences aléatoires et tâtonnantes d’une conjonction d’inventions scientifiques (la machine à vapeur, le moteur à explosion, la fission nucléaire, un jour peut-être la fusion), de découvertes géologiques (pétrole, uranium) et de besoins économiques (expansion, nécessité de créer des emplois).

    Les gouvernements essaient de suivre le mouvement et de le guider un peu. Mais ils ne sont jamais moteurs. Ils sont comme Scapin. Ils disent: “puisque ces mystères nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs!”.

    Et puis parfois il y a des échecs, on s’aperçoit alors qu’on a fait fausse route et on abandonne une technologie obsolète. On a abandonné le silex, la marine à voile, le moteur à vapeur. On abandonnera peut-être le nucléaire. Et encore, j’en doute. Mais on n’abandonnera jamais le pétrole, aussi longtemps qu’il y en aura assez et qu’il ne coûtera pas cher. Il ne faut pas rêver. Tous ces gens qui croient qu’on va se passer des combustibles fossiles ne voient pas la réalité. Jamais l’industrie pétrolière ne cédera sa place, alors qu’elle domine les Etats et les grandes puissances. L’écologie est financée par la famille Rockfeller, c’est à dire par EXXON, et vous croyez qu’on ca abandonner le pétrole? Ha ! Ha ! Ha !

    En aucun cas on ne saurait promouvoir mondialement un modèle théorique, tiré des cogitations d’intellectuels en chambre et de têtes d’œuf. Ces processus échappent totalement aux gouvernements. Et à plus forte raison à un gouvernement mondial qui n’existe pas et, en soi, est déjà une utopie.

    Et maintenant voilà qu’on a de jeunes et jolies philosophes, “chercheuses” à l’UNIL, qui dans la quiétude de leurs bureaux, bénéficiant de la richesse économique extraordinaire de la Suisse, et de l’esprit déconnecté du réel des hauts fonctionnaires de la Confédération qui votent les budgets, prétendent tirer des plans sur la comète en alignant des noix sur un bâton.

    Ca n’est pas sérieux. Ca ne tiendra pas la route. Les choses ne se passent pas comme ça. Redescendez sur terre. Vos théories, ça n’existe pas “in the real world”.

    C’est inouï à quel degré cet esprit post-moderne complétement déjanté qui règne entre Dorigny et SaintSulpice a réussi à créer un monde imaginaire totalement irréel. On nage en plein délire!

    C’est très inquiétant.

    P. S. Mes excuses aux habitants sensés de Dorigny et Saint Sulpice (il y en a, sans doute, à condition qu’on fasse abstraction des gens de l’UNIL, EPFL, IDEHAC, etc.) je n’aurais pas dû médire de Dorigny ni de Saint Sulpice, parce qu’à Fribourg ça n’est pas mieux. Le prof Sergio Rossi défend aussi le RBI!

    1. Bonjour,
      Oui en effet je confirme que vous ne comprenez pas la proposition de RTE que je ne développe pas dans ce blog-ci, mais je vous renvoie à celui sur les emplois de la transition (si vous ne souhaitez pas passer par Dorigny pour emprunter mon dernier ouvrage, sur la manière dont s’opérationnalise le RTE de manière très concrète sur les territoires); il est possible aussi de consulter les nombreux articles en ligne sur le sujet. En une phrase de résumé, le RTE est lié à l’hypothèse que l’on ne manque pas de travail mais d’emplois rémunérés, avec la perspective de développer de nouveaux modèles économiques inscrits dans les limites planétaires comme cela se fait déjà. Pour le voir, il faut sortir justement de son bureau (d’ailleurs si vous passez à l’UNIL vous risquez de ne guère m’y trouver autrement qu’en cours, en réunion ou en rdv avec les étudiant.e.s et actrices et acteurs du terrain car je visite les lieux et parlent avec celles et ceux qui font pour comprendre les freins et les leviers d’action, dont celui indispensable des collectivités et gouvernements). Et discuter avec les personnes qui sont déjà en transition, vous permet de ressentir sans parler à leur place qu’elles et ils n’attendent aucune injonction à le faire. Cela s’appelle de la recherche-action. Quant à la sortie des énergies fossiles, on sait bien que cela est impossible à faire d’un trait mais il le faudra bien : le pic pétrolier est atteint et l’effet Senèque arrive à grand pas. Aujourd’hui, le pétrole n’est même plus stockable ! Et ne sous-estimons pas le poids des mouvements citoyen.ne.s qui seuls peuvent forcer les gouvernements à défendre courageusement des politiques publiques nécessaires à notre survie. Le réchauffement climatique est inéluctable, ce que ma collègue Dorota Retelska montre bien. Et oui, la transition c’est aussi la place nouvelle que prennent les femmes, dont dans la recherche fondamentale. Peut-être que le commentaire que vous vous autorisez sur le fait du “jeunes et jolies” et des guillemets pour parler de femmes “chercheures” trahit une forme de refus de cette transition. Mais il faudra apprendre à faire avec, comme vivre dans votre propre bureau avec une température de 45 degrés et l’angoisse de prochaines pandémies. Que l’on nie cela sans prendre connaissance des propositions de celles et ceux qui font, voilà moi ce qui m’inquiète. Mais je garde espoir. Car Greta du haut de ses 16 ans fait la leçon à un Trump dépité, qui finira peut-être par s’empoisonner de ses propres injonctions…et sans besoin d’accuser des femmes de sorcellerie.

