La crise immobilière est proche en Suisse

La crise économique globale induite par la pandémie du nouveau coronavirus aura un effet dramatique. Non seulement sur le marché du travail et le marché des produits, où l’on peut déjà observer clairement les premiers signaux d’une grande dépression d’envergure mondiale, mais également sur le marché immobilier, qui sera aussi durement frappé par la crise, pour au moins deux raisons.

D’un côté, de nombreuses personnes ne pourront plus payer le loyer de leur propre logement, suite à l’impossibilité de recevoir un salaire suffisant pour assurer le minimum vital, parce que l’entreprise qui les avait engagées aura fermé ses portes ou renoncé à demander un crédit bancaire, considérant le risque de ne pas pouvoir le rembourser, même si le taux d’intérêt est nul. Pour un nombre important de petites ou moyennes entreprises, ce risque s’étend aussi au remboursement des prêts hypothécaires qu’elles avaient obtenus pour acheter les surfaces commerciales ou industrielles où elles réalisent leurs activités économiques.

De l’autre côté, les nombreux propriétaires de maisons auxquels les banques avaient octroyé des crédits hypothécaires considérant que leurs salaires étaient suffisants pour assurer le service de la dette, ne pourront pas payer les intérêts échus ni l’amortissement, suite à leur impossibilité de recevoir le salaire que la banque avait considéré pour leur octroyer une hypothèque.

Considérant le volume des prêts hypothécaires qui pourraient devenir inexigibles avant la fin de cette année en Suisse, il est évident que les banques sont très fragiles, même si la Confédération a offert un cautionnement sur une partie des crédits bancaires aux entreprises qui vont en faire la demande suite au nouveau coronavirus.

C’est aussi pour cette raison – au-delà de la volonté de soutenir les entreprises en difficulté à cause de la pandémie – que l’État, en particulier la Confédération, devrait augmenter de manière considérable les dépenses publiques, soutenant la demande sur le marché des produits, sans laquelle ni les entreprises ni les banques vont pouvoir enregistrer des bénéfices et verser des dividendes à leurs actionnaires (parmi lesquels se trouvent leurs propres dirigeants).

Au lieu d’offrir des cautionnements aux banques, la Confédération devrait mettre en œuvre un plan pour aider les personnes de la classe moyenne et de la classe inférieure à boucler les fins de mois, en leur versant un revenu de base inconditionnel grâce auquel même les loyers et le service de la dette hypothécaire de ces personnes pourra être payé régulièrement.

Lorsque cette pandémie sera seulement un terrible souvenir, l’on pourra alors constater que la dépense publique aura été moindre de cette manière là que si la Confédération continue à privilégier le secteur bancaire, négligeant le fait qu’on ne peut pas relancer l’offre si l’on ignore la demande et le marché immobilier.

Sergio Rossi

Sergio Rossi est professeur ordinaire à l’Université de Fribourg, où il dirige la Chaire de macroéconomie et d’économie monétaire, et Senior Research Associate à l’International Economic Policy Institute de la Laurentian University au Canada.

21 réponses à “La crise immobilière est proche en Suisse

  1. Vous avez totalement raison. Permettez-moi de compléter les risques concernant l’immobilier.

    Les taux négatifs ont permis un boom des hypothèques à prix cassés. Vu les débacles passées, des protections ont été mises en place pour limiter les risques (fonds propre en hausse, utilisation limitée du 2ème pilier, calcul de la capacité d’endettement sur la base d’un taux majoré, etc).

    Le risque d’insolvabilité lié à une forte hausse des taux est limité à moyen terme par le fait que de nombreux prêts sont bloqués à 10 ans.

    Par contre, les conditions générales des prêts hypothécaires ont été adaptées dans le sens d’une meilleure protection de la banque. Dans la plupart des cas, celle-ci peut demander le remboursement en tout temps du prêt en cas de perte de valeur du bien en caution (appel de marge) ou de baisse de la capacité financière de l’emprunteur (chômage). Certaines banques vont plus loin en reportant une partie du risque de refinancement lors de changements majeurs des conditions du marché.

    De plus, dans le cas d’un amortissement indirect avec un 3ème pilier, une défaillance de la banque induirait la perte du capital en dépôt mais sans l’annulation de la créance hypothécaire qui elle pourrait être revendue en tout temps à un tiers.

    Il n’est pas dans l’intérêt de la banque d’appuyer sur le “bouton nucléaire” qui l’entrainerait elle-même dans un crash avec ses clients. Mais il est possible que ces clauses soient exercées sur un segment de clientèle à haut risque qui serait contrainte de revendre son bien avec une perte des fonds propres de 20-25% (potentiellement racheté par un fonds de gestion des risques appartenant aux banques). Les Genevois qui ont vécu la crise des années 1990 apprécieront.

    Une femme avertie en vaut deux. Il est peut-être temps de relire les conditions de son contrat afin de se prémunir au mieux.

