En partie grâce à l’avancée des Vert.e.s, parti très féminin, mais pas seulement, la proportion de femmes élues au Conseil national a fait un bond en avant de dix points, atteignant les 42%. C’est formidable. Ce qui me réjouit un peu moins, c’est la confusion qui règne sur ce sujet, déjà depuis bien avant les élections, entre les termes représentation et représentativité, souvent utilisés comme s’ils étaient interchangeables. Or, la notion de représentativité concerne uniquement les élu.e.s : sont-ils ou elles représentatifs de la population, ou d’une catégorie particulière de la population (les paysans, les ouvriers, les personnes LGBT, les femmes ou tout ce qu’on veut ?). Si oui, la représentation de ces catégories est assurée, si non elle ne l’est pas. Parler de la représentativité des paysans, des ouvriers, des personnes LGBT ou des femmes, ça ne veut rien dire.
Mais ce qui m’agace encore plus, c’est la totale absence d’une réflexion clairement posée quant au fait de savoir qui les élues représentent en leur qualité de femmes. On semble généralement sous-entendre qu’elles représentent les autres femmes. La parité en politique serait indispensable à la réalisation d’une vraie démocratie parce que la moitié féminine de la population a le droit d’être représentée au Parlement à égalité avec sa moitié masculine. On peut le dire comme ça, mais pour saisir le sens profond de la revendication de l’égalité des sexes en politique il faudrait le formuler autrement.
Ce qu’a signifié, en Suisse et dans toutes les autres démocraties représentatives, l’accès des femmes au droit d’être élues, c’est l’accès au droit de devenir des représentantes du peuple en général, et pas seulement des femmes qui en font partie. L’idéal d’un Parlement paritaire, ce n’est pas l’idéal d’un Parlement où les femmes suisses seraient autant représentées que les hommes suisses, c’est l’idéal d’un Parlement où la population suisse dans son ensemble serait représentée par un nombre égal de personnes issues des deux grandes catégories qui la composent. Ce qui est très différent.
On en finirait ainsi avec les ridicules interrogations sur le fait de savoir comment Magdalena Martullo-Blocher et Adèle Thorens peuvent représenter la même catégorie de la population. Elles ne la représentent pas. Il importe qu’elles soient là en tant que femmes, elles et les autres élues d’aujourd’hui et de demain, uniquement au nom d’une équitable répartition du pouvoir entre les sexes, pas au nom de ce qu’elles vont en faire.