    2. Le RBI et le S/RTE n’ont rien à voir l’un avec l’autre (Sophie l’a bien mentionné lors de présentation – pas débat) RBI versus S/RTE (mais alors SOSW pourquoi s’acharner à le déconsidérer, décrédibiliser ? SI le S/RTE est si intéressant aucun besoin de l’opposer au RBI ) ! Le RBI concerne tout les citoyens et pas le S-RTE qui ne concerne que quelques privilégiés qui s’orienteraient vers l’écologie permettant ainsi à d’autres de reprendre l’ancienne place, emploi ou activité qui a été abandonnée (donc aucun gain écologique car juste un changement de personnel) ! LE RBI représente une mesure, un outil civilisationnel qui n’a été encore vu nulle part (le sens véritable d’utopie qui ne signifie donc pas impossible) et possède un sens car il permet de supprimer la pauvreté qui entraîne des coûts socio, écolos et économiques très importants. Le RBI garantit le respect de la sphère privée, il assure, garantit et sécurise un socle de vie décent à tous les habitants, retraités inclus. Le RBI valorise toutes les activités non-rémunérées, bénévolat, éducation des enfants, tâches ménagères, personnes à charge, culture etc…
      C’est bien le RBI qui représente l’outil permettant la transition écologique car il ne coûte pas un sou à la collectivité ! Aucun frais de fonctionnement, salaires, moquette, chauffage, entretien, nettoyage, surveillants, contrôles etc. un clic de souris pour toute l’existence.
      Le RBI est inéluctable ; tout comme l’avs malgré 2 votations perdues est devenu une évidence pour toutes-tous.
      Le RBI est simple, écologique, efficace et solidaire !
      Le RBI l’essayer c’est l’adopter !
      Le RBI parce que nous le valons bien !

    3. Bonjour,
      Je n’ai pas non plus tout compris mais je crois que cela veut dire qu’il va falloir mettre le tailleur au vestiaire, se retrousser les manches et commencer à bêcher le jardin…tout en recevant une pension minimum ou alors des tickets de rationnement pour pouvoir s’acheter de l’huile et du sucre. J’ai écouté une interview de Claude Lévi-Strauss récemment où il parle de ses études sur le Néolithique, étant jeune, et où il mentionne, je crois, que des chercheurs auraient même découvert des preuves de cannibalisme à cette époque…Des amas d’ossements avec preuve de démantèlement de la colonne vertébrale d’humains par des humains pour en extraire la moelle à des fins de consommation personnelle. Donc, ma conclusion est la suivante : au boulot vite avant que nos anciens instincts ne refassent surface, et que l’on commence à regarder son propre voisin comme une source potentielle de nourriture. 💗🌿🌍🙏🏼🤔😂

  2. Bravo, chère Sophie, vous êtes une visionnaire et votre projet tombe pile-poil avec la situation.

    Mais les politiques, Confédération, Cantons, Communes, sauront-ils le comprendre?

    That’s the Question… (Banks too big again, Traders on the Moon, Easyjet, Real Estates, aso???)