  2. Mieux que le revenu de base inconditionnel, Sophie Swaton a un projet de “revenu de transition” qui me parait idéal dans la situation actuelle.

    Il faudrait que Confédération et Cantons aident à ce projet, plutôt que de re-soutenir les banques, ce qui est insupportable, ou Esayjet et autres promoteurs immobiliers!

  3. Article beaucoup trop pessimiste. Le risque est là, mais les banques ont la possibilité d’aller jusqu’à renoncer provisoirement à collecter les intérêts hypothécaires, puisque le taux de financement réel des banques est négatif. Oui, peut-être les logements très chers, propriétés d’individus très impactés par la crise pourront connaître des problèmes, mais la majorité serait prête à vendre sa chemise pour payer les intérêts hypothécaires, car le loyer à fonds perdus sont au moins deux fois plus chers. Les banques peuvent ne rien demander et renouveler automatiquement les prêts hypothécaires. J’espère que vous allez me répondre. Merci

  4. Le RBI représente un outil bien plus moderne, rationnel, équitable, émancipateur, intelligent et naturel. Le RTE concerne une infantilisation des existences “si vous êtes sages vous aurez des images pour vos achats”… et si vous n’êtes pas sages ? combien cela va coûter à la collectivité ? allez-vous les mettre à l’amende ? les mettre en prison ? alors pourquoi les autres s’obligeraient ? La discrimination représenterait-elle des vertus écologiques ? C’est bien un RBI que nous méritons pour participer sereinement, aisément, tranquillement à la transition écologique ! pourquoi de-voir travailler pour avoir les moyens de la transition écologique !
    Le problème avec le RTE c’est que vous mettez la charrue avant les bœufs. On doit gagner des sous pour pouvoir participer à la transition. Le travail représente avant tout un coût énergie, temporel et financier ! Il est nécessaire de payer pour travailler (transports, investissements, assurances, financement des infrastructures etc.) et ce coût représente évidement une dette et un intérêt ! De plus le RTE entraîne un coût de gestion probablement « rocambolesque » ?
    Avec le RBI nous pouvons nous former, étudier, réfléchir, aider nos aînés, créer, écrire, faire le ménage en place de le faire faire par un autre qui devra engager plus de moyens ! Toutes ces activités ne peuvent pas être produites en travaillant ! Alors pour remettre les choses en ordre !
    Le RBI représente une mesure et un outil souple et adaptable à toutes les situations (toutes sortes de crises ou sans crise) moderne, intelligent, adapté, adaptable, aisément finançable, raisonnable, rationnel, judicieux, pacifique, pacifiant, simple, efficace, pertinent, réaliste, réalisable et équitable dont l’implémentation et mise en place peut se réaliser en 1 semaine ! Avec la caisse RBI le micro-prélèvement, modernise et simplifie le fonctionnement de la nation et l’interdépendance des citoyens en garantissant le respect de la sphère privée, on assure un socle de vie décent à tous les habitants, retraités inclus, on valorise toutes les activités non-rémunérées, bénévolat, éducation des enfants, tâches ménagères, personnes à charge, etc…
    C’est bien le RBI qui représente l’outil permettant la transition écologique car il ne coûte -contrairement au RTE- pas un sou à la collectivité ! Pas un seul fonctionnaire pour remplir la caisse RBI et pas 1 seul fonctionnaire pour la distribution du RBI !
    Le RBI est simple, écologique, efficace et solidaire !
    Le RBI l’essayer c’est l’adopter !
    Le RBI parce que nous le valons bien !
    Le RBI pour moderniser, oxygéner et apaiser aisément le contrat social, économique et écologique !
    Le RBI est nécessairement inconditionnel, apaisant et bienfaisant pour chacun-e !
    Je suis convaincu aussi que peut coexister = le RBI à 2500 chf (ça règle une bonne partie de la situation) et ensuite le RTE (un Salaire de transition écologique) puisqu’il s’agit bien d’un salaire et pas d’un revenu pour la assurer la dé-croissance tranquille ou accélérée ! le RTE serait possible et utile mais uniquement avec-grâce au RBI : mais inutile sans le RBI !
    Et puis sophie ne défends absolument pas son projet nulle part (ni site ni FB Zoein ni aucun médias) alors que je lui ai proposé nombreuses discussions suite à ses attaques concernant le RBI. Si j’affirme qqu. part que “mon truc est mieux qu’un autre” : la moindre des choses consiste à le prouver et accepter d’en débattre sereinement et pas juste faire des présentations universitaires (indice h) !

  5. Un projet de société d’une telle ampleur devrait penser à presque tout, or vous n’expliquez pas comment “ça marche” au juste, qui finance? comment rémunérer le travail et le capital? et s’il faut mettre fin à la libre circulation pour que la Suisse ne devient pas le pays le plus peuplé en Europe, etc…..Le projet que vous nous proposez est enfantin et il est certainement né dans la tête d’un groupe de fainéants et d’enfants gâtés.

