nous voici la langue pendante, les muscles exsangues, les bronches agonisantes, à la limite de l’étourdissement. Nous nous allongeons sur le sol, il nous faut chercher un second souffle. Car nous avons lu comme il a couru et comme vous nous l’avez conseillé. D’une seule traite et en 2 h 15 et 16 ”. C’est-à-dire le temps du vainqueur du marathon de Rome aux Jeux Olympiques de 1960 : Abebe Bikila.
Page après page, nous avons mis nos pas dans ceux d’Abebe, nos battements de cœur sur ses battements de cœur. Notre foulée légère dans sa foulée volante. Dans nos veines comme dans les siennes, frappent aux pores le sang d’un soldat de la garde impériale éthiopienne. Le sang d’un enfant de Jato. Berger devenu Roi aux pieds nus. Sans chaussures nous caressons la terre, nous effleurons les pavés. Tous les chemins ne mènent pas à Rome. Il faut parfois que les Dieux soient cléments. Ça tombe bien, Wami Biratu qui devait être au départ s’est blessé, il faut le remplacer et qui d’autre qu’Abebe ?
Tout au long de ce récit, nous entendons, comme lui, la Petite Voix qui nous dit d’avancer, de nous cacher aussi. De ne surtout pas nous précipiter. Il sera toujours temps d’accélérer.
Un à un, les coureurs étrangers s’époumonent sur la Voie Appienne. Les coureurs étrangers ne courent pas dans le même monde qu’Abebe. Ils sont décrochés, arrêtés, balayés, distancés…crucifiés sur la voie Appienne, qu’à cela ne tienne.
Mais où est le dossard 26 ? Celui-ci dont la Petite Voix me dit de me méfier. Celui écrit aux creux de ma main pour ne pas oublier. Je ne le vois pas, je ne le sens pas. A-t-il vraiment pris le départ ? Et qui est ce dossard 185 que je suis pas à pas depuis des kilomètres ? Qu’importe me dit la Petite Voix. Court Abebe, court et va chercher ce pour quoi tu es venu, homme aux pieds nus.
De la lecture à la course il n’y a qu’une pensée qui nous inspire, nous aide et nous galvanise. La pensée que là-bas, nous attend Yewebdar. Notre chère Yewebdar. Épouse fidèle qui comme Pénélope attend le retour de son héros. Qu’elle se rassure nous serons moins longs que l’homérique Ulysse et nous rapporterons le précieux. Une médaille d’or. La première du sol africain.
Sous l’arc de Constantin, peuple de l’Italie, venez voir passer Abebe. À la botte de Mussolini, vous avez vu partir d’ici, dans l’ancien temps, les chemises noires vociférant leur haine et leurs armes sur les terres du négus Hailé Sélassié 1er. Mais ça c’était avant. Pendant la guerre. Désormais les fusils se sont tus, mais pas les rancœurs.
Peuple de l’Italie, sous l’arc de Constantin, venez voir passer Abebe. Sous l’arc du triomphe, ce 10 septembre 1960 Addis Abeba est vengée. Viva Abebe !
Tu es venu, tu as vu, tu as couru !
J’ai vu, j’ai lu et j’ai su Abebe !
Et parce que vous aimez le large, je vous souhaite, cher Sylvain Coher, bon vent.
Sébastien Beaujault
“Vaincre à Rome”
Sylvain Coher
Actes Sud
Pour vous entendre et mieux comprendre : Ground Control
la procrastination que j’élève, chaque jour, au rang d’un art à part entière, produit sur moi un phénomène inattendu. Je deviens bâtisseur. Oui, je construis, je suis architecte d’un monument toujours plus haut, plus grand, plus impressionnant. Cette méga structure, je l’ai nommée : “Ma pile de livres à lire”. J’en rajoute un, presque quotidiennement. Je m’assure, régulièrement, par de rapides vérifications techniques qu’elle ne va pas vaciller et s’écrouler comme un vulgaire château de cartes. Le plus beau serait peut-être, qu’elle s’échoue sur moi. “Mort enseveli sous une pile de livres à lire” inscrirait-on alors, comme épitaphe sur ma tombe. La grande classe !
quelle belle initiative d’inscrire au fronton de l’Apollo sporting club à Paris, la thématique suivante : “la culture et le sport : je t’aime moi non plus ?”. Quelle bonne idée de convoquer quelques jolies plumes du moment pour en débattre (voir ci-dessous). Avec, comme fantaisie, l’installation de tous ce petit monde à l’intérieur d’un ring. Coup de maître, tant la réalisation technique s’est régalée à filmer, entre les cordes.
je ne vous connais pas, mais il y a bien un mot qui ne doit pas être écrit dans votre dictionnaire amoureux de la vie c’est “résignation”. Avec ses synonymes “fatalisme”, “abandon”, “renoncement” vous avez placé, le tout, dans un sac, bien ficelé, pour qu’ils ne s’en échappent pas et vous avez jeté l’objet dans un puits sans fond.
c’est le reflet de ma vie, j’existe à contre-temps. Et le pire, c’est que je ne le fais pas exprès.
il est nul doute, que vous maitrisez l’art de nous faire vaciller. De nous mettre en sueur, en déshydratation. Vous avez le talent de nous phagocyter la voûte plantaire. De nous réduire à moitié d’hommes. De disperser nos neurones façon puzzle.
que la vie est douce à l’ombre des grands arbres. Des tilleuls ? L’on peut s’y retrouver avec les très proches, pour partager un excellent Morgon. Le temps est à la discussion. Autour du vin, du vélo, des hommes et…des équipiers.
Je vous hais, je vous déteste, je vous honnis ! Je n’ai qu’un seul souhait, en refermant “mes coureurs imaginaires”, c’est de vous écarteler, place de Grève, avec des chevaux de trait à qui je commanderais de ne pas aller trop vite.
après avoir évoqué, ici, le film de
depuis que l’on m’a ouvert les portes du Temps, j’ai plaisir, ici, à libérer quelques correspondances au monde de la littérature sportive. Mais pour la première fois, je me permets, de faire un pas de côté. De poursuivre ma quête de l’émotion sportive autour, cette fois-ci, du film sportif.