  3. Chère Madame,
    Merci pour cet article et pour les nombreux autres toujours inspirants.
    Je ne suis guère compétent dans le domaine mais ne serait-il pas possible que ce RBI soit conditionné comme on aimerait (on peut toujours rêver…) le voir pour les aides allouées aux entreprises de l’aviation?
    Personnellement, cela m’aiderait à accentuer certains aspects non rentables de mon activité et ainsi pouvoir mieux valoriser la transmission de savoirs et savoir-faire (je suis cultivateur-cueilleur de plantes médicinales en agroécologie et vannier et enseignant dans ces domaines).
    Avec mes remerciements

    1. Bonjour ! Oui je vous suis complètement !
      Merci pour votre apport et tout de bon pour la suite de vos activités dont on a immensément besoin

    2. Monsieur Mathieu,
      Le RB-Inconditionnel ne peut pas être conditionné sinon cela corresponds à un revenu conditionnel et pas un RBI. L’intérêt du RBI réside justement en son inconditionnalité et donc une absence de coût pour sa redistribution. Artistes, intermittents spectacle, paysans, exploitants agricoles, entrepreneurs, retraités, bébés, invalides, le care (enfants-parents), allocations parentales (divorce) seraient facilités, favorisés, sécurisés et coûteront beaucoup moins cher à la collectivité grâce à l’inconditionnalité.
      Le RBI représente la meilleure solution pour la modernisation, oxygénation et pacification du contrat social (Rousseau reposes tranquille). Le RBI représente un projet civilisationnel et ne représente pas un projet infra-politique : ni un projet de droite ni un projet de gauche (victimes tous et tout autant de la nemesis-vengeance bureaucratique et partisane). Le RBI représente un simple outil administratif, une espèce “d’application” (donc ni de droite ni de gauche) comme un tournevis ou une pelle ou la corde qui pends un gaucho ou droitos ne sont ni de droite ni de gauche. Le RBI est inéluctable ; tout comme l’avs malgré 2 votations perdues est devenu une évidence pour toutes-tous.
      Le RBI est simple, écologique, efficace et solidaire !
      Le RBI l’essayer c’est l’adopter !
      Le RBI parce que nous le valons bien !

  4. Bonjour,
    Merci pour ce très bon article, inspirant comme d’habitude.
    Ne peut-on pas imaginer un RBI sous conditions pour les personnes et un RTE pour les collectivités?

    Personnellement et comme nombre de proches, je consacre une toujours plus grande part de mon activité (cueilleur-cultivateur de plantes aromatiques et médicinales en agroécologie) à des pratiques (de soin, d’attention, de tests etc…) non-rentables, par conviction. Il s’en suit forcément une toujours plus grande insécurité quant à des revenus déjà faibles. Mais le sens de ces pratiques est plus fort que la crainte du lendemain. Je fais aussi partie de structures où l’engagement selon les mêmes valeurs est collectif (association d’instruction hors établissement scolaire par exemple). Les deux dimensions, individuelle (mais pas individualiste) et collective me paraissent indissociables.

    Merci pour vos travaux, précieux.

    1. Bonjour et merci encore pour cette précision en effet de taille pour lier dimension individuelle et collective. Aucune mesure ne passera sans la perception par la majorité qu’elle est “juste”. Et de ce fait, aucun système tout aussi nouveau soit-il ne doit mettre en péril les acquis sociaux. Le RTE doit être en effet une aide en plus pour aider à l’émergence de modèles économiques résilients, dont ceux liés à la souveraineté alimentaire. Merci à vous (et toutes et tous les autres) qui devrait être sécurisé sur tous les plans pour avoir l’énergie de continuer. C’est la notion même de soin, de care qui est au centre de cette transition en marche..