      1. MERCI pour les références mais pour le Revenu Minimal Universel rien n’est précis. Un flou total. Le RBI ne fonctionne pas bien que si tous les pays occidentaux l’adoptent en même temps, sinon les clients des banques par exemple iront ailleurs. Même parmi les résidents en Suisse. Un client qui spécule sur les changes devises tourne son capital plus que 100 fois par an !!!! (je n’exagère pas). Donc sur un capital de 1 million il payerait 125 mille chaque année de taxes !!!! et dès que vous admettez des exceptions la liste s’allonge.

        1. Oui, en effet, les spéculateurs auraient à souffrir d’une micro taxe comme le phénomène du trading à haute fréquence. Mais comme chacun devrait savoir que la spéculation est totalement contreproductive à l’économie réelle. Même pire depuis l’ère ouverte sur la financiarisation globale de nos économies modernes et intégrées puisqu’elle reste un vecteur majeur d’instabilité. Quant à craindre le départ des spéculateurs domestiques sous d’autres cieux, je vous rappelle juste que ce genre d’inquiétude concernait aussi d’autres acteurs lors du passage des taux d’intérêts en territoire inconnu. Crainte infondée intrinsèquement.

  6. Sachant que les caisses de pension ont massivement investit dans l’immobilier à cause des taux directeurs, que va-t-il se passer s’il y a justement une crise dans ce secteur? Peuvent-elles encourir la faillite? J’avoue ne pas trop savoir sur le sujet alors pardon pour la question naïve.

  7. La démonstration ne me parait guère convaincante: la dernière crise a accéléré la hausse des prix de l’immobilier en Suisse. Pourquoi cette nouvelle crise ferait-elle baisser ces prix ? Chaque crise accentue la divergence entre les pays endettés du Sud de l’Europe et ceux compétitifs du Nord, et ramène vers la Suisse plus d’entreprises, de travailleurs et de capitaux. Les taux zéro ou négatifs sont installés pour plusieurs décennies. Dans ces conditions, je souhaite bonne chance à ceux qui rêvent d’une grande baisse des prix de l’immobilier en Suisse, mais je suis sceptique. Quant au RBI, c’est un outil démagogique et simpliste, qui ne résout à peu près aucun problème: son montant sera toujours trop ou trop peu. On doit continuer à faire de la redistribution sociale selon les besoins de chaque situation spécifique, tout en maintenant une motivation au travail.

    1. La multiplication des banqueroutes de grandes sociétés, qui ont racheté leurs propres actions à taux proche de zéro, va faire que les obligations (d’entreprises et d’états) vont inévitablement chuter. Cela aura pour corollaire que les taux d’intérêts vaut prendre l’ascenseur et les BC seront impuissantes.
      Donc l’immobilier risque fort de s’effondrer par la même occasion.
      Mais n’étant pas un expert, je n’ai aucune prétention quant à mon raisonnement.
      Merci Sergio d’arbitrer….

      1. Pour les personnes qui ont des emprunts à taux fixes pour plusieurs années, sont elles complètement protégées d’une hausse des taux directeurs ?
        Si oui, cela signifie que les banques supporteraient durant toute cette période le différenciel des taux ? Ça ne me semble pas réaliste….!

      2. Bonjour Serge;
        Comment expliquer que: “la chute des obligations aura pour corollaire que les taux d’intérêt vont prendre l’ascenseur”?
        Nous sommes tous d’accord que le prix de l’immobilier surévalué ou non aujourd’hui est lié au taux d’intérêt. Sujet intéressant à analyser.
        J’avais l’impression qu’on va dans une situation à la japonaise, déflation sur des années et donc taux d’intérêt qui stagne voire baisse. Ça pourrait renforcer les prix de l’immobilier.
        S’il y aura une hausse des taux d’intérêt des banques centrales ça veut aussi dire beaucoup d’inflation? C’est là tout le problème du COVID, l’offre et la demande baissent en même temps mais lequel sera plus impactant…
        Au plaisir d’entendre d’autres points de vue

  8. Je pense que l’idée d’un RBI occulte complètement le rôle joué dans l’économie par les petits revenus. En gros tous ceux qui pourront arbitrer leur choix en faveur d’arrêter de travailler puisque le différentiel économique pour eux sera faible : pourquoi travailler si je peux ne rien faire et gagner la même chose qu’avant. Il y a également tous ceux qui ne travaillent pas aujourd’hui (conjoints à la maison, étudiants, etc) qui s’engageront à plus long terme sur des dépenses.
    Le risque avec le RBI c’est que bien sûr ces activités seront vite remplacées, certainement délocalisées d’ailleurs, et qu’à partir de là plus aucun retour en arrière est possible, les postes auront disparus. Si les revenus prévus s’effondrent, quelqu’en soit la raison, il n’y a plus de filet : plus d’argent à distribuer et plus d’alternative comme aller travailler pour gagner soi-même l’argent. Et là on comprendra la valeur du travail. Restera peut-être l’émigration pour ces petits revenus… car c’est eux qui trinqueront.

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