  5. Chère Sophie et chers camarades,
    je suis ce blog depuis peu et je me sens en général en phase avec les propos exposés. Aussi, bien que je ne sois pas une habituée des discussions publiques, j’aimerais tout de même participer à celle-ci.
    Je comprends le côté pervers du RBI que vous exposez là.
    Cependant, je me suis toujours fait la réflexion qu’il fournirait l’occasion à certaines catégories de personnes qui représentent, selon moi, une grande partie de la population de nos sociétés occidentales, de passer d’une utilité discutable (agent de chaîne de production, ou autre métier qui rend les gens malades à long terme) à une activité qui correspond davantage à leur être et à la construction d’un monde plus positif. Dans mon idée, il serait fourni avec des mesures d’accompagnement permettant de susciter les réflexions sous-jacentes (qu’est ce que j’aime faire, vraiment, quels sont mes points forts, dans quel monde j’aimerais vivre, etc.).
    Et le temps actuel est opportun – avec cette pandémie, une grande partie de la population a réalisé, ou réalise doucement, que la “vie normale”, cette vie de consommation irraisonnée, n’a plus vraiment de raison d’être, et souhaite prendre un nouveau départ… Mais elle a besoin de soutien afin de se sentir de taille à relever ce défi.
    Merci pour la place à ces simples réflexions…

    1. Bonjour et merci pour vos réflexions qui ne sont pas simples du tout ! Au contraire, ce que vous décrivez n’est justement pas un RBI mais un appui pour des activités précisément orientées (en prime avec un accompagnement que je ne cesse de revendiquer comme fondamental sur la base de ce que demandent les personnes et précaires et en transition) vers une autre société plus solidaire et j’ajoute, inscrite dans les limites planétaires en deçà desquelles la survie de l’humanité n’est plus assurée…

  6. Mettons en place le revenu universel de base sans conditions de ressources et cumulable avec d’autres salaires et prestation et ce, au plus vite en cette période de confinement et de coronavirus car ce systéme que nous connaissaons ne marche plus. L’économie mondiale s’effondre la notion de “travail”ne veut plus rien dire et est synonyme de souffrance regardez les gilets jaunes…Dans peu de temps la moitié des métiers disparaitront car remplacés par des robots…!Aprés cette période de coronavirus.Il est temps de créer un autre monde basé sur l’échange,la justice sociale,la bienveillance,lutte contre les inégalités terminé ce systéme libéraliste injuste qui creuse des dettes aux pays pauvres qui creuse les inégalités la faim dans le monde… il est temps de mettre en place le revenu universel de base et le monde se portera mieux les gens seront heureux d’aller travailler et/ou de faire du bénévolat ! VIVE LE REVENU UNIVERSEL iNCONDITIONNEL !

    1. Si les ressources étaient illimitées, le travail pour la survie de notre espèce (l’alimentation, les métiers du soin notamment) inutile, alors plus aucun revenu ne serait nécessaire ! Mais ce n’est pas le cas et ce que les gilets jaunes démontrent c’est l’importance justement de lier écologie et social ! Vive le travail choisi plus agréable qu’un loisir subi et activons nous dans le soutien aux emplois de la transition sans lesquels ce sera le mur assuré..

  7. Bonjour Sophie,

    Un plaisir de lire ton analyse. Je me place dans l’idée que nous contribuons tous à la richesse de la société quelles que soient nos activités, et que le revenu de base est versé en contrepartie de cette création de richesse. Il est ainsi justifié. Nous sommes actuellement dans une obligation d’exercer un travail rémunéré et le grand enjeu du siècle est d’en sortir, pour retrouver notre capacité de jauger notre production marchande : plus ou moins, reposer la question du besoin : « quel est le besoin de produire toujours plus, toujours trop ? » Pour cela, un revenu de base organisé d’une façon qui permette de se passer moralement et financièrement durablement d’un travail rémunéré, est une solution qui répond au double enjeu social et environnemental. C’est en tout cas, la société dans laquelle je souhaite vivre.

    Maintenant, est-ce réaliste ou judicieux dans un contexte « d’ultralibéralisme mondialisé » ? Nous sommes enchaînés à la course à l’armement productif, à la compétitivité des entreprises, à l’obligation de croissance économique, délocalisation et spécialisation des États, perte d’autonomie, etc. Il serait suicidaire pour nos économies européennes d’imaginer instaurer progressivement un revenu de base construit pour se passer « durablement d’un travail rémunéré » ; sans qu’il s’inscrive dans un projet politique plus large, courageux et ambitieux : forte répartition des richesses, lutte contre l’évasion fiscale, protectionnisme social et écologique, remise en cause du libre marché, des traités européens et des institutions monétaires, nécessité de rebâtir de la résilience, investissement écologique, relocalisation, etc. Le revenu de transition écologique est à ce titre vraiment intéressant, il est plus consensuel, réaliste et porteur d’une orientation de transformation sociale et écologique. Cela dit, il perpétue une obligation de « croissance économique verte et sociale » qui à plus long terme n’est selon moi pas viable. Je n’oppose pas l’un et l’autre, ils ont tous les deux le mérite de soulever les bonnes questions ! Le RTE est possiblement une première étape vers un authentique revenu inconditionnel et universel, qui philosophiquement emportera toujours mon intérêt : « marcher avec ma bien-aimée au bord d’un cours d’eau, main dans la main », est une immense richesse qui contribue à la société.

    Amitiés,
    Solenne

    1. Bonjour Solenne et merci pour tes réflexions à toi aussi, c’est dans le dialogue que l’on avance et c’est toujours un plaisir d’y participer ! Oui, le RTE pourrait être une première étape URGENTE avant un RBI, mais même pas besoin de RBI du tout si, contrairement à ce que tu exposes, c’est une décroissance qui est mise en oeuvre. Justement, le RTE n’est pas juste un revenu individuel et monétaire comme le RBI mais un outil parmi d’autres (cf. les 35 propositions formulées avec mes co-auteurs dans la revue de la pensée écologique), basé sur les limites planétaires et la nécessité de protéger les emplois émergents de la transition, emplois que demandent les plus précaires aussi (pas seulement un revenu). Un RTE s’expérimente non dans le choix individualisé qui ressemble à s’y méprendre à la liberté revendiquée de consommer ce que l’on veut mais dans une organisation qui trouve ses racines dans l’écologie sociale du 19ème siècle, actualisée avec des coopératives de transition (en cours de constitution sur 2 territoires en France) incluant toute forme juridique propice à la gouvernance de “communs”. On ne peut guère faire plus opposé à “la croissance verte” qui serait elle au contraire renforcée par un revenu versé inconditionnellement. Pour ton info, en Suisse ce lundi, les gens ont fait plus de 1h30 de queue en voiture pour aller manger un hamburger…Si tu rêves de pouvoir “marcher avec ta bien aimée au bord d’un cours d’eau”, ce que je trouve magique et poétique, il faudra s’assurer que ce cours d’eau ne soit pas asséché dans la prochaine décennie ou pollué par les pesticides et autres. C’est la conscience de cette urgence là qui est au coeur d’un outil comme le RTE. Sans cette conscience des enjeux qui se jouent, alors on rate – comme les purs militant.e.s du RBI qui voient dans toute autre alternative concrète et toute mise en garde, pourtant justifiée, une menace pour une proposition relevant d’un idéal identitaire- le véritable tournant du siècle : celui d’une autre civilisation. Pragmatiquement et philosophiquement, le droit à un revenu est conditionné par les activités que nous saurons ou pas mettre en oeuvre pour la survie première de nos ressources qui impose le bon sens d’un devoir réciproque premier de protéger la terre, incluant nous-même et surtout nos enfants ! Amicales pensées

  8. Bonjour,
    Que de richesses dans ces commentaires de personnes passionnées et désireuses de changements. Je viens de découvrir votre blog par hasard car je ne connaissais pas vos travaux sur ce sujet. De même que je vous écris sans avoir lu tout vos articles ou ouvrages. Fan de Géopolitique, d’Histoire et de Généalogie, je suis comme vous et souhaite que notre société actuelle englobe plus d écologie et d humanité. J échange beaucoup avec des jeunes qui ne se retrouvent pas dans cette société car ils sont convaincu de la fin de notre système économique incluant la problématique du climat.
    Et je suis pour l ensemble en accord avec vous et particulièrement sur le fait que la communication augmente les possibilités de trouver les bonnes Solutions.
    Il y a quelques années sans connaître le travail ou la réflexion de chacun, j ai énuméré devant un public averti politiquement un communisme libéral, mais ces gens éduqués par leurs idées avec lesquels ils ont conçu leurs carrières n étaient pas du tout réceptifs à un changement d idées ( La!, je rejoins le Tout premier commentaire).
    Ce «  communisme libéral » est pour moi un résumé de ma façon de penser mais n est pas celle de l ouvrage de Dominique Pelbois. Ce sont deux Mots qui représentent une proportionnalité d’actions dans une vie. Entre ce que l on doit et ce que nous souhaitons.
    Une partie rejoint votre RTE associé a la pensée « du droit de la terre »
    Le revenu universel dont certain parle pourrait être l équivalent d un RTE.
    Si l homme veut survivre il se doit de ne pas utiliser les ressources naturelles de la terre en 5 mois. Les hommes ont donc TOUS pour obligation de préserver cette terre et donc d entretenir ses réserves naturelles. Pour cela il faut que TOUS soient obligés quelques soit leur rang social d utiliser un tiers de leur temps pour participer à une culture alimentaire locale ( cela évite les déplacements de marchandises à travers La planète). Le reste de son temps peut être utilisé pour sa capitalisation personnelle avec son métier principal. Évidemment tout travail mérite salaire, mais ce dernier devraI être proportionnel au coût de la vie, pour que personne ne soit lésé.
    Je me permets d apporter mon avis sur le RTE.
    Sa gestion ne doit pas dépasser les limites Communales, (2 a 3 maximum selon la densité) car Il doit être encadré, accompagné et orienté pour en faire bénéficier ses administrés.
    Aujourd hui, nous sommes au 21eme siècle, bientôt nous marcherons sur Mars et nous sommes incapables de gérer nos ressources malgré toutes les technologies avancées que nous avons créés. L Homme ne sait pas utiliser à bon escient ses créations sauf a titre individuel pour son profit. Pourtant des solutions existent depuis bien longtemps. Il suffit que chacun soit conscient pour être acteur. Là nous sommes dans l éducation. Mais pour sensibiliser il faut convaincre avec des solutions simples et efficaces, et il y en a. Seule la volonté des décisionnaires permettra un avancement rapide. Sans ces appuis il faut commencer petits pas par petits pas qui finiront en un grand pas pour l humanité.
    Notre futur devrait utiliser les technologies pour que chacun puisse avoir un peu plus de temps pour soi ou sa famille sans diminuer sa qualité de vie, voir l augmenter.
    Je vais m arrêter ici car votre RTE influe sur tellement de domaines différents qu’on ne peut tous les traiter pour le valoriser.
    Encore Bravo! pour vos pensées et réflexions.
    Une question pour finir sans s’égarer du sujet : Pourquoi les arbustes et arbres fruitiers ne sont ils pas préconisés sur les territoires communaux?
    Se promener à deux main dans la main c est bien! Tout en dégustant la nature, c’est mieux!
    Dans l espoir que vous avez apprécié la lecture de ce commentaire.
    Très sincères salutations.
    Christophe

    1. Mille mercis à vous surtout pour ce commentaire très inspirant et mes excuses pour la publication que je découvre tardive (je ne suis as très douée en informatique..). Au plaisir de voir les arbres fruitiers préconisés sur les territoires communaux 🙂 Très solidairement, Sophie

  9. Bonjour Sophie.
    Oublions un instant la “philosophie” du RBI (Revendiquer un droit sur la Terre par exemple).
    Mettons le sous condition de ressources ( ne le perçoivent que les personnes ayant un revenu en dessous d’un seuil), mais conservons le principe d’absence de contrepartie (pas d’obligation de travailler).
    Cela pourrait alors devenir un outil de forte réduction de la pauvreté (des jeunes, suppression du non recours dans le cas du RSA).
    Présenté ainsi, le “RBI” vous paraîtrait-il une idée à creuser ?
    Cordialement.
    Stéphane.

    1. Cher Stéphane,
      je vous remercie pour vos commentaires et oui le RBI reste pour moi un outil intéressant mais dont les finalités ne sont pas hiérarchisées ce qui pose problème dans le contexte de la crise écologique et sociale que nous traversons. Nous n’avons que 10 ans devant nous pour agir !! C’est ce que ne comprennent pas toujours malheureusement les défenseurs coûte que coûte d’un RBI sans le voir comme un simple outil dont l’utilisation dans un contexte néo-libéral ultra dominant avec tentation de suppression des aides sociales et des relations pourtant voulues par les précaires de dialogue et face à face social, peut s’avérer une très mauvaise idée car il manque une étape. De fait, le philosophie de départ ne peut être écartée : quid de la revendication du droit des précaires quand prime celle d’un droit sur la Terre ignorant superbement ce que les scientifiques pointent et qui nous menacent universellement et injustement pour les pays du Sud en prime ?

      1. Bonjour Sophie et merci pour votre réponse 🙂

        Mais je dois vous l’avouer, je ne suis pas certain de vous avoir bien comprise.
        Puis-je me permettre d’essayer de reformuler ?

        Ainsi, le principal inconvénient (danger même écrivez-vous), du RBI serait d’entrainer un accroissement de la consommation avec comme conséquence une augmentation de l’exploitation de la Terre (ce qu’il convient d’éviter). Est-ce bien cela ?
        Mais vous faites aussi référence aux plus précaires. Dans ce cas, quelles seraient vos propositions pour concilier préservation de la Terre et éradication (ou forte diminution) de la pauvreté ?
        Le RBI est-il définitivement à exclure ? Et si non, comment, selon vous, faudrait-il le faire évoluer pour atteindre ces 2 objectifs ?

        Bonne fin de journée à vous.

        Stéphane

      2. Le RBI est une idée généreuse à la base, mais si elle peine à se concrétiser c’est sans doute qu’elle ne prend pas en compte le mécanisme d’incitation dont les individus ont besoin pour fournir un effort adéquat afin de trouver leur place dans une société fondée sur le travail et le mérite. Ainsi il n’est pas absurde d’affirmer qu’ avec un revenu universel fournissant un minimum vital à l’individu ad vitam aeternam , on risque de le décourager à fournir des efforts pour se former.
        Cependant avec la crise sanitaire que nous connaissons actuellement avec son océan d’incertitudes, la mise en place d’un revenu universel temporaire ne semblerait pas être une idée saugrenue, sachant que de nombreux Etats européens ont mis en place un dispositif de chômage partiel qui comporte de nombreux avantages tant pour les entreprises que pour les salariés. Ainsi les entreprises conservent un lien juridique avec leurs employés bénéficiant du chômage partiel et en cas de reprise elles font des économies substantielles en s’évitant les coûts d’ajustement ( coûts de licenciement, de recrutement, de formation). Quant aux employés, ils évitent le risque de subir une érosion de leurs compétences notamment en cas de chômage de longue durée. Le chômage partiel amortit la chute de la consommation des ménages, mais il n’exclut pas l’augmentation de l’épargne de précaution au plan global, tout particulièrement quand les acteurs économiques anticipent une détérioration du marché du travail en l’absence d’un vaccin ou d’un traitement efficace contre le virus.

        Par ailleurs il faut s’attendre à ce que la crise sanitaire accélère le processus de robotisation et de mécanisation en réaction aux coûts liés aux normes sanitaires et à la nécessité de relocaliser certaines activités jugées stratégiques. Cette substitution forcée du capital au travail pourrait engendrer de sérieuses difficultés à notre système de protection ( assurance-chômage, caisses de retraites, assurance-maladie). En effet les robots travaillent pour leurs propriétaires en l’occurrence les actionnaires, en plus ils ne craignent pas le virus et ils ne font pas grève. C’est pourquoi nous devrions revisiter le système fiscal actuel, mettre en place un revenu universel temporaire et accentuer l’effort de formation, sans perdre de vue l’idée selon laquelle le progrès technique reste favorable à l’emploi et à l’élévation du niveau de la qualification de la main-d’oeuvre. En tout cas ceux qui veulent justifier l’introduction du RBI par la fin du salariat comme l’a montré le débat en Suisse,lorsque cette initiative a été lancée en vue d’une votation, se trompent de combat.

  10. De quel travail parler vous ? Celui qui est de plus en plus effectué par des robots au détriment des humains ?
    S’il y avait effectivement assez de travail pour tous, mais payé correctement. La question d’un RBI ne se poserai même pas !
    Mais la réalité est totalement différente, ce ne sont pas les gens qui travail qui s’enrichisse au contraire ! Ils s’appauvrissent de jour en jour !
    Les riches eux jouent à la bourse, ne paient pas d’impôt sur leurs gains et deviennent de plus en plus riche

Les commentaires sont clos.